(Pittsburgh) Le 13 décembre dernier, lors de la visite des Penguins, la tâche d’affronter Sidney Crosby avait été confiée à Mike Matheson et David Savard. Kaiden Guhle n’avait croisé Crosby que pendant 76 secondes, et ç’avait été suffisant pour que Crosby subtilise la rondelle au jeune défenseur et marque.

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Avance rapide de six semaines. Le jeune défenseur et le légendaire attaquant de 15 ans son aîné se retrouvaient sur la patinoire du PPG Paints Arena. Comme à Montréal, Crosby a trouvé une façon de faire mal à Guhle. Et comme à Montréal, les Penguins sont repartis avec la victoire, cette fois au compte de 3-2 en prolongation.

Sauf que la fameuse progression, l’étalon de mesure du régime Hughes-Gorton en attendant les points et les victoires, a sauté aux yeux.

« Il a été fantastique », de lancer Matheson, son partenaire de la soirée. « Il a bien fait ça. Il joue de grosses minutes contre les gros trios. Aussi bien qu’il s’y habitue, car il le fera longtemps ! », d’ajouter le capitaine du Tricolore, Nick Suzuki.

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Kaiden Guhle (21) tente de barrer la route à Evgeni Malkin (71).

C’était une progression tout d’abord parce que cette fois, Guhle a été opposé à Crosby toute la soirée, et non pas pendant une présence ou deux, par accident. Si Crosby a pu préparer un but aux dépens de son rival, Guhle en avait lui-même marqué un en début de match. Au fond, Crosby a simplement fait balancer les comptes.

Et le but que Crosby a préparé ? Vous l’avez sans doute vu passer dans notre résumé vidéo de la rencontre. Le voici d’un angle inédit.

« On dirait que Sid a des yeux tout le tour de la tête. Je ne sais pas comment il a su qu’il y avait un joueur là », s’est émerveillé Mike Sullivan, entraîneur-chef des Penguins, en point de presse.

« Il n’y a pas grand-chose à lui dire sur ce but, car il n’a pas grand-chose qu’il pouvait faire ! », a estimé Matheson.

Evgeni Malkin est moins gâté en termes de qualité d’ailiers ces jours-ci (avec Drew O’Connor et Colin White), mais Crosby, lui, demeure jumelé à Jake Guentzel et Bryan Rust, les deux meilleurs ailiers du club, ce qui complique d’autant plus toute confrontation avec le 87.

« Il y a toujours quelqu’un caché près du poteau derrière toi, donc c’est difficile pour le gardien et les défenseurs de se défendre, a analysé le gardien Jake Allen. Comme gardien, tu dois respecter l’option du tir et espérer qu’il ne réussisse pas ce jeu. »

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Jake Allen était devant le filet du Canadien.

Cette fois, Crosby l’a réussi. Mais dans l’ensemble, Guhle a livré une autre performance assurée. Performance qu’il a de nouveau offerte à droite, son côté opposé. Le match de samedi était son 27e à droite dans la LNH, selon le fichier digne de la NASA entretenu par La Presse. Et ça n’a guère paru.

Guhle s’est même permis de brasser son rival par moments. Sur un jeu en première période, il a bien failli recevoir un patin de Crosby en plein visage. « Sur le coup, je ne savais même que son patin m’avait touché ! », a-t-il dit dans le vestiaire, visiblement pas ébranlé par sa frousse.

Sa fiche indique -1, car un bond chanceux a aussi permis à Lars Eller de marquer quand il était sur la patinoire.

Le moins bon

Les joueurs du CH partent en vacances pour la semaine et Guhle pourra le faire avec le sentiment du devoir accompli.

Idem pour Juraj Slafkovsky, un autre jeune qui a progressé à un rythme intéressant ces dernières semaines. Le trio qu’il forme avec Sean Monahan et Joel Armia a été celui qui a généré le plus de menaces pour les visiteurs.

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Juraj Slafkovsky

Ses touches étaient bonnes, ses angles d’attaque étaient excellents. Il a utilisé sa pesanteur. C’était un très bon match.

Martin St-Louis, au sujet de Juraj Slafkovsky.

Mais ces progressions individuelles ne peuvent cacher les autres chantiers du Tricolore, les aspects où il faut des lunettes roses comme en aurait porté Elton John dans son jeune temps pour voir du positif.

Défensivement, le bateau continue de prendre l’eau. Depuis Noël, l’équipe n’obtient que 25,6 tirs par match, et en accorde 34,8. Montréal est 31e dans la LNH à ce chapitre au cours de cette période, suivi seulement par les Sharks. Et être avant-dernier devant seulement San José équivaut à être dernier, comme on le sait tous.

La gestion des avances pose aussi problème. Sur papier, la fiche de 12-0-2 du CH, dans les matchs où il mène après 40 minutes, paraît bien. Sauf que parmi les 12 victoires, quatre ont été remportées en plus de 60 minutes. Autrement dit, l’adversaire a tout de même créé l’égalité et arraché un point. Samedi, Pittsburgh a non seulement créé l’égalité, mais a aussi amassé le deuxième point.

