(Buffalo) On entend souvent dire que la relève du Canadien à l’avant est, encore, de petit format.

S’il est vrai que Cole Caufield, Rafaël Harvey-Pinard et Sean Farrell sont légers sur leurs patins, le Tricolore compte néanmoins quelques colosses dans sa filière.

Kirby Dach, sans être un espoir à ce stade-ci de sa carrière, pourrait néanmoins jouer longtemps à Montréal, du haut de ses 6 pi 4 po. Juraj Slafkovsky est une pièce. À 6 pi et un thorax protubérant pour un type de 18 ans, Owen Beck possède un bon gabarit.

PHOTO FOURNIE PAR LE CLUB DE HOCKEY CANADIEN INC.

Emil Heineman (51), au sein du six partant du Canadien à Buffalo vendredi

À ce groupe, il faut maintenant ajouter Emil Heineman, un nom qui circule de plus en plus. Dans les mesures mises à jour par le Canadien, le Suédois est répertorié à 6 pi 2 po et 202 lb, soit 8 lb de plus que cet été. En balayant la patinoire des yeux, à l’entraînement matinal de vendredi, on constatait vite qu’on avait affaire à un homme parmi les adolescents. Il était d’ailleurs le seul des 12 avants du CH en uniforme vendredi à peser 200 lb.

Cela dit, le poids ne fait pas foi de tout, sans quoi King Kong Bundy, Butterbean et Louis Cyr auraient connu de prolifiques carrières sur glace. Mais cette charpente peut être un outil intéressant. Et ça tombe bien, c’est justement ce que voit Jean-François Houle en lui.

« Il a un bon coup de patin et il est bon pour protéger la rondelle, pour un Européen, a observé Houle, vendredi matin. En Europe, la glace est tellement plus grande, ils ne sont pas souvent le long des rampes. Pour un Européen, il la protège très bien, et quand il l’a, il la laisse partir vite. Quand il la reçoit, elle ne reste pas longtemps sur son bâton. »

Un bon tir

En plus de son gabarit enviable, Heineman est doté d’un tir foudroyant, tir qui lui a permis de marquer 7 buts en 11 matchs avec le Rocket de Laval en fin de calendrier au printemps dernier, après que sa saison en Suède eut pris fin.

Björn Hellkvist l’a vu de près, ce tir, puisqu’il a dirigé Heineman à Leksands lors des trois dernières saisons.

« Si tu veux sortir le maximum de lui, tu dois le faire jouer hors l’aile [à droite], pour qu’il puisse mieux utiliser son tir, car il en possède vraiment tout un, observe Hellkvist, au bout du fil.

Son explosion constitue sa principale force. Ajoute son synchronisme, sa coordination oculomanuelle, sa dégaine… Peu de joueurs possèdent un tel tir. Mais il doit trouver comment se rendre dans les zones payantes.

Björn Hellkvist, entraîneur d’Heineman à Leksands, en Suède

Paradoxalement, ces outils n’ont pas fait de Heineman un joueur dominant offensivement. Pendant ses trois saisons complètes à Leksands, Heineman a inscrit 26 buts en 116 matchs. À titre comparatif, Artturi Lehkonen, le dernier attaquant permanent du Canadien à avoir été formé en première division suédoise, a inscrit 24 buts en 96 matchs dans cette même ligue. Et au risque de tourner le fer dans la plaie, c’est seulement dans ses derniers mois avec le CH, puis avec l’Avalanche, que Lehkonen a éclos offensivement. Bref, rien n’annonce un futur joueur des deux premiers trios.

« Je sens que mon jeu est pas mal simple, a décrit le principal intéressé. J’essaie de tirer de partout, de jouer en ligne droite, de ne pas compliquer le jeu. J’essaie de trouver les espaces libres, mais c’est différent ici, sur une patinoire plus étroite. »

Est-il prêt ?

Un fait demeure : Heineman fait tourner les têtes. Invité à identifier le joueur qui l’impressionnait le plus au début du camp des recrues, jeudi, Logan Mailloux a nommé Heineman. « Il sait comment tirer une rondelle, et il bataille fort dans les coins », a décrit le défenseur, lui-même plutôt costaud.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Emil Heineman à l’entraînement à Brossard, en juillet

Martin Laperrière, entraîneur adjoint chez le Rocket, a aussi eu de bons mots. « Il nous a ouvert les yeux avec son talent et son lancer. Il a eu un impact dès son arrivée à Laval », a-t-il dit, au sujet de la fin de la dernière saison.

Vendredi matin, Houle disait s’attendre à ce que Heineman, en raison de son expérience et de sa taille, sorte du lot en soirée contre les Sabres. « Il a joué pro deux ans en Europe. Des gars comme ça devraient ressortir ici », prédisait Houle. Employé au sein d’un trio avec Beck et Joshua Roy, il a finalement connu une soirée en demi-teintes.

Il reste que Heineman a les outils pour veiller tard au camp, surtout si des attaquants établis tombent au combat. Il n’a sans doute pas connu le départ souhaité, mais il aura amplement le temps de se reprendre.