(Barcelone) À 33 ans, Jenni Hermoso a vu sa longue carrière couronnée d’une Coupe du monde. Mais ce titre a été vite éclipsé par le scandale du baiser forcé de Luis Rubiales, le président de la Fédération espagnole, qui a fait de la numéro 10 un symbole de la lutte contre le sexisme.

Ce baiser durant la remise des médailles à Sydney a provoqué une vague d’indignation internationale et la suspension provisoire par la FIFA du patron du foot espagnol, qui refuse toutefois de démissionner malgré les pressions.

Assurant en souriant, immédiatement après les faits, que cela ne lui avait « pas plu », la joueuse a adopté un ton beaucoup plus offensif après les déclarations de Rubiales affirmant que ce baiser était « consenti ».

« Je me suis sentie vulnérable et victime d’une agression, d’un acte impulsif et sexiste, déplacé et sans aucun consentement de ma part », a martelé la Madrilène vendredi.

Surnommée « le #metoo du foot espagnol », cette affaire a plongé la Roja et la fédération dans le chaos, Hermoso et 81 autres joueuses refusant de continuer à jouer sous la direction actuelle.

Un style façonné dans les parcs

En dépit de cette affaire, le Mondial représente le Graal pour Hermoso.

Petite-fille de l’ancien gardien de l’Atlético Madrid, Antonio Hernandez, elle a commencé dans les équipes de jeunes des « Colchoneros » après avoir souvent joué avec les garçons dans les parcs, ce qui a façonné son style, selon elle.

Admirant les performances de Fernando Redondo ou de Zinédine Zidane, alors au Real Madrid, lorsqu’elle était jeune, Hermoso reconnaît qu’elle n’avait pas vraiment d’idole jusqu’à ce qu’elle rejoigne l’Atléti et rencontre Ana Fernandez, surnommée « Nervy », qui jouait dans l’équipe madrilène.

Sans budget pour payer des recruteurs dédiés aux talents féminins, les joueuses de l’équipe sénior jouaient alors ce rôle et Nervy choisit Hermoso et une autre jeune pour intégrer l’Atlético parmi 50 joueuses présentes aux sélections.

« Elle est gauchère comme moi, elle jouait à la même position et j’aimais comment elle était, elle avait beaucoup de charisme », a confié Hermoso au quotidien El Pais en 2020.

Formée à l’Atlético, la milieu de terrain a été transférée en 2010 dans un autre club madrilène, le Rayo Vallecano, où elle a gagné le championnat d’Espagne, avant un bref détour par la Suède et le club de Tyreso, où elle a joué aux côtés de la légende brésilienne du foot féminin, Marta.

« DJ du vestiaire »

Hermoso, que ses coéquipières décrivent comme la DJ du vestiaire, a ensuite poursuivi sa carrière au FC Barcelone, où elle a joué de 2013 à 2017 et de 2019 à 2022. Un club phare du foot féminin dont elle est toujours la meilleure buteuse avec 181 buts en 224 matchs et avec qui elle a remporté la Ligue des champions en 2021.

Elle a également évolué au Paris Saint-Germain, en 2017-18, et joue depuis l’an dernier dans le club mexicain de Pachuca. Un transfert qui, selon ses détracteurs, l’éloignait du plus haut niveau.

« J’étais retraitée et j’ai gagné la Coupe du monde », a ironisé, après son sacre mondial, la meilleure buteuse de la Roja (51 buts), qui a raté un penalty en finale contre l’Angleterre.  

Privée d’Euro en 2022 à cause d’une blessure à un genou, Hermoso, qui ne faisait pas partie des 15 « rebelles » ayant claqué la porte de la sélection en raison de leurs divergences avec le sélectionneur Jorge Vilda, voyait dans ce Mondial la chance de sa vie.

« Les occasions se présentent parfois seulement une fois », a confié à Fox Mexico la joueuse qui a mis du temps à trouver son idole, mais pourrait bien être celle de la prochaine génération de jeunes joueuses.