« Apprendre à gagner, dans le contexte dans lequel tu te retrouves, ça n’a pas de prix », insiste Danièle Sauvageau.

On sait que l’équipe de Montréal compte dans son effectif plusieurs joueuses de l’équipe nationale, qui savent ce que gagner veut dire. Ce dont on a moins parlé, ce sont ces joueuses issues d’autres équipes qui ont elles aussi connu la victoire.

Au total, cinq membres de l’édition 2022-2023 du Toronto Six, de la défunte Premier Hockey Federation (PHF), évoluent aujourd’hui à Montréal : Tereza Vanisova, Leah Lum, Kati Tabin, Dominika Laskova et la gardienne Elaine Chuli. Ensemble, elles ont remporté le championnat de la PHF.

Est-ce un hasard si cinq joueuses de cette équipe championne se retrouvent à Montréal ? En partie, mais pas complètement, explique à La Presse la directrice générale de la formation montréalaise, Danièle Sauvageau.

« On a regardé l’ensemble des joueuses dans la PHF, l’encadrement qu’elles avaient. Gagner, c’est une chose, mais quel est l’encadrement que ces joueuses avaient en dehors de la glace ? […] Dans notre liste de repêchage, avec le temps qu’on avait, on avait des critères bien précis. Ceux-ci étaient de dire : qui est la plus près de jouer dans l’environnement qu’on veut créer ici, à Montréal ?

« Elles semblaient avoir quelque chose d’intéressant [à Toronto] parce que ça faisait quand même quelques années qu’elles frôlaient le championnat, et là elles l’ont gagné. En même temps, il faut que tu regardes l’héritage de ces joueuses-là avant qu’elles jouent pour le Toronto Six. Tout ça a été considéré. »

Bien sûr, le calibre de la défunte ligue n’était pas le même que celui de la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF), étant donné que la plupart des meilleures joueuses au monde n’y étaient pas. Mais cela n’enlève rien à ce que ces cinq joueuses ont vécu avec le Toronto Six l’année dernière, croit Sauvageau.

« Apprendre à gagner, dans le contexte dans lequel tu te retrouves, ça n’a pas de prix. Chacune des joueuses ici, si on fait l’historique de leur carrière, a gagné à un moment ou un autre. […] Ça, c’est de l’expérience de vie qui ne s’achète pas. Que ce soit le même niveau ou pas, elles ont dû gagner au niveau dans lequel elles étaient. »

L’entraîneuse-chef Kori Cheverie abonde dans le même sens : il était indispensable, pour le personnel hockey, d’accueillir à Montréal des joueuses qui ont « fait l’expérience de la victoire ». « Pour nous, c’est très important d’avoir des joueuses qui savent ce que ça prend pour se rendre loin dans une course aux séries et pour gagner des matchs importants », affirme-t-elle.

« Nous avons de la chance d’avoir autant de joueuses qui ont un pedigree gagnant. »

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Kori Cheverie, entraîneuse-chef de l’équipe montréalaise

La chimie d’équipe

Tereza Vanisova et Leah Lum s’entendent pour dire que la formation torontoise de 2023 avait une chimie intéressante ; c’est, assez unanimement, un des éléments clés derrière tout championnat.

« Nous avions une des équipes les plus soudées que j’aie eues, dit Lum. De toute évidence, ç’a aidé dans chaque match, dans toutes les situations. Nous savions que nous pouvions toujours compter les unes sur les autres. »

« Je ne sais même pas si c’était une question de chimie sur la patinoire. Je pense que c’était surtout en dehors de la patinoire, note pour sa part Vanisova. Nous étions vraiment proches les unes des autres. Nous avions simplement du plaisir, et ça s’est transposé sur la patinoire. »

La timide Tchèque de 28 ans se souvient de la confiance qu’elle avait envers l’équipe.

