(St. Paul, Minnesota) L’apprentissage de Juraj Slafkovsky se poursuit, et ça inclut la gestion de ses relations avec les arbitres.

Jeudi soir au Minnesota, c’était le laboratoire parfait pour tester sa discipline. Les arbitres, plutôt interventionnistes, ont décerné 15 pénalités. Les deux équipes se chamaillaient comme Pedro Martinez et Don Zimmer en 2003. Quand Marco Rossi, avec son visage et sa carrure d’ado, laisse tomber les gants, c’est signe que les émotions sont vives.

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C’était donc une bonne soirée pour tester le contrôle de Slafkovsky. Et malgré quelques protestations pas toujours subtiles auprès des officiels, le gaillard de 19 ans a passé l’examen.

« Parfois, les émotions… Tu te fâches plus que tu ne le devrais, a admis Slafkovsky, après la défaite de 4-3 du Canadien, en prolongation, contre le Wild. Mais les entraîneurs sont bons pour nous ramener dans le présent, nous rappeler que le match continue. Je suis un gars qui peut vite devenir très frustré. Ça dépend des personnalités. Je perds peut-être patience plus rapidement que d’autres ! »

Non seulement Slafkovsky a évité le cachot, mais il est demeuré suffisamment concentré pour offrir une autre performance encourageante à la droite de Nick Suzuki et Cole Caufield.

L’histoire retiendra que le 1er choix du repêchage de 2022 a amassé deux points en ce frisquet jeudi soir. Des points qu’il importe toujours de replacer dans leur contexte. Le 18 novembre à Boston, Slafkovsky avait aussi amassé deux points, mais il avait livré une de ses pires performances de la saison.

Cette fois, il a tenté à plusieurs reprises d’appliquer ce que Martin St-Louis prêche, soit de jouer entre les cercles des mises en jeu. Ça a mené directement à deux buts du Canadien. Sur le premier, celui de David Savard, il est passé par l’enclave sur la première vague de l’attaque, avant d’y retourner au moment où Savard a tiré.

Sur le deuxième, il a lui-même marqué un but qu’on ne reverra certes pas dans le top 10 des plus beaux buts de sa carrière. Mais si la rondelle tirée par Savard a dévié sur son bâton, c’est parce qu’il était au bon endroit.

« On voit à quel point la confiance fait une différence, a noté Savard. Il joue de mieux en mieux, il amène la rondelle au filet, son tir passe plus souvent jusqu’au gardien. C’est le fun de le voir se développer. »

En moins de mots, St-Louis s’en réjouissait lui aussi. « Les gars le voient, on est beaucoup plus en dedans, on est plus dangereux et c’est un exemple », a ajouté l’entraîneur-chef du CH.

Et Slafkovsky ? « Ça m’importe peu comment ça rentre. C’est sûr que j’aimerais bien traverser la patinoire d’un bout à l’autre. Mais c’est un but et ça nous a permis de créer l’égalité. »

Un talent élite

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Kirill Kaprizov a inscrit le but gagnant.

Dans le camp victorieux, il y a justement un joueur capable de traverser la patinoire sur toute sa longueur. C’est Kirill Kaprizov, auteur du but gagnant, qui est venu gâcher la remontée du CH, qui était mené 2-0, puis 3-2.

« Les gars ont essayé de tout donner, mais en prolongation, c’est pile ou face. C’est une belle passe qui a été faite à un excellent joueur », a noté Savard.

Le pile ou face a généralement souri au Canadien cette saison ; cette défaite était seulement sa deuxième en prolongation en sept matchs. Sauf que le but, et la soirée en général, de Kaprizov était un rappel du type de meneur de jeu qui manque au Canadien. Le Russe a conclu sa soirée plus riche de trois points et a bourdonné sans arrêt.

Ce type de joueur ne pousse pas dans les arbres, mais il reste qu’il a été repêché au 135rang. La façon la plus commune d’acquérir de tels joueurs demeure de les repêcher tôt – par exemple au 1er rang lorsqu’un joueur exceptionnel émerge –, mais il arrive aussi qu’un coup de dés tardif sourie à une équipe, comme c’est le cas ici.

