(Philadelphie) En théorie, ce devait être un duel entre deux équipes qui se ressemblent. Deux clubs assez jeunes, au cœur d’un processus de reconstruction. Mais aussi deux adversaires dont les dirigeants ont exprimé le souhait de disputer des matchs « significatifs » le plus tard possible cette saison.

Si le duel de mercredi à Philadelphie était le moindrement représentatif d’où en sont les deux organisations concernées, on peut parier que les Flyers resteront dans le coup plus longtemps que le Canadien, qui a quitté l’amphithéâtre, presque comme un voleur, avec un point glané grâce à une défaite de 3-2 en tirs de barrage.

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Que l’on se comprenne bien. Les Flyers, malgré leurs surprenants succès des premiers mois de la campagne, ne sont à confondre ni avec les Devils de Jacques Lemaire sur le plan défensif ni avec les Islanders des années 1980 sur le plan offensif. Or, si l’on accepte de considérer les tentatives de tir au but comme un indicateur de l’allure de la rencontre, ça n’a jamais été serré, quoi qu’en dise le pointage.

Les 79 tentatives accordées représentent le 4total de la campagne. Et les 47 tentatives du CH sont au 6rang des pires totaux sur 40 joutes. Les 18 tirs cadrés après 60 minutes égalaient la plus faible salve à ce jour. Tout ça un petit mercredi, contre une équipe qui, probablement, ne sera pas des prochaines séries éliminatoires.

« On n’avait pas notre balle rapide, a imagé Martin St-Louis après la rencontre. On n’a pas joué une bonne game. On n’avait pas d’énergie, on dirait. Il manquait quelque chose. »

Et d’ajouter : « Ce soir, on n’était pas là. » Un constat juste et honnête qu’a aussi dressé David Savard.

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David Savard

On n’a pas été capables de rentrer dans le match, pour une quelconque raison. On a eu de la misère à faire quoi que ce soit en zone neutre. Ils étaient très agressifs avec nos ailiers, on avait de la misère à sortir.

David Savard

Après trois jours sans jouer, pendant lesquels les Montréalais ont tenu deux entraînements complets, et après une victoire émotive contre une puissance de la ligue samedi dernier, comment justifier une performance aussi fade ?

« Des fois, il n’y a pas d’explication, a admis St-Louis. C’est une saison exigeante… Pour une raison ou pour une autre, tu n’as pas tes jambes, ce soir-là. Si on savait pourquoi, on ferait peut-être des choses différentes. […] Parfois, tu penses faire tout ce que tu penses qui va marcher, et tu n’as pas tes jambes. C’est comme ça. »

Impression

C’est vrai que c’est comme ça. Un journaliste a souligné à l’entraîneur-chef qu’au moins, son équipe ne connaissait pas souvent de telles contre-performances.

Ce n’est pas faux si l’on considère les 40 rencontres que la Flanelle a disputées en 2023-2024. La fiche de 17-17-6, en apparence, n’est pas catastrophique.

Mais les hommes de Martin St-Louis n’ont remporté que deux de leurs sept derniers matchs. On parlait des tentatives de tir, plus haut. Des quatre matchs où le CH en a accordé le plus, trois ont eu lieu en 2024.

Si l’on cherche les déconfitures, on n’a pas besoin de remonter bien loin pour en trouver une. Pas plus tard que jeudi dernier, cette équipe abandonnait Jake Allen aux Sabres de Buffalo, victorieux 6-1.

Les Flyers « étaient plus rapides que nous ce soir », a reconnu Martin St-Louis. « On était trop lents, partout sur la glace », a ajouté Nick Suzuki.

Le gardien Cayden Primeau, qui s’est dit insatisfait de son début de match, mais qui a été impérial en troisième période et en prolongation, a évoqué la « patience » de l’adversaire. Insistons : malgré toutes les bonnes choses que l’on puisse dire sur les Flyers, il n’y avait pas de bonne raison pour que le Canadien paraisse aussi mal.

St-Louis, enfin, a salué par trois fois le fait que son équipe avait récolté un point de classement. « Tous les points ont une valeur », a abondé Nick Suzuki.

Plus critique, David Savard a parlé de ce point comme d’un « bonus » auquel il ne s’« attendait pas ». Ajouter un deuxième point – le pointage était, après tout, serré – aurait été « miraculeux » à ses yeux.

Le fait est que le Tricolore est devenu un spécialiste dans l’art de voler des points. Cela fait déjà 15 fois qu’il joue en prolongation. Dans un système de points 3-2-1, il se ferait assassiner. Bien servi par les règles en place, il donne plutôt l’impression de se maintenir à flot.

