Ce ne devait pas être une histoire de gardien de but. Jusqu’à ce que ça en devienne une, sans pour autant que c’en soit tout à fait une. Mais ne nous égarons pas.

Cayden Primeau a connu une soirée, disons-le poliment, ordinaire. Cinq buts accordés, tous du côté de la mitaine, laissent un goût amer dans la bouche d’un gardien. Son regard fixe, dans le vestiaire, en disait long. Il n’avait pas bien paru et il le savait.

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L’Américain peut néanmoins difficilement être le seul à blâmer dans la défaite sans appel de son club par la marque de 5-1 aux mains des Panthers de la Floride, jeudi. Ses coéquipiers, à preuve, se sont empressés de défendre sa performance.

« Il a joué du très bon hockey pour nous cette saison, a rappelé Brendan Gallagher. Il n’y a pas grand-chose à dire. Il sera correct. »

« La rotation à trois gardiens n’est pas facile, a renchéri Johnathan Kovacevic. J’ai toute la confiance du monde en lui. C’est un gars solide. »

Le principal intéressé était, sans surprise, plus critique. Les buts à répétition du même côté lui ont « un peu joué dans la tête », a-t-il avoué. « Ce n’est pas idéal. […] C’est inacceptable, mais je vais en tirer les leçons et juste passer à autre chose. »

Un gardien qui n’est pas dans son assiette, ça arrive, même aux meilleurs. Alors oui, Primeau s’en remettra.

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Cayden Primeau se fait déjouer par un tir d’Evan Rodrigues en troisième période.

Le problème, c’est que le Canadien ne peut se permettre de voir ses gardiens connaître un mauvais match, probablement pas même un match ordinaire. Parce que si les hommes masqués sortent leurs coéquipiers du pétrin depuis le début de la saison, l’ascenseur ne remonte pas souvent. Voire jamais.

Tous les modèles de calcul des buts attendus disent la même chose : à cinq contre cinq, les gardiens montréalais ont sauvé, match après match, d’un demi à un but par tranche de 60 minutes. Quand on se rappelle que cette équipe a remporté huit de ses dix victoires par la marge d’un seul but, on réalise que sa position au classement pourrait être encore pire.

Sur le plan de l’attaque, les patineurs ne font pas de cadeaux à leurs gardiens. Les voilà au 27rang de la ligue pour les buts marqués par match, même au 28e à cinq contre cinq. L’avantage numérique n’a pas touché la cible à ses 23 dernières occasions, soit en plus de 40 minutes de travail avec au moins un homme en plus.

Jeudi, les Panthers ont offert deux avantages numériques entiers au Tricolore au cours de la seule première moitié de la première période. L’histoire nous l’a appris : ça n’a pas été fructueux.

On n’a pas capitalisé, et on n’a pas créé beaucoup de momentum. On doit être meilleurs que ça.

Sean Monahan

Fardeau

PHOTO DAVID KIROUAC, USA TODAY SPORTS

Gustav Forsling (42) et Brendan Gallagher (11)

Le pire, c’est que le Canadien avait plutôt bonne mine après 40 minutes, et ce, en dépit du retard de 1-0 qu’il accusait. Le spectacle n’était pas excitant — vraiment pas, même —, mais pour un club qui était rentré pendant la nuit d’un long voyage, et contre un adversaire mieux nanti sur le plan du talent, il n’y avait rien de gênant.

« On jouait notre style, et même si ça ne paraissait pas sur le tableau indicateur, on était probablement la meilleure équipe sur la glace », a estimé Brendan Gallagher.

Martin St-Louis a vu la même chose. « On a disputé un bon match, a-t-il dit. Dès le départ, il n’y avait pas de passagers. On était là. L’effort était là. […] C’est plate de perdre, mais je suis fier de mon équipe pareil. »

Lucide, il a toutefois concédé que ses troupiers n’avaient pas été « opportunistes ». « Ç’a un peu fait la différence. On aurait pu entrer en troisième période avec l’avance. »

Ce n’est pas arrivé. Encore. Dans ces circonstances, les gardiens n’ont d’autre choix que d’être parfaits.

Les collègues de Cayden Primeau ont eux aussi trébuché, plus tôt cette saison. Jake Allen a été généreux envers les Kings de Los Angeles, les Bruins de Boston et le Lightning de Tampa Bay. Samuel Montembeault n’a pas été phénoménal contre le Wild du Minnesota et, plus récemment, contre les Blues de St. Louis. Ça arrive, donc.

Ces matchs ont toutefois présenté un élément commun : le CH, en tant que groupe, n’a pas été très bon sur le plan collectif. Alors, que le gardien ne soit pas phénoménal n’a pas changé grand-chose au destin de l’équipe.

Quand c’est serré, la marge d’erreur des gardiens montréalais n’existe plus. L’élastique, déjà tendu au possible, se rompt.

Aucun des portiers du Tricolore n’appartient à l’élite de sa profession. Les trois ont pourtant l’obligation d’être sans faille, sans quoi leur équipe ne gagnera probablement pas. C’est un lourd fardeau à porter. Et c’est aussi un peu injuste.

