Malgré une indiscipline qui aurait pu être coûteuse, l’équipe de Montréal a remporté le premier match de son histoire dans la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF) par la marque de 3-2 en prolongation, mardi soir, à la Place TD d’Ottawa.

(Ottawa) C’était la soirée des Ann ; Ann-Renée Desbiens a bloqué 26 des 28 tirs dirigés vers elle alors qu’Ann-Sophie Bettez a tranché le débat en prolongation. « C’est dans les moments top de ma carrière », a lancé l’attaquante québécoise à la cinquantaine de représentants des médias qui s’entassaient dans la salle de conférence de presse après la rencontre.

« Vous le savez : j’arrive plus vers mes derniers milles, a continué la Septilienne de 36 ans. Chaque fois, je ne sais pas si c’est un dernier moment. Y en aura-t-il d’autres ? J’essaie de profiter de chaque moment comme si c’était le dernier et de permettre à cette équipe-là [de gagner]. »

C’est ce qu’elle a fait, mardi soir, en marquant d’un tir des poignets de l’enclave au début de la période de prolongation.

Au-delà du résultat, qui était évidemment la cerise sur le sundae pour l’équipe de Montréal, cette rencontre était une célébration. La fin d’années d’attentes. L’aboutissement de mois de travail. La concrétisation du rêve de nombreuses jeunes filles et femmes. Le début d’une nouvelle ère. Comme ça le sera sans doute dans les six matchs inauguraux du circuit.

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Marie-Philip Poulin salue les partisans à la Place TD.

À 16 h 30, deux heures trente avant le duel, quelques personnes attendaient déjà devant la porte 2 de la Place TD. « Ils ont encore une heure à attendre ! », s’est exclamée une employée de la place à votre représentante de La Presse.

Un peu partout dans l’amphithéâtre rempli de 8318 spectateurs impliqués du début à la fin, des pancartes étaient tenues à bout de bras. Plus de 45 minutes avant la rencontre, des dizaines de jeunes s’étaient massés en U dans les gradins, autour de l’entrée des joueuses. « C’est ce dont nos rêves les plus fous sont faits ! », pouvait-on lire en anglais sur une affiche. La phrase était accompagnée d’une photo d’une équipe de hockey de jeunes filles. Plus haut, sur une autre pancarte : « Joue comme une fille ! »

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Des amatrices présentes au match.

Quelques-uns avaient enfilé leur chandail d’Équipe Canada pour l’occasion. D’autres, venus encourager l’équipe d’Ottawa, portaient un chandail des Sénateurs, alors que de nombreuses jeunes filles, pour la plupart très vocales, affichaient fièrement les couleurs de leur équipe de hockey.

Quand t’es l’autre équipe, tu t’imagines qu’ils te soutiennent toi à la place. Ce sont des stratégies ! Mais c’était vraiment le fun. C’était bruyant, l’atmosphère était géniale.

Ann-Renée Desbiens

« Je pense que ça démontre à quel point le hockey féminin s’est développé à travers les 10 dernières années, a pour sa part mentionné Bettez. C’est le produit de plusieurs années. Maintenant, les fans sont là pour nous soutenir et nous, on est là pour donner le spectacle sur la glace. Aujourd’hui, je pense que c’est un bel exemple de ça. »

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Plus de 8000 spectateurs ont assisté au match entre Montréal et Ottawa.

Le match

Marie-Philip Poulin et Brianne Jenner se sont serrées dans leurs bras après la mise au jeu officielle, mais leur amitié a rapidement été mise sur pause par la suite. Le jeu était robuste et même si plusieurs joueuses des deux équipes se connaissaient, elles ne s’aimaient pas mardi soir.

« Nous devons nous attendre à la robustesse, a noté Bettez. Nous devons savoir comment recevoir et comment donner une mise en échec. Ça fait partie du spectacle, et je pense que c’est cool. »

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Le jeu a été robuste entre les deux équipes.

L’équipe montréalaise avait un rythme effréné en début de rencontre, rythme qui a rapidement été cassé lorsque Poulin, puis Erin Ambrose et Tereza Vanisova, sont toutes passées au banc des pénalités, une après l’autre dans les 10 premières minutes de jeu. Desbiens a sauvé la mise à plusieurs reprises, fermant la porte aux attaques répétées des Ontariennes. La cerbère a été fidèle à son titre de Grande Muraille de Charlevoix : sans elle en première période, le résultat aurait été fort différent.

« Elle a fait les arrêts dont nous avions besoin, a affirmé l’entraîneuse-chef Kori Cheverie. Elle a calmé les choses et a fait des arrêts clés. C’est pour ça que c’était aussi important pour nous de lui offrir un contrat dès le début. Nous savions que si nous étions pour jouer le style que nous voulions jouer, elle devrait nous sauver à quelques occasions. C’est ce qu’elle a fait ce soir. »

En deuxième période, une drôle de situation est survenue : Poulin a été huée en territoire canadien. La capitaine montréalaise a eu droit à un tir de pénalité après que Zoe Boyd l’a fait trébucher en échappée. Capitaine Clutch n’a pas marqué… au grand soulagement des partisans ontariens qui retenaient leur souffle.

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Marie-Philip Poulin n’a pas pu profiter de son tir de pénalité.

« Si elle est huée, ça veut dire qu’elle est incroyable ! […] C’est un privilège d’être huée, et je pense qu’elle a aimé ça », a lâché Bettez en riant. « Ça veut dire qu’elle fait quelque chose de bien ! », a ajouté Desbiens.

L’équipe d’Ottawa a été la première à trouver le fond du filet. Un but a d’abord été refusé à Makyla Grant-Mentis alors que la rondelle était passée sous le filet, soulevé par le patin de Desbiens. Quelques minutes plus tard, la foule a pu célébrer quand Haylay Scamurra a marqué d’un puissant tir frappé en avantage numérique.

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Ann-Sophie Bettez (24) célèbre son but gagnant.

Claire Dalton a répliqué presque immédiatement, inscrivant le premier but de l’histoire de la franchise montréalaise. Ottawa a repris les devants en troisième période, puis Laura Stacey a égalisé la marque, forçant la prolongation. Bettez a mis fin au débat après avoir récupéré une rondelle libre dans l’enclave.

« Nous n’avons jamais abandonné et nous nous sommes battues jusqu’à la fin », a résumé Bettez, rendant hommage au travail de ses coéquipières.

Consultez le sommaire du match (en anglais)