« Je le savais en dedans de moi : nous allions gagner la Coupe, raconte-t-elle. Je ne pouvais pas en être certaine, de toute évidence, mais je croyais en moi et en l’équipe. »

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Tereza Vanisova

Mine de rien, la LPHF a atteint sa mi-saison. Au total, 38 des 72 matchs de la campagne ont été disputés. Et Montréal se retrouve au premier rang avec deux points d’avance sur l’équipe du Minnesota et trois points d’avance sur celle de Toronto.

Considérant que « chaque match est différent » dans cette nouvelle ligue, Vanisova hésite à affirmer qu’elle se sent tout aussi confiante cette saison. « Mais je crois en notre équipe », lance-t-elle.

« Tout le monde s’entend vraiment bien en dehors de la patinoire, et nous sommes assez proches dans le vestiaire, note Leah Lum. Ça aide certainement et ça se transpose sur la patinoire aussi. »

Même chose du côté de Cheverie, qui se souvient très bien des classements initiaux parus après le repêchage.

« Ça reste en moi, en tant que coach, le fait que tout le monde pensait qu’on serait près du bas du classement », dit-elle.

« Ce qui nous a menées là [où nous sommes], c’est à quel point [les joueuses] se soucient les unes des autres et s’aiment. […] Quand tu as ce genre de chimie, c’est sacré. Nous avons un incroyable vestiaire et ça nous permet de pousser plus fort et de dépasser les attentes sur la patinoire. »

Le format des séries

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jayna Hefford, vice-présidente principale aux opérations hockey de la LPHF

La Ligue professionnelle de hockey féminin a annoncé mercredi le format de ses séries éliminatoires, qui débuteront dans la semaine du 6 mai. Les quatre premières équipes au classement y prendront part. La formation en première place bénéficiera d’un avantage, celui de choisir son adversaire de premier tour parmi les équipes classées troisième ou quatrième. « C’est une autre façon d’être innovants et créatifs. L’équipe qui finit première pourra essayer d’avoir un meilleur horaire de voyagement, ou essayer de choisir le meilleur affrontement pour elle. La décision revient aux directeurs généraux et aux entraîneurs », a expliqué la vice-présidente aux opérations hockey, Jayna Hefford, dans une conférence de presse virtuelle. Les deux tours (demi-finale et finale) seront disputés sous forme de trois de cinq.

Une course au premier choix

La LPHF a décidé d’innover également dans ses façons de faire pour son prochain repêchage, qui aura lieu en juin. Le premier choix ne sera pas déterminé par une loterie comme c’est le cas dans la Ligue nationale. Quand une équipe sera « mathématiquement éliminée » des séries, elle commencera à amasser des « points d’ordre au repêchage » [draft order points]. L’équipe éliminée qui aura accumulé le plus grand nombre de points à la fin de la saison obtiendra la première sélection de chaque tour au repêchage. Cela empêchera les équipes de faire du tanking, c’est-à-dire perdre des matchs volontairement afin de terminer le plus bas possible au classement – une tactique qu’ont souvent été soupçonnées d’utiliser des équipes de la LNH. « Ça assure la compétitivité, qui est très importante dans cette ligue, dit Hefford. C’est aussi une façon d’inciter les partisans à rester engagés. Il y aura une course différente une fois que leur équipe aura été éliminée. »

« Rien sur la table » en matière d’expansion

Ceux qui espèrent voir une équipe de la LPHF s’établir à Québec devront patienter. Interrogée à ce sujet, Jayna Hefford a indiqué que chaque visite dans une nouvelle ville permettait d’« apprendre de nouvelles choses », mais que pour l’instant, « il n’y a rien sur la table » en vue de la saison prochaine. « Nous voulons voir le jeu grandir et la ligue grandir. […] Nous allons certainement être réfléchis et stratégiques quant à la façon dont nous grandirons. » Concernant la saison prochaine, l’administrateur Stan Kasten a ajouté : « Attendez-vous à ce qu’il y ait beaucoup plus de matchs dans des sites neutres et dans des marchés de la LNH dans lesquels nous ne sommes pas déjà. »