Ça s’est passé pendant une pause publicitaire, donc les téléspectateurs ont été privés de ce moment. Le Canadien a présenté un montage des plus beaux moments de la carrière de Paul Byron, en hommage au jeune retraité. Le tout suivi d’une chaleureuse ovation de la foule.

Le montage comportait évidemment le fameux but que Byron a inscrit à genoux, dans le match no 1 de la série de premier tour du Canadien contre les Maple Leafs de Toronto en 2021. Assurément le but le plus marquant de sa carrière, réussi en désavantage numérique, sa spécialité.

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Sean Monahan a bien sûr levé la tête. Le vétéran était un jeune premier de 18 ans quand il est débarqué chez les Flames en 2013, et il côtoyait alors un Byron de 24 ans, qui tentait de s’établir dans la Ligue nationale.

« C’était un bon joueur, une bonne personne et c’est un bon ami, a décrit Monahan. J’étais jeune quand j’ai joué avec lui et je l’admirais. C’est une soirée spéciale pour lui. Il a connu une longue carrière, des hauts et des bas, et il a affronté beaucoup d’adversité. C’était une belle marque de reconnaissance. »

On avance de 10 ans, et nous voici chez le Canadien de 2023-2024, qui a renoué avec ses partisans en l’emportant 3-2 sur les Blackhawks de Chicago, samedi, au Centre Bell. Sachant la faiblesse de l’adversaire sur papier, il importe de garder une certaine réserve sur les conclusions à tirer de ce premier gain de l’année du Tricolore.

Mais plus on regarde aller Rafaël Harvey-Pinard, plus il se dégage cette impression que le CH tient un Byron en devenir, le Byron en santé de 2015 à 2018, celui qui était capable d’occuper à peu près tous les rôles, tant que ça ne demandait pas d’enfiler un plastron et de grosses jambières, tout en marquant sa vingtaine de buts par année.

Monahan n’a pas été le plus loquace sur le sujet. « Ils ont des points communs, c’est sûr. Ce sont deux bons joueurs, le type de joueur qui t’aide à gagner des matchs », s’est-il limité à dire.

Harvey-Pinard, lui, s’est reconnu dans l’ancien numéro 41 du CH, car il occupe un peu la même chaise.

Il a eu le rôle que j’ai actuellement avec l’équipe : pas nécessairement dans les deux premiers trios, mais boucher les trous, jouer en désavantage numérique, créer des revirements, être bon en échec avant. Par la façon dont il a bâti sa carrière, c’est un bon exemple pour moi.

Rafaël Harvey-Pinard, au sujet de Paul Byron

Son impact en infériorité numérique a été particulièrement notable dans le match. Il a obtenu deux tirs, deux fois des chances de marquer : un deux contre un avec Jake Evans, et une échappée. Et c’est à quatre contre cinq qu’il s’est inscrit sur la feuille de pointage, poussant une rondelle vers la zone neutre pour lancer Monahan en échappée.

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Sean Monahan et Brendan Gallagher célèbrent le but de Tanner Pearson.

« Il lit bien le jeu, il bloque des passes, il se sacrifie pour bloquer des tirs, a énuméré Monahan, au sujet d’Harvey-Pinard. Quand tu es intelligent et que tu as un bon bâton, tu es difficile à affronter. »

En pleine reconstruction, le CH peut choisir parmi les nombreux chantiers auxquels s’attaquer. Dans une récente entrevue accordée à Eric Engels, de Sportsnet, Martin St-Louis indiquait que les entraîneurs ont consciemment décidé de se concentrer sur le jeu à cinq contre cinq. Pourquoi ? « Parce qu’on n’était pas prêts à gagner », a-t-il révélé, expliquant du même coup pourquoi l’avantage numérique n’a pas non plus constitué une priorité.

Mais le jour viendra où ces phases du jeu redeviendront importantes, surtout si cette équipe souhaite disputer des matchs qui ont encore un enjeu au classement tard en saison. Ce jour-là, il lui faudra de meilleures performances en désavantage numérique, où Montréal vient au 31rang (sur 32) depuis deux ans.

Quand ce jour viendra, la présence d’un Harvey-Pinard dans l’effectif deviendra encore plus salutaire.

Les tirs bloqués

Parlant du désavantage numérique, le Canadien a été parfait en sept occasions contre Chicago samedi. Bien sûr, une attaque à cinq qui compte Ryan Donato au sein de sa première unité n’est pas exactement dévastatrice.

N’empêche que le CH a tenu le coup, particulièrement en fin de match, quand Mike Matheson et Nick Suzuki ont coup sur coup bloqué des tirs, pendant que Monahan était au banc des pénalités. Leurs grimaces de douleur semblaient bien sincères, vues de sept étages de haut.

C’est ma faute si on s’est retrouvés dans cette situation. L’équipe s’est levée, Matt et Suzy [Matheson et Suzuki] se sont sacrifiés. On a eu plusieurs pénalités, mais l’équipe s’est levée.

