Moment cocasse dans le point de presse de Jared Bednar dimanche au Centre Bell.

Un confrère de Denver rapporte à l’entraîneur-chef de l’Avalanche du Colorado les propos tenus la veille par son homologue des Maple Leafs de Toronto, Sheldon Keefe. « Quand le trio de MacKinnon embarque, avec Cale Makar et Devon Toews, le calibre de jeu… ce n’est pas la LNH, c’est une autre ligue ! », avait dit Keefe.

Réaction de Bednar : « C’est ce que je répète depuis des années. Maintenant que ça vient de quelqu’un d’autre, vous me croyez ? » L’hilarité a suivi.

Le pilote de l’Avalanche n’avait pas besoin de l’entendre d’un rival pour réaliser ce qu’il a sous la main, particulièrement à l’attaque. Il utilise à outrance son premier trio, une situation qui profite grandement à Jonathan Drouin, nous y reviendrons.

Le premier trio de l’Avalanche joue aussi souvent que des pièces de Rush à CHOM.

Temps d’utilisation moyen cette saison (rang chez les attaquants de la LNH)

  • Mikko Rantanen : 23 min 10 s (1er)
  • Nathan MacKinnon : 23 min 2 s (2e)
  • Valeri Nichushkin : 21 min 49 s (4e)

Cette moyenne est tirée vers le haut par de nombreux épisodes extrêmes. Depuis le début de la saison, il est arrivé 90 fois qu’un attaquant joue 25 minutes ou plus dans un match. Plus du tiers de ces performances (31) ont été le résultat de joueurs de l’Avalanche : Rantanen (10), MacKinnon (9), Nichushkin (9) et Drouin (3).

Le 8 janvier dernier contre les Bruins de Boston, cette utilisation à outrance a atteint de nouveaux sommets : Rantanen a passé 30 min 23 s sur la surface, et MacKinnon, 30 min 22 s. La LNH mesure le temps d’utilisation depuis la campagne 1997-1998, il s’agit là des deux temps de jeu les plus élevés jamais enregistrés pour des attaquants.

PHOTO ISAIAH J. DOWNING, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Mikko Rantanen marque un but contre les Bruins de Boston, le 8 janvier dernier.

Bednar assure qu’il sait très bien ce qu’il fait. L’entraîneur dit consulter les statistiques de temps d’utilisation aux entractes. « J’y vais au feeling, explique-t-il. Certains matchs, on a besoin d’eux davantage. Il y a constamment de la communication au banc. Parfois, je dois même retenir Nate !

« Mais on est habitués, on sait qu’ils sont à leur aise à 22 minutes, ils sont à ce niveau depuis cinq ou six ans. Ils prennent soin de leur corps, donc ça aide. Certains soirs, on a des blessés, des gars qui vont moins bien, le match est serré et on compte sur eux. D’autres soirs, on joue avec l’avance, les autres trios vont bien, donc on leur en donne moins. Mais si on les surtaxe pour un match, on aura des jours comme aujourd’hui où ils viennent seulement à l’aréna pour leur récupération. »

Un premier test

C’est donc dire que ce lundi soir, les amateurs verront souvent les numéros 29 de MacKinnon et 96 de Rantanen. Peut-être aussi le 13 de Nichushkin, s’il est en mesure de revenir au jeu après avoir raté le match de samedi à Toronto.

C’est une réalité que Martin St-Louis connaît bien, lui qui a enregistré deux des six plus hautes moyennes de l’histoire pour un attaquant en une saison. Il avait en effet excédé les 24 minutes par match en 2006-2007 et en 2007-2008. Seuls Paul Kariya, Joe Sakic, Jaromir Jagr et Rod Brind’Amour ont conclu une saison avec des chiffres plus élevés.

« Si je jouais 26 ou 27 minutes, je ne le savais pas à mon premier shift, que je jouerais 26-27. Je jouais la game, et si tu la joues comme il faut, habituellement, tu joues plus de minutes », se souvient-il.

Et comme entraîneur, il a eu droit à une répétition samedi, avec la visite des Oilers d’Edmonton, une autre équipe qui use son premier trio à la corde. Montréal a eu Connor McDavid dans les pattes pendant 26 minutes, Ryan Nugent-Hopkins pendant 25 minutes et Leon Draisaitl pendant près de 24 minutes.

Contrairement à Edmonton, par contre, l’Avalanche concentre généralement ses forces au sein d’une même unité. N’empêche qu’un trio qui joue autant de minutes pose un défi pour l’entraîneur adverse quand vient le temps de déterminer les confrontations.

« Tu ne peux pas penser que tu peux défendre ces gars-là avec un seul joueur. C’est collectif, rappelait St-Louis, samedi matin, avant le duel face aux Oilers. Dans tes décisions quand ils sont sur la glace, il faut que tu sois alerte, discipliné. Tu dois faire attention d’être trop tenté de faire un jeu. Si ça ne marche pas, habituellement, ça repart de l’autre côté. Tu ne peux pas relancer leur attaque. Tu dois être discipliné. »

Drouin aussi

On en parlait, mais il arrive aussi à Jonathan Drouin de profiter de cette répartition du travail. Depuis le 7 décembre, il a franchi la marque des 25 minutes à trois reprises, un chiffre qu’il atteignait sans doute chez les Mooseheads d’Halifax, mais jamais dans la LNH. Le 8 janvier à Boston, l’ancien du Canadien a même passé 28 minutes sur la patinoire.

PHOTO DAVID ZALUBOWSKI, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Jonathan Drouin

Cette utilisation lui permet d’arriver dans son ancienne ville avec le vent en poupe. À ses 15 derniers matchs, il totalise 16 points (7 buts, 9 aides), pour 24 points en 41 sorties depuis le début de la saison. Samedi, à Toronto, c’est son but qui a amorcé la remontée de l’Avalanche, qui a transformé un retard de 0-3 en une victoire de 5-3.

Ni Drouin ni ses illustres compagnons de trio n’ont participé à l’entraînement très optionnel de dimanche, pour lequel on n’a dénombré que six patineurs. Il a donc été impossible de leur parler à ce sujet. Mais Bednar a vanté le « dévouement » de Drouin, tout en attribuant une partie du mérite à MacKinnon, son ancien coéquipier à Halifax.

« Ils ont une excellente relation, a souligné Bednar. Nate est très exigeant envers lui-même et ses coéquipiers. Drou a une assez bonne relation avec lui pour accepter cette critique et donner de la rétroaction, et ça l’aide à se pousser. C’est une relation saine. C’est bon pour les deux. Ça donne à Nate un rôle de mentor, et Drou comprend ça et a élevé son jeu. »

Lehkonen pas encore prêt

Jonathan Drouin sera l’unique ancien du Canadien à renouer avec ses ex-partisans. Artturi Lehkonen a participé à l’entraînement de dimanche, mais il ne sera pas prêt à revenir au jeu ce lundi, a indiqué Bednar. Lehkonen est tombé au combat le 9 novembre, à la suite d’une lourde chute dans la bande. La nature exacte de sa blessure n’a jamais été dévoilée, et un relationniste de l’Avalanche a indiqué aux médias sur place que le Finlandais n’était pas disponible pour répondre aux questions puisqu’il est toujours sur la liste des blessés. En 12 matchs cette saison, Lehkonen totalise huit points.