(Minneapolis) « On travaille fort, on s’amuse fort. » La phrase ne vient pas d’un joueur du Canadien, mais bien d’un travailleur d’une usine de sidérurgie que Homer visite avec Bart dans Les Simpson.

Mais les joueurs du CH auraient certainement pu employer ces mêmes mots à l’entraînement, mercredi, au Xcel Energy Center.

Chaque but, surtout lors des exercices d’unités spéciales, était suivi de cris de joie bien sentis. Un relais du réserviste Emil Heineman a suscité l’enthousiasme du directeur du développement hockey, Adam Nicholas. « Quelle passe, on va la revoir au top 10 de SportsCenter ! », s’est exclamé Nicholas.

Jake Allen et Cayden Primeau s’amusaient bien lorsqu’ils tentaient des tirs sur réception – avec leur bâton de gardien ! – en attendant qu’Éric Raymond s’amène sur la patinoire. « Avant, je le faisais souvent, mais ça faisait vraiment longtemps que je ne m’étais pas exercé comme ça avec la rondelle », a dit Allen à La Presse.

C’est un entraînement d’une bonne heure que Martin St-Louis a concocté. Les plus jeunes, notamment Cole Caufield et Juraj Slafkovsky, ont étiré ça d’une trentaine de minutes pendant que leur coach et leurs coéquipiers s’entretenaient avec les médias.

Un des exercices s’amorçait par un trois contre zéro contre un gardien, puis l’attaque repartait dans l’autre zone, où le jeu se déroulait à cinq contre cinq. Interrogé quant au but de l’exercice, St-Louis a laissé tomber un bout d’information intéressant.

« C’est un exercice de 200 pieds, il y a pas mal de choses, dealer avec l’attaque [en relance], comment tu arrives dans ta zone, comment tu la défends. Je ne pense pas que tu doives faire chaque exercice sur 200 pieds, donc on essaie d’alterner entre des exercices sur 100 pieds et sur 200 pieds. Sinon, ça serait trop exigeant physiquement. »

On a un niveau d’intensité qu’on peut atteindre. On a les données live au banc, donc je sais à quel point je pousse mon équipe. On peut toujours s’ajuster.

Martin St-Louis

Les joueurs portent des capteurs depuis quelques années, mais de mémoire d’homme, c’est la première fois qu’on entend un entraîneur parler d’une utilisation des données en temps réel.

« Je patine au banc, je demande où on en est, et il [Dale Lablans, entraîneur au conditionnement physique] me donne un chiffre. Ça me dit où on est rendus. On vise une certaine zone. Parfois, je vais ajouter, étirer ou enlever un exercice. »

L’horaire de la deuxième moitié de décembre se prêtait à une séance plus exigeante mercredi. Samedi, c’était jour de match, l’entraînement de dimanche a été annulé notamment en raison du vol vers Winnipeg, lundi était aussi jour de match et mardi, les joueurs avaient congé d’entraînement. C’était donc le premier entraînement en cinq jours ; le prochain aura seulement lieu mercredi prochain, le 27, puisque s’amorcera la pause de Noël après les duels de jeudi au Minnesota et de vendredi à Chicago.

« Le but, c’est que ce soit optimal demain soir », a rappelé St-Louis.

Peu de détails

Le chiffre magique et la façon dont il est mesuré demeurent un mystère. « Je ne le sais pas. C’est une question pour Adam [Douglas, directeur de la science du sport et des performances]. Il me donne un chiffre, mais je ne sais pas vraiment ce que ça veut dire ! » St-Louis précise toutefois qu’il s’agit d’une mesure collective.

Les joueurs, eux, n’étaient pas plus au courant, pour la simple et bonne raison que ça leur passe, pour la plupart, 10 pieds par-dessus la tête.

« C’est un bon outil pour gérer notre énergie, a expliqué l’attaquant Sean Monahan. Les entraîneurs peuvent répondre à nos questions, mais je ne regarde pas trop ça. Je sais comment je me sens quand je me lève. »

« Je ne regarde jamais ça ! a admis Samuel Montembeault. C’est Dale qui s’en occupe ici, Adam à la maison. S’il y a de quoi, ils vont le dire, mais plus aux entraîneurs qu’à moi. »

Idem pour son partenaire devant le filet Jake Allen. « Je ne regarde pas trop ça, je sais quand je suis fatigué ou pas, avec les années. C’était peut-être différent quand j’étais plus jeune. »

Unités spéciales à suivre

Et tout ce travail, ça a servi à quoi ? Le Canadien a beau avoir gagné ses deux derniers matchs, il a du pain sur la planche.

