« J’en avais des frissons. » C’était peut-être un petit mardi de juillet à Brossard, mais ça n’a pas empêché David Reinbacher de vivre des émotions fortes. Imaginez quand il débarquera un samedi soir au Centre Bell contre Toronto…

Mardi midi, donc, le camp de perfectionnement du Canadien se concluait par un simple match intraéquipe. Les gradins ont été ouverts aux spectateurs, et ils étaient donc quelque 200 ou 300 à acclamer les espoirs du Tricolore.

Même si Lane Hutson, Logan Mailloux et le grand John Parker Jones se sont chargés du spectacle, la foule n’en avait que pour Reinbacher. C’est lui qui a été ovationné lorsqu’il a été envoyé en tirs de barrage. C’est lui qui a eu droit aux derniers applaudissements, en rentrant au vestiaire.

C’est en réaction à ces scènes que Reinbacher, cinquième choix au total la semaine dernière, a évoqué ses « frissons ». « Ils applaudissaient quand j’arrivais sur la patinoire, a-t-il dit, incrédule. J’ai manqué ma feinte en tirs de barrage, mais je vais y travailler dans les prochaines semaines ! »

Il faut dire qu’après un dérapage initial lors de sa sélection, Reinbacher en a reçu, de l’amour. Les applaudissements de mardi s’ajoutaient notamment au livre que lui a offert une partisane, rempli de commentaires positifs formulés par d’autres amateurs. Il a reçu ledit livre dimanche et a pu le feuilleter ces derniers jours. « Ça m’a donné de la motivation et un sourire », a-t-il indiqué.

Cette vague d’amour, ça lui a fait quoi ? Le jeune blanc-bec de 18 ans hésite un instant, clairement encore ému. « Je ne peux pas le décrire, c’est incroyable. Ils se sont bien occupés de moi, ils m’ont envoyé des messages. Je me sens comme à la maison ici. C’est comme ma deuxième maison. Je veux revenir ici, m’entraîner, et redonner aux partisans. »

Le coup de foudre

Restons dans les plates-bandes de Cupidon ; Reinbacher a aussi vécu un coup de foudre – professionnel – à son premier camp de la LNH.

Lui et Hutson, un autre défenseur doté d’un certain potentiel, ont passé beaucoup de temps ensemble. Ça a commencé par des exercices pour lesquels ils étaient jumelés de temps à autre, dans les deux premiers jours.

Puis, pour le match simulé, ils ont carrément été employés en duo. Le mariage tombe sous le sens entre le petit Hutson, ultra-offensif, et le plus costaud Reinbacher, moins porté vers la chose offensive. Si ça a fonctionné pour Danny DeVito et Arnold Schwarzenegger, pourquoi ça ne fonctionnerait pas ici ?

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Lane Hutson

« C’est juste agréable de jouer avec un partenaire excellent pour freiner les adversaires et me protéger. Ça a cliqué toute la semaine, c’est un bon joueur », a lancé Hutson.

Au cours du match simulé, Hutson a préparé au moins trois occasions de marquer pour son partenaire, chaque fois en vain. Reinbacher semblait tout de même en rire. « Je devrai peut-être changer mes bâtons ! », a-t-il blagué devant les caméras.

Rob Ramage, directeur du développement des joueurs, a quant à lui relevé une pointe de déception chez le jeune Autrichien. « Pour l’amour, on est en juillet, s’est exclamé Ramage. Mais il voulait tellement bien jouer. »

Évidemment, ce n’est pas, justement, après un match simulé de juillet que l’on décrétera que la future incarnation du duo Lidstrom-Rafalski est née. Mais les deux arrières ont trouvé des affinités. Reinbacher en est ressorti si impressionné qu’il a lancé une comparaison que l’on pourrait qualifier d’enthousiaste, pour rester poli.

Tu prends la rondelle, tu patines, tu la lui donnes et tu le regardes aller ! C’est un bon joueur offensif. J’espère que ce n’est pas trop haut, mais c’est probablement le prochain Cale Makar. Il est tellement bon sur ses patins, il fait des choses folles sur la glace. J’espère jouer avec lui un jour.

David Reinbacher, à propos de Lane Hutson

Ce sont peut-être les six mois de différence, ou le fait que lui s’exprimait dans sa langue maternelle, mais Hutson a offert une comparaison plus sage. « Il est le prochain David Reinbacher. Il sera très bon, ça se voit », a lancé le défenseur aux allures de chérubin.

Dans deux mois ?

Hutson repartait chez lui mardi après-midi et ne reviendra pas à Montréal avant le printemps prochain, puisqu’il jouera à Boston University tout en essayant d’ajouter à ses 158 lb.

Reinbacher, lui ? C’est moins clair. Personne n’a voulu se prononcer. Ramage est demeuré vague. Reinbacher a dit chaque chose et son contraire à ce sujet, mais il a laissé tomber que le camp des recrues commencera « dans 65 jours », parlant comme un gars qui y sera. Il a ensuite rappelé qu’il reste « des choses à discuter ».

On connaît déjà la question qui enflammera cet été Louis de Mercier, Harold de La Pocatière et les autres friands de tribunes téléphoniques : Reinbacher doit-il jouer à Laval ou en Suisse la saison prochaine ?

Les exemples de Simon Nemec et David Jiricek reviendront souvent. Ils ont été les deux premiers défenseurs réclamés l’an dernier, respectivement au 2e et au 6rang. Le premier jouait en ligue slovaque, le deuxième en Extraliga, la première division tchèque. Pas nécessairement les meilleures ligues au monde. Et les deux ont passé la dernière saison dans la Ligue américaine.

Comme eux, Reinbacher pourrait s’acclimater aux patinoires nord-américaines en restant ici plutôt qu’en retournant en Europe. Par contre, son temps d’utilisation sera plus élevé à Kloten, où il était le défenseur le plus utilisé à forces égales de son club, selon les données du site spécialisé NL Ice Data.

Quoi qu’il arrive, « je devrai être prêt pour leur montrer qu’ils ont pris la bonne décision en me repêchant cinquième ». Voilà qui est dit.