Vu l’omniprésence du Canadien dans les médias québécois, on pourrait croire que les joueurs et les journalistes qui couvrent l’équipe se côtoient beaucoup. En réalité, ces personnes respirent le même air à peine quelques minutes par jour, au maximum.

Certains joueurs sont plus sollicités que d’autres, que ce soit en raison de leur rôle dans l’équipe – le capitaine, par exemple –, de leur capacité à parler en français ou simplement de leur aisance à exprimer leur pensée. Comme en politique, il y a une valeur à fournir un bon clip.

En résultent donc d’inévitables biais de perception. Un joueur très loquace devient, en quelque sorte, une valeur sûre. Pensez, chez le CH, à Johnathan Kovacevic.

Ceux qui se retrouvent le plus loin des projecteurs seront inévitablement les joueurs qui, en plus d’avoir un impact limité sur leur équipe, ne sont pas très bavards. Exemple non fortuit : Joel Armia. Quasi muet devant les micros, et pas tellement plus jasant une fois les caméras éteintes, il a fait sa marque de commerce de réponses courtes, quasi monosyllabiques. Il demeure aimable et courtois, mais à sa sixième saison à Montréal, on sait à quoi s’attendre en allant discuter avec lui. C’est-à-dire à pas grand-chose.

Lundi soir, le Finlandais a marqué le but gagnant face à l’Avalanche du Colorado. Dans cette rencontre et dans la précédente, contre les Oilers d’Edmonton, il a été parmi les attaquants les plus utilisés de son équipe. Son engagement a été soutenu, efficace.

Pourtant, dans le vestiaire, après le match, Armia, troisième étoile du match, était absent. Car personne n’avait demandé à lui parler. Et même s’il avait été présent, aurait-il fourni quelque éclairage intéressant ? On peut en douter.

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Joel Armia (à droite) célèbre son but gagnant avec Jayden Struble.

Sourire

Un peu plus tard, pendant le point de presse de l’entraîneur-chef, Martin St-Louis a dit ceci de son gros ailier : « Je pense qu’il a du plaisir. Il sourit, il joue du très bon hockey en ce moment. »

L’attaquant, de fait, a de bonnes raisons de sourire. Après qu’il eut amorcé la campagne avec le Rocket de Laval, flirter avec les 20 minutes de jeu est un sacré revirement de situation. Il a inscrit trois buts à ses six derniers matchs. Et au cours des deux dernières rencontres, les gros canons des Oilers et de l’Avalanche ont été blanchis en avantage numérique lorsqu’il était sur la glace. Depuis le début de la saison, il est le meilleur attaquant du CH en désavantage numérique.

Or, la remarque de St-Louis, lancée au sujet d’un si ténébreux personnage, pouvait ouvrir la porte à différentes interprétations. Après tout, Armia lui-même a déjà déclaré qu’il pouvait être son « pire ennemi » lorsque le succès n’est pas au rendez-vous. Sa confiance est fragile, un paradoxe évident avec l’apparente invincibilité du personnage lorsqu’il est en pleine possession de ses moyens.

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Johnathan Kovacevic et Joel Armia

Au lendemain de la victoire, le principal intéressé a semblé amusé lorsque des journalistes l’ont interrogé sur les propos de son entraîneur. Son sourire, justement, en disait long.

Je ne sais pas trop quoi en penser ! Je suis toujours de bonne humeur. Je pense que vous ne me connaissez pas bien.

Joel Armia

Aussi bien déboulonner tout de suite le mythe de l’être tourmenté qui longe les murs dans les corridors du Centre Bell. « À l’instant où tu le connais, il est vraiment drôle. Il fait des blagues tout le temps, il sourit constamment », soutient Jayden Struble.

Le défenseur a côtoyé Armia à Laval en début de saison. Selon lui, jamais le vétéran de 30 ans n’a fait la moue ou projeté son insatisfaction sur ses coéquipiers.

Chez le Rocket, « tout le monde l’a aimé et il a très bien joué son rôle », insiste Struble.

« Bonne place »

« Depuis le début de l’année, il se rebâtit un peu, a précisé Martin St-Louis. C’est dur de te rebâtir de la bonne manière si tu n’es pas à la bonne place, mentalement. Il travaille là-dessus. »

Se rebâtir ? Mais encore ? Par rapport au moment de l’embauche de St-Louis à Montréal en février 2022, a poursuivi l’entraîneur. De fait, au cours de sa première saison et demie derrière le banc, le pilote québécois n’a pas eu beaucoup droit à la meilleure version de Joel Armia. Souvent blessé, il a inscrit 12 buts en 70 matchs. Il a en outre cumulé un différentiel de - 16, une statistique embarrassante pour un attaquant présumé être fiable défensivement.

Depuis le début de la présente saison, il a inscrit 7 buts en 27 matchs. Son différentiel de + 1 est l’un des meilleurs parmi les joueurs réguliers de la formation.

St-Louis a été interrogé sur sa difficulté à prédire quelle version d’Armia il verra à l’œuvre, un soir donné. Le Finlandais, en effet, peine à fournir de bonnes performances avec constance. Encore récemment, La Presse l’encensait après une joute inspirée. Dès la suivante, il retombait dans l’anonymat.

« Historiquement, oui, mais récemment, non », a répondu l’entraîneur au sujet de l’imprévisibilité de son protégé. C’est une bonne chose, mais combien de temps cela durera-t-il ? C’est, encore et toujours, un mystère.

Dans tous les cas, Joel Armia, lui, profite des bons moments qu’il traverse.

« Je me sens bien, j’éprouve beaucoup de plaisir sur la glace, a-t-il assuré. C’est pas mal tout ce que j’ai à dire. »

Au fond, qu’ajouter de plus ?

Montembeault contre les Devils

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Samuel Montembeault

Samuel Montembeault sera le gardien désigné pour affronter les Devils du New Jersey, ce mercredi, premier match d’un voyage de trois arrêts. L’attaquant Jesse Ylönen s’est envolé avec ses coéquipiers, mais il ne s’était pas entraîné avec eux mardi matin. Il n’a pu conclure la rencontre face à l’Avalanche, apparemment après avoir été atteint par une rondelle à la tête. On ignore s’il sera en uniforme à Newark. S’il n’est pas prêt à jouer, il n’est pas exclu que Martin St-Louis déploie une formation à sept défenseurs, faute de compter sur des attaquants supplémentaires. Josh Anderson, blessé au « bas du corps », est quant à lui resté à Montréal, et il pourrait rejoindre l’équipe sur la route d’ici samedi. Quant à Tanner Pearson, qui s’approche d’un retour au jeu, il s’est entraîné avec l’équipe mardi et l’accompagnera dans ce court voyage afin de poursuivre sa remise en forme après avoir soigné une blessure au « haut du corps ».