Rien n’indique qu’un tel joueur se trouve actuellement dans le système du Canadien. Peut-être l’est-il. Peut-être sera-t-il repêché en juin prochain. Peut-être pas. Mais en attendant, le Tricolore devra tenter de gagner différemment.

Par exemple en se jetant devant un tir, comme l’a fait Nick Suzuki dans les dernières secondes de la troisième période, pour pousser le match en prolongation. « Tu ne peux pas commencer à le faire quand tu es en séries. Quand tu vois ton capitaine le faire, tu n’as plus d’excuse de ne pas le faire », a rappelé Brendan Gallagher.

Par exemple en fonçant vers le filet pour marquer des buts pas toujours élégants.

En hausse : Nick Suzuki

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David Savard (58) et Nick Suzuki (14)

Le capitaine a offert du jeu assuré. Deux points, six tirs, 69 % de succès aux mises au jeu et un tir bloqué à la toute fin de la 3période pour permettre aux Montréalais de se rendre en prolongation.

En baisse : Jake Evans

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Jake Evans

Son trio a passé la soirée assiégé dans son territoire, notamment parce qu’Evans a remporté une seule de ses 10 mises au jeu.

Le chiffre du match : 10

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Matt Boldy (12) célèbre son but marqué en première période.

Le Canadien s’incline au Minnesota pour un 10match de suite. Les neuf autres défaites avaient toutefois été subies en 60 minutes.

Dans le détail

Débuts timides pour Heineman

Emil Heineman a donné ses premiers coups de patin dans la LNH. Réputé notamment pour la qualité de son tir, le Suédois a annoncé ses couleurs dès son tour de patinoire en solitaire au début de l’échauffement, en larguant une rondelle dans la partie supérieure. Si on parle de l’échauffement, c’est que pendant le match en soi, on l’a très peu vu. Inséré dans la formation en remplacement de Michael Pezzetta, il a joué à la gauche de Mitchell Stephens et Jesse Ylönen. Or, les nombreuses pénalités ont limité grandement les occasions de jeu de cette unité, et Heineman n’est pas employé au sein des unités spéciales. Martin St-Louis a toutefois tenté de le garder impliqué en le désignant pour une présence à 4 contre 4 en milieu de match. La mise en échec qu’il a servie en première période rappelle toutefois qu’il peut tenir son bout quand l’intensité augmente. Heineman a finalement joué 5 min 56 s en 10 présences. « C’est un rêve devenu réalité, a dit le jeune homme. Dommage que nous n’ayons pas gagné. »

La licorne du Wild

Le Wild tient quelque chose de spécial en Brock Faber. L’équipe est décimée à la ligne bleue en l’absence de Jared Spurgeon et Jonas Brodin, donc le nouvel entraîneur-chef, John Hynes, se tourne massivement vers Faber pour lever de la fonte. Dans les 5 derniers matchs, il a joué en moyenne 30 minutes par sortie, dont 33 minutes jeudi. Le collègue Elliotte Friedman rappelait d’ailleurs cette semaine qu’avec une moyenne de plus de 24 minutes par match, Faber menace le record de Tobias Enstrom (24 min 28 s) pour le temps d’utilisation moyen pour un défenseur recrue. Dans ce match, Faber a fait l’étalage de sa polyvalence, marquant un but en plus d’assurer une présence défensivement. Et dire qu’il n’a que 21 ans. Toute une trouvaille pour un joueur réclamé au 45rang en 2020.

Un centre dominant

Joel Eriksson Ek n’a peut-être pas amassé de point, mais il a connu une bonne soirée au cercle des mises au jeu et ça a rapporté à son équipe. Les deux buts du Wild en avantage numérique ont en effet été le résultat de ses succès au cercle d’engagement. Sur le but de Faber, en troisième période, les officiels ne lui ont étrangement pas donné la victoire contre Mitchell Stephens, mais qu’importe, le résultat a été le bon pour le Wild. Il était par ailleurs curieux de voir Stephens prendre une mise au jeu si cruciale en milieu de troisième période, mais après deux périodes, le pauvre Jake Evans avait perdu ses cinq duels face à Eriksson Ek. Ce dernier compte 14 buts après 31 matchs et montre un différentiel de +11. On verra s’il aboutira dans le top 10 du scrutin pour le trophée Selke pour une quatrième saison de suite.