Alex Harvey n'avait pas intérêt à rater son coup. Tout son entourage s'était déplacé hier pour ce sprint individuel des championnats canadiens, qui devait avoir lieu sur les plaines d'Abraham, mais qui a été déplacé in extremis au Mont-Sainte-Anne en raison du temps chaud. Même l'hélicoptère de son commanditaire Cascades, avec à son bord l'un des patrons, Laurent Lemaire, suivait les finales à très basse altitude, ce qui donnait à la scène un caractère dramatique ou surréaliste, c'est selon.

Même l'hélicoptère de son commanditaire Cascades, avec à son bord le grand patron Laurent Lemaire, suivait les finales à très basse altitude, ce qui donnait à la scène un caractère dramatique ou surréaliste, c'est selon.

Généralement à son meilleur quand il est sous les feux de la rampe, Harvey n'allait pas se laisser aspirer par le tourbillon.

À l'issue d'une finale où personne n'a fait de quartier, il a battu de justesse Devon Kershaw pour signer sa deuxième victoire des championnats. Harvey a débouché légèrement en retrait dans la dernière ligne droite de 150 mètres. Séparés par un couloir, bien penchés pour fendre le vent, les deux hommes se sont mis à patiner frénétiquement. Harvey a eu le meilleur par 17 centièmes, profitant d'un léger faux pas de son ami Kershaw, qui n'avait plus les jambes pour se maintenir en équilibre. «C'est le move qu'Alex avait besoin pour gagner», a fait Kershaw.

«J'avais l'avantage d'être le chasseur plutôt que celui qui est chassé», a simplement résumé Harvey, qui a franchi le 1,6 km en 3:01.47.

Ça, c'est ce que les quelques centaines de spectateurs ont pu voir. Il paraît que ça a joué du coude dans les bois. D'abord, à 500 mètres, Harvey a fendu un bâton de Kershaw quand celui-ci a voulu le couper pour profiter de l'aspiration du grand Len Valjas, un géant de 6'6 et auteur de trois podiums récents podiums en Coupe du monde.

Meneur dans la dernière montée, Valjas a ensuite vu tant Harvey que Kershaw passer sur ses skis, ce qui l'a fait dégringoler du premier au quatrième rang. L'Albertain Philip Widmer en a profité pour se faufiler et se sauver avec la médaille de bronze.

Harvey a souri quand on lui a rapporté ces incidents de course alors qu'il signait des autographes à la tente d'Éducaide, organisme de soutien à la persévérance scolaire dont il est le porte-parole. «Devon est toujours comme ça, a-t-il dit en haussant les épaules. Même quand on fait un sprint de 10 secondes à l'entraînement, il dévie graduellement vers toi. Je n'allais pas le laisser passer derrière Lenny...»

«Une super journée»

Ça leur aura fait un beau sujet de discussion pour le souper puisque Kershaw loge chez Harvey à Saint-Ferréol-les-Neiges pour la durée des championnats.

Harvey a eu son lot de difficultés dans son quart de finale, vague qu'il a jugée la plus éprouvante de sa journée. Il a lui-même eu à composer avec un bâton brisé au départ. Un entraîneur lui a rapidement remis un bâton, mais il a dû le changer un peu plus loin, car la dragonne n'était pas de la bonne main.

Ces deux efforts supplémentaires pour revenir sur le groupe auraient pu le rattraper une fois parvenu en finale, où le calibre se rapprochait d'une vague de Coupe du monde. «Ça prenait une bonne journée pour monter sur le podium et une super journée pour gagner, a conclu Harvey. J'ai eu une super journée.»

Une super journée qui a fait l'affaire de tout le monde.