Le désastre de l'équipe de France de soccer au Mondial sud-africain est en passe de devenir une affaire d'État, Nicolas Sarkozy s'étant à son tour emparé du dossier mercredi pour obtenir des éclaircissements sur cet échec retentissant. Il doit en outre recevoir jeudi Thierry Henry, qui a demandé à le rencontrer.

Au lendemain de la défaite 2-1 des Bleus face à l'Afrique du Sud, synonyme d'élimination sans gloire, le chef de l'État a présidé mercredi après-midi une «réunion de travail» à huis clos, à laquelle participaient le chef du gouvernement François Fillon, la ministre des Sports Roselyne Bachelot et sa secrétaire d'État Rama Yade.

Nicolas Sarkozy a «demandé que des états généraux du football français soient organisés dès le mois d'octobre», selon un communiqué publié par l'Élysée à l'issue de la réunion. Le chef de l'État note que «cet échec est l'occasion d'apporter des réponses structurelles à des questions qui se posent depuis bien longtemps». Il souhaite que lors de ces états généraux, «chacun des acteurs puisse apporter sa contribution en toute transparence à la construction d'un projet de rénovation».

Par ailleurs, le chef de l'État a demandé aux ministres de «veiller à ce qu'aucun avantage financier ne soit versé à l'ensemble de l'équipe de France» de soccer après sa «participation malheureuse» au Mondial. Dès mardi soir, le capitaine des Bleus Patrice Evra avait indiqué que les joueurs ne toucheraient aucune des primes initialement prévues.

En rendant compte du conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Luc Chatel a précisé à la mi-journée que le président de la République avait émis le souhait que «des décisions soient prises calmement, avec recul».

«Vous connaissez trop le goût du président pour le football pour imaginer qu'il soit indifférent à la situation, à ce qui s'est passé», a ajouté le ministre de l'Éducation nationale, partisan d'une «analyse en profondeur» des dysfonctionnements qui ont conduit à cet échec collectif, afin que «des décisions puissent être prises».

Mme Bachelot s'est montrée plus précise devant les députés, indiquant que le gouvernement avait «décidé de prendre toutes ses responsabilités, d'abord en faisant faire une analyse approfondie, un audit externe, car ceux qui ont failli ne peuvent pas piloter cette analyse, ils ne peuvent pas faire leur cuisine sur leur petit feu».

«Ensuite, nous voulons rénover profondément la gouvernance du football», a-t-elle poursuivi, invitant les députés UMP Jean-François Lamour et David Douillet, tous deux ex-champions olympiques, ainsi que l'ancien communiste Patrick Braouzec, qui préside la Fondation du football, à contribuer à ces travaux, «avec le Comité olympique français, avec les instances compétentes et expertes».

La ministre, tout juste rentrée d'Afrique du Sud, a indiqué que l'accent serait mis sur les questions d'éthique financière et sportive.

«Je veux que le respect de la charte de déontologie soit le visa pour participer à toute compétition sportive au nom de la France», a-t-elle souligné, disant ne pas pouvoir pardonner «qu'on ait brisé les reins à des millions d'enfants».

Nicolas Sarkozy pourra évoquer toutes ces questions jeudi avec un grand connaisseur, en la personne de l'attaquant des Bleus Thierry Henry, qui a sollicité et obtenu cet entretien. Selon l'Élysée, c'est en effet l'ex-capitaine de l'équipe de France qui a appelé mardi depuis l'Afrique du Sud le chef de l'État, souhaitant le rencontrer jeudi dès son retour.

Ancien champion du monde et d'Europe, meilleur marqueur de l'histoire des Bleus avec 51 buts, Thierry Henry apportera à Nicolas Sarkozy son éclairage sur la déroute de l'équipe de France et des instances de la Fédération française de football (FFF). Un témoignage précieux venant d'un international qui s'apprêterait à quitter le FC Barcelone pour le club américain des Red Bulls de New York, et qui ne rejouera vraisemblablement plus en sélection.

Le chef de l'État devrait ainsi en savoir plus sur ce que Roselyne Bachelot a qualifié de «désastre», évoquant «une équipe de France où des caïds immatures commandent à des gamins apeurés, un coach désemparé et sans autorité, une Fédération française de football aux abois».

Interrogé sur l'attitude du sélectionneur Raymond Domenech, qui a refusé de serrer la main de l'entraîneur de l'Afrique du Sud Carlos Alberto Parreira mardi après le match, Luc Chatel a tenu à rappeler, en tant que ministre de l'Éducation, que le sport s'appuyait sur «le respect des règles et le respect de l'adversaire».