Sean Monahan

Cela dit, on risque ici une prédiction, qui n’a pas été soumise à la vérification par les pairs : si le Canadien offre sept avantages numériques à ses rivaux, il perdra plus de matchs qu’il n’en gagnera.

En attendant, les plus optimistes y verront des occasions pour les quatuors de répéter. Mais Martin St-Louis n’en demande pas tant. « On a fait des ajustements dans notre façon d’écouler les pénalités, a dit l’entraîneur-chef. Tu veux certainement t’exercer, mais ce serait très correct si on le fait seulement à l’entraînement ! »

En hausse : Samuel Montembeault

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Sam Montembeaultlors de la partie entre les Blackhawks de Chicago et le Canadien de Montréal au Centre Bell.

Jake Allen et lui ont connu des difficultés au camp. Allen n’a rien offert de bien rassurant mercredi à Toronto. Montembeault s’est montré nettement plus convaincant.

En baisse : Arber Xhekaj

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Arber Xhekaj frappe Corey Perry lors de la partie entre les Blackhawks de Chicago et le Canadien de Montréal au Centre Bell.

Il se débrouille bien offensivement, mais son jeu défensif demeure bien imparfait. Il a aussi été chanceux de ne pas mettre son équipe dans le pétrin lors de son différend avec Corey Perry.

Le chiffre du match : 26,5 %

Connor Bedard se démarque déjà avec ses jeux en possession de rondelle. Imaginez lorsqu’il gagnera plus que 26,5 % de ses mises au jeu – c’est sa fiche après trois matchs.

Dans le détail

Et puis, ce Bedard ?

Le public montréalais a réservé à Connor Bedard le traitement accordé aux grandes vedettes. Dès la première fois qu’il a touché la rondelle, des huées ont résonné aux quatre coins du Centre Bell. Et ça s’est poursuivi à chacune de ses possessions suivantes. « J’ai adoré ça ! a dit le jeune homme en fin de soirée. Tout est plus amusant quand la foule est impliquée. » De manière globale, le numéro 98 a connu un match correct, sans plus. « Il a eu la rondelle toute la soirée », a fait remarquer Corey Perry. Bedard s’est en effet signalé offensivement – en témoignent ses 12 tentatives de tir –, mais la connexion avec ses coéquipiers n’est résolument pas au point. C’était surtout flagrant en avantage numérique : plus d’une fois, ses partenaires ont semblé désorientés en le voyant parcourir la zone adverse en possession du disque. L’entraîneur-chef Luke Richardson a vu la même chose. « Il doit encore assimiler nos concepts d’équipe, et ses coéquipiers doivent apprendre à travailler avec lui. Il a des qualités spéciales, alors on doit trouver la meilleure manière de les utiliser. » Bedard a été l’attaquant le plus utilisé des deux équipes (22 min 40 s) et a décroché une mention d’aide en toute fin de match.

Dach tombe au combat

« Pas encore !?! », se sont sans doute écriés des dizaines de milliers de partisans du Tricolore en début de deuxième période lorsque l’équipe a annoncé que Kirby Dach, blessé au « bas du corps », ne reviendrait pas dans la rencontre. Au premier vingt, le joueur de centre a été durement plaqué par Jarred Tinordi, au point de basculer sur le banc des Hawks. Il a passé quelques minutes au banc du CH, avec près de lui un membre du personnel médical du club à qui il semblait montrer son genou du doigt. Il a ensuite tenté de patiner pendant une pause publicitaire, mais il est rapidement rentré au vestiaire en boitant. Dach a raté 24 matchs l’an dernier en raison de blessures, et il traîne déjà, à seulement 22 ans, un lourd passif en la matière. À ce jour, il n’a encore jamais disputé plus de 85 % des matchs de son équipe au cours d’une saison complète. Son cas sera réévalué dimanche, et on devrait savoir lundi s’il s’absentera pour une plus longue période.

Cérémonie feutrée

Les comités organisateurs des Jeux olympiques et du Super Bowl peuvent dormir sur leurs deux oreilles : personne, chez le Canadien, n’a volé leurs idées en vue du lancement local de la saison 2023-2024. La présentation d’avant-match a en effet été plutôt ordinaire. Une vidéo dynamique montrant les exploits de la dernière saison était assez réussie, mais la présentation des joueurs a constitué l’antithèse du rythme. Les joueurs sont entrés en quatre groupes – les gardiens, les défenseurs, les attaquants puis le capitaine et ses adjoints. Pendant de longs battements, tous semblaient se demander un peu quoi faire au milieu de la glace. Arber Xhekaj et Cole Caufield ont reçu les applaudissements les plus nourris, mais c’est l’entraîneur-chef Martin St-Louis qui a été le plus bruyamment acclamé. Pendant le match, Paul Byron, nouvellement retraité, et Carey Price, éternel blessé, ont aussi reçu des salutations chaleureuses.

Simon-Olivier Lorange, La Presse