(Chicago) La soirée a commencé au son de la voix de Jim Cornelison et s’est terminée sur All I Want for Christmas Is You. Certainement pas un crescendo pour les mélomanes, mais pour le Canadien, c’était autre chose.

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L’équipe s’est remise d’une première moitié de match brouillonne pour défaire les Blackhawks 5-2, et se donner le droit de se casser les oreilles avec les airs enjoués de Mariah Carey.

Pas moyen de trouver le coupable. « C’est généralement Dale [Lablans], notre préparateur physique, qui choisit la musique, mais je n’ai aucune idée pour ce soir », a admis un Nick Suzuki un tantinet amusé.

À l’image du jeu sur la patinoire, et un peu comme dans une classe au dernier jour avant les vacances, il régnait une certaine légèreté dans le vestiaire gagnant.

Juraj Slafkovsky n’hésite jamais à baisser la garde devant les micros, mais il était encore plus candide quand on lui a demandé pourquoi diantre il portait le chandail et la casquette numéro 71 de Jake Evans.

« J’essayais de trouver mon chandail, mais on m’a donné de la m**** parce que je n’y arrivais pas, donc j’ai juste pris le premier que j’ai trouvé, a raconté en riant le grand ado. C’est un peu serré ! »

Cayden Primeau est au demeurant un chic type, mais les micros et les caméras, dès qu’ils se comptent en multiples de trois, l’incitent à se crisper. Puis on s’est mis à lui parler de Cornelison, véritable héros de cette soirée. Son interprétation de l’hymne national est assurément l’expérience la plus enivrante dans les 32 arénas de la LNH. Imaginez pour un Américain qui joue son premier match dans cette cathédrale du hockey qu’est le United Center.

J’ai eu des frissons, moi aussi. C’était une expérience surréelle. Les fans étaient tout de suite dans l’atmosphère. C’était très cool comme match.

Cayden Primeau, à propos de l’interprétation de l’hymne national au United Center

Très cool aussi parce que pendant une pause publicitaire, Cornelison a chanté quelques mesures de la chanson thème du Grincheux qui voulait gâcher Noël. Disons qu’en matière de divertissement, on était loin des jeux où Mike Matheson doit deviner le prix d’un rouleau de papier hygiénique chez IGA.

Ce vestiaire était festif, donc, pour plein de raisons. Avec ce gain, les Montréalais partent en pause sur une fiche de 4-1-2 dans la dernière quinzaine. On est loin du 1-4-1 qui avait précédé Noël 2022.

Les joueurs se quittent en voyant un premier trio qui, sans être Nichushkin-MacKinnon-Rantanen, fonctionne à haut régime. Suzuki a amassé huit points à ses cinq derniers matchs et Slafkovsky montre de plus en plus de signes encourageants.

« C’est gros, a assuré Martin St-Louis, au sujet de Slafkovsky. Notre groupe carbure à ça. Les gars voient sa croissance et ils sont enthousiastes. Il ne le fait pas en trichant. Il joue du hockey dur et honnête et il est récompensé. »

Pas parfait

Il serait malavisé d’évoquer le Grincheux sans soulever les bémols derrière cette séquence de succès du Tricolore.

Ça commence par la qualité de l’opposition. Quatre de ces matchs ont été disputés contre des équipes du dernier tiers de la LNH, les pires étant les rivaux de vendredi, campés au 31e rang.

L’inconstance est un autre élément à surveiller. Samedi dernier, c’était l’avance de quatre buts contre les Islanders qui a fondu comme neige au soleil. Jeudi, au Minnesota, l’équipe semblait ankylosée en première période. Et vendredi ?

« On n’a pas connu un bon départ », de dire Suzuki. Le pointage de 2-0 Chicago en début de deuxième période confirme en effet ses dires.

St-Louis a quant à lui apprécié les premières minutes, avant de reconnaître que le club était « chanceux » de perdre par un but au premier entracte, et ne savait pas « pourquoi » ses hommes menaient après 40 minutes.

Mais j’ai aimé comment on s’est corrigés et on a joué comme on est capables de le faire en troisième période.

L’entraîneur-chef Martin St-Louis

C’est surtout la façon dont le CH est revenu dans ce match qui plaira à l’entraîneur. Il insiste sur l’importance d’être organisés aux mises en jeu, c’est ce qu’il a obtenu de Mitchell Stephens, centre du quatrième trio, joueur de l’ombre s’il en est un. Il a gagné la mise en jeu et chaque joueur a exécuté son bout de la séquence, jusqu’à ce qu’il fasse dévier le tir de Mike Matheson. C’est ainsi que Stephens a marqué son premier but dans la LNH depuis le 3 mars 2020, soit quelques jours avant que la planète n’arrête de tourner. « Matty a simplement tiré sur réception et j’ai pu placer mon bâton », a humblement dit Stephens.