En hausse : Jake Evans

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jake Evans

Avec au moins deux bonnes chances de marquer, il a été un des rares attaquants à avoir été visibles tout au long de la soirée.

En baisse : Cole Caufield

PHOTO DAVID KIROUAC, USA TODAY SPORTS

Cole Caufield (22) et Gustav Forsling (42)

Ça ne semblait pas cliquer pour son trio, et le franc-tireur n’a franchement rien provoqué de transcendant. Il a récolté une mention d’aide grâce à une jolie passe à Johnathan Kovacevic sur son but… et ç’a été pas mal tout.

Le chiffre du match : 4

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Johnathan Kovacevic

Johnathan Kovacevic a inscrit quatre buts à ses sept derniers matchs. Il en avait marqué trois au cours de la dernière saison en entier.

Dans le détail

Un autre troupier tombe au combat

PHOTO DAVID KIROUAC, USA TODAY SPORTS

Alex Newhook

Alex Newhook semblait destiné à se blesser dans ce match, et ça a fini par se produire. Tout a commencé en première période, quand il a trébuché le long de la bande en zone neutre après avoir été dérangé par le bâton d’un adversaire. À son retour au banc, l’attaquant a retraité au vestiaire quelques secondes avant de rejoindre son équipe. Le même genre de scénario est survenu quelques minutes plus tard ; il a semblé ébranlé, mais a continué à jouer. C’est au tout début de la troisième période que Newhook a subi la chute de trop. Freiné par Sam Reinhart en voulant se rendre au filet avec la rondelle, il a glissé et son pied est entré en contact avec le côté du filet de Sergei Bobrovsky. Sa jambe a semblé se replier sous lui. Incapable de mettre du poids sur sa jambe gauche, Newhook a eu besoin de l’aide de coéquipiers pour sortir de la patinoire. Il n’est pas revenu dans le match. Le Canadien a confirmé après la rencontre que son attaquant s’était blessé « au bas du corps » et qu’il serait évalué par les médecins vendredi.

Josh Anderson « est de retour »

PHOTO DAVID KIROUAC, USA TODAY SPORTS

Jonah Gadjovich (12) et Josh Anderson (17)

Josh Anderson a été un des meilleurs joueurs du Canadien dans la défaite. En première période, le grand attaquant a provoqué deux pénalités, dont une lorsque Gustav Forsling l’a fait trébucher en échappée. Un tir de pénalité aurait pu lui être accordé, mais l’arbitre a opté pour une pénalité mineure, malgré les protestations du joueur du CH. Anderson a été impliqué tout au long du match, même s’il a terminé la soirée avec une fiche de — 2 et aucun tir au but. Comme quoi les statistiques ne disent pas tout. Son entraîneur, Martin St-Louis, a d’ailleurs résumé le travail de son attaquant assez simplement ; « Josh est de retour, a-t-il lâché. Il s’est battu avec intensité, il est de retour. » Anderson ne cumule toujours que deux maigres points, des mentions d’aide, en 23 matchs cette saison. On a d’ailleurs senti une légère frustration en toute fin de match, alors que l’équipe tirait de l’arrière 5-1 et qu’il a décidé de laisser tomber les gants devant Jonah Gadjovich. Le joueur du Tricolore a eu le dessus dans un combat qui s’est étiré sur près d’une minute. Interrogé sur ce qu’il avait pensé de la décision de son attaquant, St-Louis a été évasif. « Je ne sais pas. Je n’ai jamais été dans une situation de même personnellement, donc c’est dur pour moi de commenter, mais je pense que Josh est revenu », a-t-il résumé.

Ces problèmes d’avantage numérique

PHOTO DAVID KIROUAC, USA TODAY SPORTS

Nick Suzuki (14) et Oliver Ekman-Larsson (91)

Le refrain sur les difficultés du Canadien en avantage numérique se poursuit. Le Tricolore a commencé le match avec deux jeux de puissance dans les dix premières minutes, mais a été incapable de s’offrir le premier but. Martin St-Louis avait d’ailleurs procédé à des changements au sein de ses unités, retirant notamment Josh Anderson de la première vague et y ajoutant Alex Newhook. Sans succès. « C’est encore nouveau. Nous n’avons pas pu travailler dessus [mercredi contre les Blue Jackets] », a noté St-Louis, soulignant par ailleurs l’excellent désavantage numérique des Panthers. Ceux-ci n’ont accordé aucun but à court d’un homme à leurs six derniers matchs. Ultimement, le CH n’a pas marqué en 41 min 24 s avec un homme en plus à ses huit derniers matchs. « Je ne dirais pas que ça ne clique pas, a soutenu Nick Suzuki. On a eu beaucoup de bonnes occasions. […] Ça n’a juste pas rentré. Nous avions un bon plan de match, j’ai trouvé qu’on avait exécuté assez bien. Mais nous devons trouver le moyen de marquer. »