Double médaillée d'or olympique, détentrice de plusieurs records au hockey universitaire, Charline Labonté serait une immense vedette... si elle était un homme. Loin du faste et des millions de la LNH, elle défend plutôt présentement le filet des Martlets de l'Université McGill et connaît une saison qui lui permet de prétendre au titre de meilleur gardien de but au Québec.

«C'est la nature de notre sport, a dit récemment la femme de 28 ans. Le hockey féminin attire l'attention une fois tous les quatre ans, aux Jeux olympiques. Le reste du temps, nous jouons dans l'anonymat. Mais nous partageons la même passion du hockey.»

Revenue cette saison à McGill après une année consacrée au programme olympique, Labonté a retrouvé une équipe très forte, mais moins dominante que par le passé. «Le niveau de jeu progresse continuellement dans la Conférence québécoise, a-t-elle expliqué. L'arrivée des Carabins de l'Université de Montréal a aidé à garder plusieurs filles au Québec et toutes les équipes en ont profité.

«Cette saison, nous n'avons remporté qu'une seule victoire par une forte marge et nous avons dû aller trois fois en fusillade avant de nous imposer. C'est plus dur, c'est certain, mais cela nous aide aussi à être mieux préparées pour les séries.»

C'est souvent grâce à leur gardien que les Martlets ont préservé cette saison une série record de 105 victoires dans leur conférence. La 100e a d'ailleurs été acquise en fusillade, au CEPSUM de l'UdeM, et Labonté n'a laissé personne la déjouer.

Au moment d'entamer les championnats nationaux, ce week-end à Waterloo, elle a remporté ses 21 matchs de l'année, avec neuf blanchissages, une moyenne de 0,70 et un taux d'efficacité de ,960. Sans surprise, Labonté a été choisie au sein de l'équipe d'étoiles du Sport interuniversitaire canadien.

«Je pense que je procure beaucoup de confiance à mes coéquipières, a-t-elle estimé. Elles savent que je suis là, derrière, prête à corriger une erreur si c'est nécessaire, et elles peuvent prendre des risques. J'aime aussi me déplacer autour de mes filets, manier la rondelle, et cela est devenu une caractéristique de notre jeu.»

L'entraîneur-chef Peter Smith ne tarit évidemment pas d'éloges envers Labonté. «Sa contribution à l'équipe est extraordinaire, a-t-il souligné. Charline travaille toujours très fort et son exemple a un effet d'entraînement sur toutes les filles. C'est une gagnante, qui cherche toujours à s'améliorer et ne se contente pas d'une victoire ou d'une bonne performance.»

Encore quatre ans

«Avec le programme olympique, a rappelé Labonté, on travaille pendant quatre ans en fonction d'un seul match: la finale des Jeux! C'est très exigeant et ça nécessite beaucoup de sacrifices. Après les Jeux de Vancouver, j'ai beaucoup réfléchi à mon avenir...»

Après avoir partagé le travail avec Kim St-Pierre, en 2006, Labonté espérait encore davantage des Jeux de 2010. Une blessure à un genou l'a plutôt reléguée au poste de réserviste et elle n'a disputé qu'une période en ronde préliminaire.

«Vancouver a été une expérience à la fois excitante et frustrante, a-t-elle avoué. C'était fantastique de porter les couleurs du Canada, chez nous, avec le soutien des partisans qui nous reconnaissaient partout et nous encourageaient sans cesse.

«Mais c'était décevant de ne pas jouer davantage, après tout ce travail. C'est pour ça que j'ai hésité. J'ai toutefois décidé de poursuivre l'aventure pour un autre quatre ans et cela m'a amené à décider où je jouerais cette saison. J'aurais pu aller jouer avec l'équipe de Montréal dans la Ligue canadienne professionnelle, mais Kim (St-Pierre) est déjà là et l'encadrement n'est pas au même niveau qu'à McGill.»

Plusieurs Canadiennes se laissent tenter par les universités américaines, mais Labonté n'est pas admissible à la NCAA parce qu'elle a joué dans la LHJMQ, de 1999 à 2001. «Je ne regrette rien de cette décision, a-t-elle dit. À l'époque, cela m'offrait la possibilité de progresser comme gardienne et j'ai vraiment apprécié l'expérience.

«Par ailleurs, je ne suis pas certaine que les universités américaines offrent le même encadrement académique que les nôtres. Ici, à McGill, je complète un baccalauréat en éducation physique et j'aimerais amorcer une maîtrise en psychologie du sport.

«L'aspect psychologique est tellement important dans les sports de haut niveau, je suis bien placée pour le savoir. J'aimerais pouvoir aider de jeunes athlètes à atteindre leur plein potentiel.»

Avec sa maturité, son palmarès exceptionnel et ses habitudes de travail, Labonté sera assurément une merveilleuse conseillère quand elle décidera de se consacrer à ce qu'elle appelle encore «la vie après le hockey».