St-Louis demande à ses joueurs d’anticiper le jeu, de bien occuper l’espace, et c’est ce que Sean Monahan a fait en suivant Jake Evans, pour préparer le but de Josh Anderson.

Et le travail en échec avant de Slafkovsky, un autre aspect du jeu valorisé par le coach, a permis de préparer le but d’assurance.

Le défi pour le Canadien est maintenant de taille. Ses prochains adversaires, Caroline, la Floride et Tampa, sont certes classés en milieu de peloton, mais ce sont néanmoins des équipes matures et redoutables sur papier.

La façon de répondre à ce prochain défi déterminera si leur Saint-Sylvestre sera aussi festive que leur 23 décembre.

En hausse

Mike Matheson

PHOTO KAMIL KRZACZYNSKI, USA TODAY SPORTS

Mike Matheson (8)

Le défenseur avait mangé ses Frosted Flakes avant le match. Il volait sur la patinoire et a préparé le but qui a sonné le réveil du CH.

En baisse

Justin Barron

PHOTO ERIN HOOLEY, ASSOCIATED PRESS

Justin Barron

Coupable de plusieurs cafouillages, dont un qui a mené au but de Jason Dickinson. Il a toutefois bien choisi sa soirée pour peiner, puisque l’attaque a largement effacé ses bévues.

Le chiffre du match

1

Le Canadien remporte un match par plus de deux buts d’écart pour la toute première fois de la saison. Il avait gagné 10 fois par un but, quatre fois par deux buts.

Dans le détail

Juraj Slafkovsky ou Johan Franzen ?

Décidément, Juraj Slafkovsky y a pris goût. Une autre de ses visites dans l’espace de travail adverse lui a valu un but. Comme jeudi au Minnesota, on ne reverra pas ce but aux jeux de la semaine, un peu comme les buts de Johan Franzen à une autre époque. Cette fois, Nick Suzuki a raté son tir des poignets, mais la rondelle a abouti dans les patins du grand Slovaque, et son couvreur, Isaak Phillips, a été déjoué par le mauvais bond. Slafkovsky compte maintenant cinq points à ses quatre derniers matchs, après une séquence de sept matchs de suite sans point, mais pendant laquelle il offrait tout de même de bonnes performances. Notons par ailleurs que ce but a été inscrit pendant que Cole Caufield était au vestiaire pour une raison inconnue. Jesse Ylönen le remplaçait donc au sein du premier trio et il a obtenu la passe secondaire. Ça lui a donc pris 12 secondes pour obtenir un point. Ce fut toutefois sa seule présence au sein de cette unité, Caufield étant ensuite de retour.

Struble se fait remarquer

Comme tout bon défenseur défensif, Jayden Struble a le profil du joueur qui connaît souvent une bonne soirée lorsqu’on ne le remarque pas. Vendredi, on l’a remarqué, mais pas nécessairement pour les mauvaises raisons. Il a d’abord réussi l’arrêt de l’année – pour un patineur – lorsqu’il s’est tenu debout derrière Cayden Primeau, couché sur le ventre après avoir lui-même réussi un arrêt spectaculaire. Struble a donc bloqué le tir d’Anthony Beauvillier, un effort gâché une minute plus tard quand Ryan Donato a ouvert la marque. Puis, en deuxième période, au terme d’une présence particulièrement animée, il a laissé tomber les gants contre MacKenzie Entwistle, pour sa toute première pénalité dans la LNH, à son 15e match. Mais ce faisant, il a tout de même aidé son club puisqu’Entwistle a écopé de deux minutes supplémentaires pour rudesse, offrant ainsi un avantage numérique à Montréal. En point de presse, St-Louis a nommé cette séquence parmi les facteurs qui ont permis à son équipe de retrouver de la vigueur.

Les tours jumelles

Louis Crevier a eu droit à une belle marque de confiance de la part des entraîneurs des Blackhawks par sa simple présence en uniforme pour ce match. Le défenseur québécois a en effet pu disputer son neuvième match dans la LNH malgré le retour de Jarred Tinordi et de Kevin Korchinski à la ligne bleue. Les Hawks ont plutôt cédé Wyatt Kaiser et Filip Roos pour permettre à Crevier de conserver son poste dans le sextuor défensif. Pour l’occasion, l’ancien des Remparts a formé un duo avec Tinordi. À respectivement 6 pi 8 et 6 pi 6, Crevier et Tinordi formaient un tandem qui n’était pas sans rappeler l’Undertaker et Kane. Pour le Québécois, repêché à 19 ans, au 188e rang, cette première audition dans la LNH, après à peine un an chez les pros, est une occasion inespérée. « Je trippe en ce moment », confiait-il aux journalistes québécois après l’entraînement matinal de vendredi. Crevier a obtenu une passe sur le but de Jason Dickinson, son troisième point dans la LNH, mais a ensuite perdu la rondelle sur le jeu qui a mené au quatrième but du CH en fin de rencontre.