Après 40 matchs, le Canadien a cinq points d’avance sur sa performance de l’an dernier à ce point-ci, grâce à une victoire et trois défaites en prolongation de plus.

Y a-t-il là une progression ? D’une certaine manière, oui. Mais certains soirs, comme mercredi à Philadelphie, cela ressemble plutôt à une impression, même une illusion.

En hausse : Jayden Struble

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Jayden Struble

De match en match, le jeune défenseur semble gagner en confiance. En troisième période, alors qu’il était sous pression en possession du disque, il n’a jamais perdu son sang-froid et s’est sorti du pétrin seul comme un grand. Il a en outre bloqué deux tirs.

En baisse : Nick Suzuki

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Nick Suzuki

Son trio s’est fait complètement museler par celui de Sean Couturier. Même en tirs de barrage, pourtant une spécialité du joueur de centre, le capitaine a eu l’air de tomber à plat.

Le chiffre du match : 7

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Sean Couturier et Cayden Primeau

En incluant les tirs de barrage, c’est le nombre de rondelles qui ont frappé les poteaux ou la barre horizontale derrière Cayden Primeau. Le gardien a reconnu, en fin de soirée, qu’il leur devait une fière chandelle.

Dans le détail

Pas de pitié pour Cutter Gauthier

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Cutter Gauthier

Les partisans des Flyers ont toujours été reconnus pour leur proverbiale délicatesse. La récente controverse entourant Cutter Gauthier n’a fait qu’ajouter une bûche à leur feu intérieur. Résumé rapide : non seulement le jeune attaquant, meilleur espoir de l’organisation, a refusé de signer un contrat avec l’équipe qui l’a repêché au cinquième rang en 2022, mais il n’a même jamais voulu discuter de vive voix avec la direction du club. Il a finalement été échangé lundi dernier aux Ducks d’Anaheim en retour du défenseur Jamie Drysdale. Ce dernier disputait mercredi son premier match dans son nouvel uniforme, et il a obtenu son premier point en deuxième période, une mention d’aide sur le but de Morgan Frost en avantage numérique. Après avoir rugi lorsque l’annonceur maison a prononcé le nom de Drysdale, une partie de la foule a entonné un chant pour le moins coloré adressé à Gauthier. Nous ne reproduirons pas mot à mot la ritournelle dans un journal familial, mais mentionnons l’évocation répétée du nom d’un animal parti en Alaska faire tourner des ballons sur son nez.

L’histoire sous nos yeux

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Sam Ersson

On aurait pu croire que ce match assez ordinaire n’avait rien d’historique. Détrompez-vous. Sam Ersson a inscrit son nom dans les annales du circuit en cédant sur les deux uniques tirs cadrés du Tricolore en première période. Et encore, la notion de tir est ici étirée, puisque sur la deuxième réussite des visiteurs, la rondelle a doucement flotté au-dessus du gardien des Flyers. Tout ça pour dire que c’était seulement la deuxième fois, depuis que les tirs au but sont comptabilisés par la LNH, qu’un gardien n’arrêtait aucun des lancers reçus pendant un engagement. Le seul à l’avoir fait avant lui : Antero Nittymäki, aussi des Flyers, en 2007. Il est difficile de décrire en mots la chance que les spectateurs sur place et les téléspectateurs à la maison ont eue d’assister à ce moment d’anthologie.

Au revoir, Gustav

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Gustav Lindström

L’ère Gustav Lindström est terminée à Montréal. Le défenseur suédois poursuivra sa carrière avec les Ducks d’Anaheim, qui l’ont réclamé au ballottage mercredi. Lindström, 25 ans, avait été acquis des Red Wings de Detroit l’été dernier dans l’échange ayant envoyé Jeff Petry dans la ville de l’automobile. Retranché par le Tricolore au terme du camp d’entraînement, le droitier a rapidement été rappelé en renfort après que David Savard eut subi une fracture à une main. En 14 matchs, il a abattu du boulot honnête, alors qu’il a surtout été employé dans un rôle de soutien. Il a inscrit un but et amassé quatre points. Au retour en forme de Savard, en décembre, il a toutefois été retiré de la formation et n’a plus joué. La direction du club s’est finalement résignée à soumettre son nom au ballottage afin de libérer une place dans la formation pour le retour imminent de Rafaël Harvey-Pinard, et les Ducks l’ont réclamé. On lui souhaite bonne chance dans ses nouveaux défis.