(Arlington, Virginie) Il n’existe probablement pas de meilleure motivation à atteindre la LNH que d’avoir déjà goûté à la LNH.

William Dufour peut en témoigner. Le Québécois a disputé son premier (et seul) match en carrière en janvier dernier, et il compte les jours avant de pouvoir récidiver.

Le coup de téléphone lui annonçant son rappel, la veille, l’avait laissé incrédule. « Je ne le réalisais pas trop… Je n’étais pas sûr si j’allais jouer. » La réalité l’a rattrapé lorsqu’on l’a informé qu’il patinerait en compagnie de Mathew Barzal et de Josh Bailey sur le premier trio des Islanders de New York.

Devant des Bruins de Boston en pleine forme, les Islanders ont baissé pavillon 4-1. Après une première période encourageante, Dufour s’est retrouvé sur la glace pour deux buts adverses et est rapidement retourné dans les mineures. Néanmoins, le Québécois ne garde « que du positif » de son expérience.

« J’ai hâte de revenir, dit-il. C’est un sentiment que tu veux revivre. »

Lorsqu’il a rencontré La Presse et d’autres membres des médias, mardi dernier, Dufour se trouvait à Arlington en marge de la Vitrine des recrues de la LNH, évènement organisé notamment par le fabricant de cartes de hockey Upper Deck et regroupant les jeunes joueurs les plus prometteurs de la LNH.

Parmi les quelque 35 athlètes sur place, beaucoup étaient déjà des vedettes : Connor Bedard, Leo Carlsson, Logan Cooley…

D’autres, la majorité en fait, étaient des choix de premier tour, qui s’apprêtent à faire le saut dans la Ligue américaine ou la LNH.

Puis il y avait quelques ovnis. Comme William Dufour.

Choix de 5e tour des Islanders en 2020 (au 152e rang), le natif de Québec n’est pas suivi par l’aura d’une grande vedette depuis que son nom est associé à une équipe du circuit Bettman. Sa seule présence à la Vitrine des recrues montre toutefois à quel point il a su s’inviter sur l’écran des sceptiques. Encore une fois, pourrait-on dire.

Échanges

Il sait que d’avoir été échangé deux fois dans la LHJMQ avant le repêchage a soulevé des questionnements. « J’étais peut-être identifié comme un gars à problèmes, soulève-t-il. Mais la vraie raison, c’est que Noah Dobson ou Dawson Mercer n’auraient pas pu être échangés si je n’avais pas été offert en retour. Quand tu veux un gros morceau, il faut que tu donnes un jeune. »

C’est lui qui est devenu le « gros morceau » dans un autre échange, celui qui l’a envoyé aux Sea Dogs de Saint John avant la campagne 2021-2022. En dépit de son statut, l’imposant attaquant s’est perçu comme un négligé, amorçant la campagne sur le deuxième trio.

PHOTO PATRICE LAROCHE, ARCHIVES LE SOLEIL

William Dufour avec les Sea Dogs de Saint John en 2021

Il a toutefois explosé avec 116 points, au deuxième rang de la LHJMQ, performance qui lui a valu le titre de joueur le plus utile à son équipe. Il a ensuite aidé son équipe à remporter la Coupe Memorial, avant d’être sacré joueur par excellence du tournoi.

L’été venu, il s’est présenté au Mondial junior comme attaquant supplémentaire de la sélection canadienne. En finale, il évoluait désormais sur le premier trio avec Joshua Roy et Mason McTavish après avoir monté tous les échelons de la formation.

Chances

Ses débuts dans la Ligue américaine l’attendaient quelques semaines plus tard, à l’automne 2022. On l’avait prévenu. « Tous les gars me disaient : “C’est dur, faire des points, à 20 ans, dans la Ligue américaine, surtout quand tu n’es pas sur le premier avantage numérique…” »

Il a néanmoins trouvé le moyen de marquer 21 buts et d’amasser 48 points en 69 rencontres.

« Quand tu as des chances, il faut les prendre, rappelle-t-il. C’est ce que j’ai fait. »

Il s’émeut donc peu du défi pratiquement insurmontable qui s’offre aujourd’hui à lui : percer la formation des Islanders. À Long Island, pas moins de 14 attaquants possèdent un contrat à sens unique de la LNH.

D’emblée, il relativise sa situation : « Ce n’est pas comme dans le junior : peu importe l’équipe de la LNH, des places, il n’y en a pas. Parfois, il peut y en avoir une. Mais pas à New York. »

Le rôle de négligé lui « convient », dit-il sans gêne. « Je suis un gars qui fonctionne bien sous pression, mais quand je me retrouve sous le radar, je fais ce que j’ai à faire. J’ai tout le temps gagné de cette manière. »

Il souhaite minimalement laisser une « bonne impression » afin que la direction le garde en mémoire pour un rappel rapide s’il devait être cédé à la Ligue américaine.

Il n’existe pas de meilleure motivation à atteindre la LNH, disions-nous, que d’avoir déjà goûté à la LNH. William Dufour ne veut plus qu’y goûter. Il est affamé.