De Samuel Girard à Bowen Byram, en passant par Mikko Rantanen, l’Avalanche du Colorado a démontré au fil des années une capacité à développer de jeunes talents. Ça a toutefois moins fonctionné avec Alex Newhook, au point où Joe Sakic s’est résolu à l’échanger au Canadien.

Newhook a-t-il été « perdu » dans le système de l’Avalanche ou est-ce plutôt son potentiel qui n’est pas celui anticipé quand il a été repêché au 16rang en 2019 ? C’est ce que l’on découvrira ces prochaines années dans l’entourage du Canadien.

Il en aura, du temps, pour se prouver, puisque mardi, le Tricolore a annoncé avoir conclu une entente de 4 ans, bonne pour 11,6 millions de dollars (moyenne annuelle de 2,9 millions) avec l’attaquant terre-neuvien.

« Je suis heureux du contrat, de la durée, a indiqué Newhook dans sa première rencontre – virtuelle – avec les médias montréalais. C’est bien d’arriver dans une équipe qui te veut pour au moins quatre ans. L’argent donne de la sécurité, j’ai du temps avant de négocier ma prochaine entente et je pourrai devenir à mon aise dans la ville. »

Newhook est le plus récent projet de Kent Hughes et de Martin St-Louis, dans leur version hockey des Anges de la rénovation.

Ils ont commencé avec Justin Barron, un projet qui durera encore quelques années. C’est parti du bon pied avec Kirby Dach, tandis que le chantier Denis Gurianov a subi le même traitement que l’îlot Voyageur ; son embauche par les Predators de Nashville, mardi, confirme que le dossier est abandonné.

Tous ont en commun avec Newhook d’être d’anciens choix de premier tour et jouissent donc d’un potentiel intéressant. Newhook a fait ressortir le sien en 2021-2022, sa première saison complète dans la LNH. Avec 33 points, en 71 matchs, il s’est classé 12e parmi les recrues du circuit, dans ce qui était une année faste de joueurs débutants.

Sauf qu’il a plafonné la saison dernière, amassant 30 points en 82 matchs.

Son temps d’utilisation retient l’attention dans le tableau ci-dessus. Pris avec une panoplie de blessés en début de saison, l’Avalanche a ensuite acquis des attaquants en deuxième moitié de campagne, notamment Matthew Nieto et Lars Eller. Newhook a-t-il moins joué en raison de la nouvelle profondeur de l’équipe ou de ses performances insuffisantes ?

« C’est dur à dire, répond le jeune homme. Je voulais contribuer aux succès en séries et c’est dur de le faire quand tu joues six ou sept minutes dans les matchs les plus importants. Je suis un compétiteur, je veux jouer dans ces situations. C’était frustrant. C’était en partie à cause de mon jeu, mais on a aussi ajouté des gars qui m’ont fait descendre dans la hiérarchie.

« Ça a peut-être fait descendre mes minutes, mais j’aurais pu en faire plus avec mes minutes. J’aurais pu avoir de meilleures occasions, mais j’aurais pu en faire plus avec celles qu’on m’a données. »

Espoir en St-Louis

Newhook n’est pas encore passé par Montréal depuis que le Canadien a fait son acquisition, le 27 juin. Au lendemain de l’échange, il quittait Terre-Neuve pour Boston, où il a joué et étudié pendant deux ans et où il s’entraîne une partie de l’été. Il devait aussi retourner à Denver pour y récupérer des effets personnels. Il prévoit arriver en ville « à la fin d’août ».

Il possède toutefois déjà un bon réseau de contacts dans l’organisation, à commencer par Hughes, qui dirigeait jadis l’agence Quartexx, celle qui représente le joueur.

Du reste, il a connu Justin Barron avec l’Avalanche et chez Hockey Canada. Kirby Dach et Kaiden Guhle sont eux aussi d’anciens coéquipiers de l’équipe nationale. C’est sans oublier Cole Caufield, repêché un rang devant lui en 2019. « Je le connais via des amis communs et on s’est affrontés quelques fois », précise-t-il.