L’avantage numérique a monopolisé la première portion de l’entraînement. L’équipe est au 22rang cette saison, à 18 %, mais fait plus belle figure en décembre (22 %). Par contre, lundi à Winnipeg, les deux buts ont été marqués dans ces circonstances particulières ; le premier, par Christian Dvorak, a nécessité une longue révision vidéo en raison d’une possible passe avec la main, et le deuxième, par Justin Barron, a été inscrit à quatre contre trois.

Les exercices d’avantage numérique ont forcément permis de travailler sur l’infériorité numérique, qui continue à en arracher (70 % en décembre, 30e dans la LNH). Joel Armia, qui formait un duo d’attaquants avec Jake Evans, s’est toutefois permis un but en désavantage, but qui a été accueilli dans la joie et l’allégresse.

Regardez le but (à la fin de la séquence)

« C’était un gros but. On simulait une situation de match et on perdait par un but. On essayait d’aller chercher un but, on a été chanceux ! », a noté Evans.

Ces mêmes unités spéciales avaient coulé le Canadien lors de son autre duel contre le Wild, le 17 octobre. Montréal avait eu l’avantage 2-0 à cinq contre cinq, mais s’était incliné 5-2.

« C’était tellement tôt dans la saison qu’il ne faut pas trop en tirer de conclusions, a plaidé Evans. On pourra corriger certaines choses par rapport au dernier match, mais il y a aussi le fait que c’était très tôt dans le calendrier et qu’on n’était pas prêts pour certaines situations, pour lesquelles on l’est maintenant. »

En bref

Une vilaine séquence à briser

Le Minnesota n’a pas tant souri au CH ces dernières années. Sa dernière victoire remonte au 20 mars 2011, grâce à trois buts de P. K. Subban. Sur 20 joueurs du Tricolore en uniforme ce soir-là, Lars Eller est le seul qui est toujours actif. Aussi bien dire que ça fait un bout… « On est dus », a laissé tomber Martin St-Louis. Depuis 2011, le CH a encaissé neuf revers de suite, par un pointage agrégé de 16-44. « Je ne regarde pas trop ça, mais je sais qu’ils sont bons à domicile. Ça n’a pas été très beau à nos dernières visites ici, a admis Jake Evans. On est en train de bâtir quelque chose de fort et de spécial. On doit continuer à faire ça et ne pas se laisser déconcentrer par l’avantage de la glace. »

Le filet à Montembeault

C’est Samuel Montembeault qui aura pour mission d’aider le CH à chasser ses démons ici, dans ce qui sera vraisemblablement son dernier départ avant Noël. Le Québécois connaît une belle séquence avec une fiche de 4-1-1 dans le dernier mois, pour un total de 7-4-2 depuis le début de la saison. Montembeault est toutefois celui des trois qui bénéficie du meilleur soutien offensif. Le Tricolore inscrit en moyenne 2,94 buts par match quand il joue, contre 2,46 pour Jake Allen et 2,10 pour Cayden Primeau.

De bons mots pour Evans

Martin St-Louis a donné une chance à Jake Evans au sein des deux premiers trios et il se dit encouragé par ce qu’il voit jusqu’ici. En sept matchs depuis sa promotion, Evans compte trois points (un but, deux passes) et gagne 64,6 % de ses mises en jeu, notamment parce qu’en jouant avec le centre gaucher Sean Monahan, chacun peut prendre les mises en jeu de son côté fort. Lundi, une de ses mises en jeu gagnées a d’ailleurs été suivie par une pénalité des Jets en fin de troisième période, et c’est pendant l’avantage numérique subséquent que le CH a inscrit le but gagnant. « Il prend de bonnes décisions avec la rondelle. Quand il n’y a rien, il va la mettre au bon endroit pour son coéquipier. Et s’il a de la place, il est capable de faire des jeux », a estimé St-Louis.