St-Louis n’était pas d’humeur très loquace après le match, et s’est contenté de dire que son équipe « fait une pas pire job » pour protéger les avances.

Guhle a offert plus de réalisme. « On a fait beaucoup de bonnes choses. Il faut juste s’assurer de garder notre avance quand on l’a en troisième. Personnellement, je pourrais éviter quelques revirements. »

Guhle a accepté une partie du blâme en bon équipier, mais ce chantier appartient surtout aux entraîneurs, qui auront une semaine pour faire le plein d’énergie, et de solutions. Ils en auront d’autant plus besoin qu’ils pourraient très bien perdre quelques soldats d’expérience sur le marché des transactions d’ici au début mars.

Note : Après le match, le Canadien a cédé l’attaquant Lucas Condotta au Rocket de Laval. Le Canadien profite maintenant d’une semaine de relâche et disputera son prochain match le 6 février.

En hausse

Juraj Slafkovsky

Il a joué d’un peu de chance sur son but, mais à 5 contre 5, il a livré une forte performance, aux côtés de Sean Monahan et Joel Armia. Comme quoi ses succès de décembre n’étaient pas seulement attribuables à Nick Suzuki et Cole Caufield.

En baisse

Tanner Pearson

Ses quatre tirs bloqués sont la seule statistique notable de sa soirée. Pearson devra rebondir après la pause si Kent Hughes veut tester sa valeur sur le marché des transactions.

Le chiffre du match

86

Les Penguins ont obtenu 86 tentatives de tir dans ce match : 33 tirs cadrés, 27 qui ont été bloqués par des patineurs et 26 hors cible. Au moins, Jake Allen aura une semaine complète pour s’en remettre.

Dans le détail

Crosby ajoute (encore) des cordes à son arc

Phénomène intéressant chez les Penguins cette saison : Sidney Crosby est employé à outrance pour les mises au jeu. Avant le match de samedi, il en avait pris 1047 ; son plus proche poursuivant, Joel Eriksson Ek, en avait pris 968… en trois matchs de plus ! C’est une répétition de l’an passé, quand Crosby avait terminé la saison avec 140 mises au jeu de plus que le 2e, Patrice Bergeron. Cette tâche découle en partie de sa charge de travail générale (il joue 20 minutes par match), mais il vient tout de même au 22e rang de la LNH pour le temps d’utilisation chez les attaquants. Il y a donc autre chose. En le regardant aller samedi, on a compris qu’il était très bon, puisqu’il a terminé sa soirée à 77 % (17 en 22), dont plusieurs gagnées de façon très franche, à gauche comme à droite. Cette saison, il vient au 5e rang dans la LNH, à 58,9 % de succès. Son meilleur taux de réussite en une saison jusqu’ici était de 55,9 %. « Quand il valorise quelque chose, il met l’effort nécessaire. En général, quand il décide qu’il veut s’améliorer, il y parvient », a statué l’entraîneur-chef des Penguins, Mike Sullivan. Souhaitons, pour les œnologues, qu’il se mette à la production de vin une fois sa carrière terminée ; il pourrait finir par produire de grands crus.

Avantage numérique productif

Ça se poursuit pour l’avantage numérique du Canadien qui vient de connaître deux bonnes semaines. On dirait bien que l’attaque à cinq renaît de ses cendres, mais encore eut-il fallu qu’elle ait eu une première vie, ce qui n’est pas clair. Avec le but de Juraj Slafkovsky, marqué pendant l’unique occasion des Montréalais, le Tricolore part en vacances avec une fiche de 33 % à ses sept derniers matchs (7 en 21). Sean Monahan est en partie responsable de ces succès, lui qui a participé aux cinq derniers buts inscrits dans cette situation. On l’a vu réussir quelques passes lumineuses. Samedi, c’était simplement une subtile redirection de rondelle pour empêcher Drew O’Connor d’intercepter la passe de Nick Suzuki. Slafkovsky a ensuite tenté une passe qui a dévié et a déjoué Tristan Jarry.

Et de neuf pour Caufield

Mine de rien, Cole Caufield est en train de rescaper ses statistiques offensives. En obtenant une passe sur le but de Kaiden Guhle, en première période, Caufield a porté à neuf sa série de matchs consécutifs avec au moins un point. Il compte 12 points (6 buts, 6 passes) au cours de cette séquence. Il n’a pas démérité dans ce cas-ci, réussissant un bon jeu pour remettre la rondelle à Mike Matheson, qui a ensuite repéré Guhle. Avec cette passe, Caufield porte son total de points à 39 en 49 matchs, ce qui équivaut à 65 points en 82 matchs. Et surtout, il est maintenant productif pendant les 60 premières minutes des matchs, contrairement au début de la saison où le jeu à 3 contre 3 nourrissait sa production.