Ce que tout ce beau monde lui a dit ? Newhook ne témoigne pas sous serment en visioconférence, mais sa réponse est néanmoins intéressante.

« Ils n’ont dit que du bien de Martin [St-Louis]. Plusieurs d’entre eux, les gars offensifs, du moins, étaient contents de dire qu’ils peuvent jouer en zone offensive, qu’ils sont encouragés à fabriquer des jeux, à être créatifs. Ça cadre bien avec mon style et c’est bien d’avoir cette confiance. Martin apporte ça et il est sur le plancher des vaches (hands on). Il peut analyser le jeu des joueurs et sait où on en est, puisqu’il a lui-même tout vécu. »

C’est bien d’entendre un coach dire qu’il veut que tu sois fidèle à ton style, de ne pas avoir peur de faire des erreurs. C’est différent d’être avec une équipe qui se bat pour le premier rang comme au Colorado. Cette confiance, c’est gros.

Alex Newhook

Cela dit, Newhook n’était pas entre mauvaises mains au Colorado. Aux Girard, Byram et Rantanen évoqués en début de texte, on pourrait ajouter Andre Burakovsky et Valeri Nichushkin, devenus nettement plus épanouis offensivement sous Jared Bednar. Ce dernier, à défaut d’avoir gagné le trophée Jack-Adams, est le seul entraîneur-chef de l’histoire à avoir remporté les coupes Stanley (LNH), Calder (AHL) et Kelly (ECHL). Il sait visiblement ce qu’il fait.

Sauf que ces joueurs, à l’exception de Byram, sont arrivés à une époque où l’Avalanche n’était pas sous pression de soulever le gros trophée. C’est la chance de Newhook : relancer sa carrière dans un contexte où une erreur ne risquera pas de coûter une élimination. Cette période de grâce ne sera toutefois pas éternelle, car on devine que le plan du CH n’est pas de croupir dans la cave pour encore trois ans.

En bref

Une comparaison emballante

En point de presse au repêchage, Kent Hughes avait soumis l’exemple de Chandler Stephenson pour illustrer ce que le Tricolore visera avec Alex Newhook. Stephenson était en effet contraint à un rôle limité chez les Capitals de Washington, jouant une douzaine de minutes par match. Échangé à Vegas à 25 ans, il a aussitôt obtenu un rôle majoré, et lors des deux dernières saisons, il a été utilisé plus de 19 minutes par match et a atteint la marque des 60 points chaque fois. « Je n’avais pas entendu sa remarque, mais ça a du sens, estime Newhook. Kent veut que je fasse partie de l’équipe, il voit que j’étais peut-être sous-utilisé et que je n’ai pas eu les occasions que j’aurais pu avoir. Stephenson est arrivé et s’est établi dans un nouveau groupe. C’est excitant d’entendre ça. J’ai beaucoup plus à offrir que ce que j’ai montré ces dernières années. »

Quelle position ?

Après Kirby Dach, Jonathan Drouin, Alex Galchenyuk et Lars Eller, Newhook sera le nouveau personnage principal de « Centre ou ailier ? », une pièce à succès dans l’entourage du Canadien depuis des années. Il a été repêché en tant que centre et c’est là qu’il dit avoir joué le plus. « Mais je peux jouer aux deux positions », assure-t-il. Comme Dach, il devra toutefois travailler sur ses mises au jeu s’il veut augmenter son efficacité. La saison dernière, il n’en a remporté que 41,4 %. Il s’est promené d’une position à l’autre en cours de saison, mais à la mi-décembre, Jared Bednar avait indiqué le trouver « meilleur à l’aile, parce qu’il patine mieux ». St-Louis ne manquera pas d’options au centre derrière Nick Suzuki, avec Newhook, Dach, Sean Monahan, Jake Evans et Christian Dvorak comme candidats pour piloter des unités.