Ils ont été beaux, les Marocains. Ils ont été courageux, dominants. Créatifs, même. Mais la France a joué d’opportunisme, ce qui lui a permis de l’emporter 2-0 dans cette demi-finale de Coupe du monde. Les Français retrouvent donc la finale pour un deuxième Mondial de suite.

Théo Hernandez a ouvert la marque pour la France après seulement cinq minutes. Ce qui a forcé le Maroc à ouvrir son jeu que l’on a vu si étanche défensivement dans ce tournoi. Et c’est lui, par la suite, qui a exercé le plus de pression sur l’adversaire.

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Théo Hernandez

Jusqu’à ce que Kylian Mbappé s’empare du ballon à la 79e, à l’orée de la surface. Avant d’enchaîner les dribles, puis de passer vers Randal Kolo Muani au deuxième poteau. Celui qui venait tout juste d’entrer en jeu n’a eu qu’à pousser le cuir dans le fond du filet pour le 2-0.

« Je ne réalise pas, a lancé Kolo Muani après la rencontre. C’est un truc de malade, on est en train de rêver. Franchement, je ne sais pas ce qui se passe. Je suis très fier de mes coéquipiers. »

Même si on a souffert, on a été très forts défensivement, ça a été notre force. C’était un match très compliqué. On a subi, mais on a pu mettre ce deuxième but.

Randal Kolo Muani

Le sélectionneur du Maroc, Walid Regragui, a lui aussi noté cet aspect du jeu français.

« Nous avons donné le maximum, c’est le plus important, a-t-il indiqué à la télévision marocaine. Les garçons se sont battus jusqu’à la dernière minute. Nous voulions remporter le match, mais nous sommes tombés sur une équipe forte qui sait ce qu’elle fait et qui attend que tu commettes une erreur. Que nous avons commise au début du match. »

Adaptation marocaine

Regragui est devenu le coup de cœur planétaire pendant cette Coupe du monde. La veille de cette demi-finale, il avait fait une sortie remarquée en conférence de presse. On lui demandait banalement quel style de jeu employer contre la France. Il s’était lancé dans une tirade de près de quatre minutes sur les statistiques de possession du ballon – nettement au désavantage du Maroc contre l’Espagne et le Portugal – versus le réalisme défensif que son équipe a adopté dans ses derniers matchs.

« La possession, ça fait rêver tout le monde, avait-il dit, entre autres. Tu as 60, 70 % de possession de balle, mais tu as fait deux tirs dans le match.

« Moi, ce qui m’importe aujourd’hui, c’est gagner. J’ai entendu beaucoup de journalistes européens notamment critiquer notre jeu. Moi, je pense que ça les embête surtout de voir une équipe africaine jouer comme une équipe européenne. »

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Walid Regragui

Il est vrai que Regragui avait à nouveau préparé un schéma défensif, mercredi, avec un bloc de cinq défenseurs, quatre milieux de terrain bas et un seul attaquant de pointe. Mais lorsque la France a ouvert la marque rapidement, le Maroc n’avait plus le choix, et devait s’adapter. Avec 61 % de possession, il est parvenu à pousser son adversaire dans ses derniers retranchements, même si ses 3 tirs cadrés n’ont pas excessivement chauffé la défense française. Sauf pour un joli tir en bicyclette de Jawad El Yamiq qui a heurté le poteau à la 44e, notamment.

À titre d’exemple, le Maroc avait effectué 552 passes au total lors de ses deux premiers matchs éliminatoires. Mercredi, il en a réussi 572.

« On avait dit que s’ils nous laissaient le ballon, on le prendrait, a rappelé Regragui après le match, mercredi. On l’a fait, mais on a fait trop d’erreurs techniques en première période. En deuxième période, on a été plus adroits, on a moins perdu de ballons, on leur a posé des problèmes, on s’est créé beaucoup de situations, mais on n’a pas été décisifs dans les 30 mètres. »

« Je pense qu’on les a fait douter par moments et déjà, pour nous, c’est extraordinaire, a-t-il continué. La marche était un peu trop haute pour nous, pas en matière de qualité ou de tactique, mais plus physiquement. On avait trop de joueurs blessés. »

La France, efficace

En face, les Bleus ont démontré un réel professionnalisme, comme ils l’avaient fait contre les Anglais.

À l’aise sans le ballon. Rapides en contre. Kylian « Bip Bip » Mbappé qui n’a que faire de ses coyotes marocains, dévalant la pelouse à toute vitesse. Olivier Giroud qui frappe le poteau avec un tir puissant. Hugo Lloris qui sort ses belles parades aux bons moments. Et deux buts opportuns. De l’efficace boulot.

Surtout en tenant compte du fait que le but accordé par le Maroc à la 5minute était son premier par un adversaire dans toute cette Coupe du monde. Le Canada avait été le seul à y parvenir, mais c’était un contre son camp des Marocains. À noter que pour cette demi-finale, deux piliers de la défense marocaine ont été écartés : Nayef Aguerd a participé à l’échauffement, mais n’a pu prendre part au match. Le capitaine Romain Saïss a joué 21 minutes avant d’être remplacé, touché à une cuisse.

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Kylian Mbappé

Mbappé, Messi, Giroud, Álvarez : cette finale entre la France et l’Argentine, dimanche, promet.

« Une équipe où il y a Leo dedans, c’est différent, a estimé Antoine Griezmann. On sait comment ils jouent, c’est une équipe très difficile, en pleine forme. Il y a Leo, mais il y a aussi une équipe derrière, un groupe qui vit très bien, et en plus ils ont leurs supporters avec eux. »

Le parcours inspirant et historique du Maroc se terminera officiellement ce samedi, dans le match pour la troisième place contre la Croatie.

Il a peut-être perdu, mercredi. Mais sa plus grande victoire, il l’avait déjà acquise : la décomplexion du soccer marocain – et africain.

« Le plus important, c’est d’avoir donné une bonne image, a souligné Regragui. D’avoir montré au monde que le football marocain existait, qu’on avait des beaux supporters. Pour atteindre le très, très haut niveau, aller gagner une Coupe du monde, il faudra encore travailler, mais on n’est pas très loin. »

Avec l’Agence France-Presse