Tomas Giraldo n’était venu à la cérémonie de la remise des trophées du CF Montréal que pour applaudir ses coéquipiers. Il était le dernier à se douter qu’il repartirait du Centre Nutrilait en lauréat.

« Honnêtement, je suis juste venu pour taper dans les mains ! », lance-t-il devant les médias, quelques minutes après avoir remporté le trophée Jason-Di-Tullio. Il le porte dans ses mains devant les journalistes.

Il s’agissait jeudi de la toute première remise de ce prix, décerné au joueur ayant fait preuve de ce qu’il est convenu la grinta. Di Tullio, un ancien joueur et entraîneur adjoint du club, est décédé en juillet dernier des suites d’un cancer du cerveau ravageur.

« Finalement, je vois qu’ils m’appellent sur scène. Je ne m’y attendais pas. Quand je suis monté, j’ai eu peur un peu. Mais après, le fait de voir la famille, de voir que tout va bien, j’étais vraiment content. Ça me motive à continuer à travailler. »

Parce que travailler, c’est pas mal tout ce que Tomas Giraldo a fait dans les deux dernières années. Le produit de l’académie a commencé par avoir un « problème au pied ». Ça a pris plus de temps que prévu, mais ça a fini par se résorber.

Ensuite sont venus les problèmes musculaires. Puis, cette année, « le problème du pied est revenu par surprise ». Un simple « mauvais pas » à l’entraînement aurait été en cause.

En juillet, on le fait opérer à Green Bay, au Wisconsin, par le DRobert B. Anderson, chirurgien spécialiste des pieds et chevilles et de la médecine sportive.

« En ce moment, je suis vraiment content parce que c’est beaucoup mieux. Je cours sur le terrain. Mes coéquipiers sont toujours là à me motiver. »

Et c’est là que l’histoire de Tomas Giraldo devient particulièrement intéressante. Certains diront même touchante.

C’est que le trophée Jason-Di-Tullio, ce sont les joueurs du CF Montréal qui votent pour déterminer qui le remporte. Ce qui veut donc dire que pendant tout ce temps où Giraldo travaillait dans l’ombre, à l’entraînement, sans jamais même envisager la possibilité de jouer des minutes dans un match, ses coéquipiers ont remarqué son ardeur. Sa volonté. Sa grinta.

Il vient tous les jours. Tu vois l’effort qu’il met. Les longues heures dans le gym. Et tu vois la souffrance mentale lorsqu’il se blesse à nouveau. Il a tellement eu de difficultés. Mais ensuite, tu le vois dans le vestiaire et il a le sourire au visage.

Alistair Johnston, à propos de Tomas Giraldo

« On respecte cela, parce qu’on sait qu’il n’y a rien de pire que de faire partie d’une équipe sans vraiment pouvoir l’aider sur le terrain. […] Il le mérite, et je suis content que le reste de l’équipe l’ait remarqué aussi. »

Surtout qu’il n’est pas le seul à avoir fait preuve de grinta en 2022. Giraldo cite lui-même l’exemple de Samuel Piette et de Mason Toye. Ce dernier a été à l’écart pendant près d’un an.

« Qu’ils aient pensé à moi, juste ça, ça le rend encore plus spécial. »

« Profondément touchée »

La famille de Jason Di Tullio, dont sa mère Giulia Garofano, était présente au Centre Nutrilait.

« Moi, je vais aller où tout le monde me veut ! », lance-t-elle d’un ton somme toute enjoué lors d’une courte entrevue devant quelques représentants des médias.

« C’est ce que Jason aurait voulu. C’était un homme humble. Il avait beaucoup de respect pour la famille, pour le CF Montréal, pour Joey Saputo. Je vais toujours être présente pour lui. Ce sont des moments difficiles, pleins d’émotion, mais je vais le faire pour lui. »

Giulia Garofano était montée sur scène avec d’autres membres de la famille pour la présentation du trophée Jason-Di-Tullio. Un petit montage vidéo montrait des images de l’ancien joueur et entraîneur. On a vu sa mère s’essuyer les yeux à ce moment. Au vu du moment solennel dans l’amphithéâtre, elle ne devait pas être la seule.

C’est un trophée que j’aurais préféré ne pas donner aujourd’hui. Jason aurait dû être parmi nous. C’est aussi ce que j’ai dit à la famille.

Olivier Renard, directeur sportif du CF Montréal

C’est Gabriel Gervais qui a appelé Giulia Garofano pour lui annoncer la création de ce trophée, et pour l’inviter à la cérémonie.

« C’est sûr que c’est émouvant pour eux. C’est une autre étape dans le deuil, si on veut. Mais quand je vois qu’ils sont ici, tous les joueurs vont les voir. […] C’était vraiment spécial. Je suis vraiment content qu’ils aient accepté d’être ici aujourd’hui. »

Lorsque la mère de Jason Di Tullio a reçu l’appel, elle a été « profondément touchée ».

« C’est un beau cadeau qu’ils nous donnent. »

Elle croit dur comme fer que l’aura de son fils nimbe le club qu’il adorait encore aujourd’hui.

« Je sais que Jason est là. La grinta est vraiment là. On le sent. Tous les joueurs ont ça dans la tête. They are gonna win the cup. Ils vont gagner. »