On sait depuis longtemps que le moment Logan Mailloux viendra tôt ou tard chez le Canadien. À voir aller le défenseur depuis quelques semaines, et devant la soudaine hécatombe en défense à Montréal, on se demande si ce moment n’est pas sur le point d’arriver.

Jordan Harris et Kaiden Guhle sont tous les deux tombés au combat dimanche contre les Blues de St. Louis. Le premier, ébranlé et confus, a eu besoin de l’aide de deux coéquipiers pour sortir de la glace. Le deuxième se tenait le bras avec douleur lorsqu’il a quitté la rencontre. On peut s’attendre à ce qu’ils ne soient pas en uniforme mardi contre les Ducks d’Anaheim.

La logique voudrait donc que le Tricolore rappelle un défenseur, idéalement un droitier. Justin Barron apparaîtrait ainsi comme un choix prudent. Or, la direction a créé deux précédents plus tôt cette saison en rapatriant Jayden Struble et Joshua Roy du Rocket de Laval, même s’il s’agissait de recrues de la Ligue américaine. Ce pourrait bien être, cette fois-ci, Logan Mailloux.

Ce dernier, fraîchement rentré du match des étoiles, pointe au cinquième rang des défenseurs du circuit avec 32 points en 45 matchs, à seulement deux points du meneur. Cette production inclut 16 points à ses 16 plus récentes sorties. Tout cela, rappelons-le, alors qu’il dispute sa première saison chez les professionnels.

Les atouts offensifs de l’Ontarien n’ont jamais suscité d’inquiétude. On ne saurait en dire davantage de son jeu défensif, clairement identifié comme sa faiblesse au camp d’entraînement du Tricolore, l’automne dernier. Sur ce plan, sa progression a été « incroyable », dixit Tobie Paquette-Bisson, son coéquipier chez le Rocket.

On affirmera sans trop se tromper que le jeune homme revient de loin. Après 21 matchs, son différentiel était de - 12. Au cours des 24 derniers, il a été de + 12. Le revirement de situation, bien qu’alimenté par une amélioration collective chez le Rocket, est en effet spectaculaire.

« Il s’est replacé », a confirmé Jean-François Houle, entraîneur-chef du Rocket, après l’entraînement du club, lundi matin.

« Je trouve que son jeu s’est énormément amélioré depuis le début de l’année, en quelques mois seulement. Il est capable de générer de l’attaque, il l’a démontré, mais son côté défensif est aussi rendu pas mal bon. »

Mailloux lui-même estime avoir fait du chemin. Ses efforts, dit-il, ont commencé la saison dernière, mais dans la Ligue américaine, un « ajustement » était inévitable. « C’est une chose d’être défenseur, mais si tu veux jouer dans la LNH, tu dois bien défendre, c’est évident », lance-t-il.

Sans parler d’un déclic, il évalue avoir « commencé à changer [son] jeu » environ au 20match de la saison du Rocket. « Je joue avec plus de confiance, avec et sans la rondelle. Je tue mieux les jeux », évalue-t-il. Selon lui, il contrôle mieux la distance, en repli, entre son adversaire et lui.

Maturité

Un thème qui revient souvent lorsqu’il est question de Logan Mailloux est celui de la maturité.

Après un bon camp à Montréal, le jeune homme était apparu plutôt désinvolte à Laval. La ponctualité n’était pas une de ses valeurs cardinales. L’ardeur au travail non plus. Les vétérans ont tôt fait de rectifier le tir.

Jumelé à Mailloux en défense, Tobie Paquette-Bisson a participé à l’intervention, si on peut la nommer ainsi.

« J’ai essayé de corriger des affaires, souligne le Québécois. Les gens oublient à quel point Logan est jeune. La différence entre le junior et le pro, c’est beaucoup de petits détails. C’est arriver à l’heure ou un peu avant tout le monde, pour être plus sharp. Même si l’entraînement ne te tente pas, tu te mets dedans. Pour lui, je pense que ça manquait. Depuis ce temps, il fait une bonne job. »

L’adaptation à la vie chez les pros dépasse largement le travail à l’aréna, nuance Mailloux. « Tu vis tout seul pour la première fois, tu fais la cuisine, le ménage ; il n’y a plus de famille d’accueil, note-t-il. Être pro, c’est sur la glace et à l’extérieur. Je pense que je me suis bien ajusté. »

« Il a vraiment grandi, abonde Jean-François Houle. C’est ce qu’on voulait voir. Un espoir comme lui, un choix de premier tour, on veut s’assurer de bien l’encadrer. Il a démontré beaucoup de maturité. »

Houle était évidemment au courant du fait que, vu la situation problématique du Canadien, au moins un rappel lui pendait au bout du nez. Curieusement, en soirée, l’organisation n’avait toujours rien annoncé en ce sens. Harris et Guhle, tel Lazare, seraient-ils déjà revenus d’entre les morts ?

Qu’importe, le pilote du Rocket estimait lundi matin que Mailloux serait « bientôt prêt ».

« Il a démontré qu’il est capable de jouer à un haut niveau avec constance », a-t-il ajouté.

Quant au principal intéressé, il assure « ne pas trop y penser ». « Si ça arrive, ça arrive, et ce serait cool. Mais d’autres le méritent aussi. On a un gros week-end qui s’en vient, je me concentre là-dessus. »

De son passage chez les Knights de London, dans la Ligue junior de l’Ontario, il garde en tête cette maxime que répétait son directeur général Mark Hunter : « Optimisme et humilité, tous les jours. »

C’est donc en se répétant ces sages paroles qu’il accueille le succès qu’il connaît depuis quelques semaines. Et c’est de la même manière qu’il tentera d’aborder la suite si jamais il reçoit l’appel dont il rêve depuis longtemps.