« J’aime bien les situations d’échec. Pour moi, c’est comment tu te relèves, et comment tu en sors. »

À Montréal, Laurent Courtois souhaite que ses joueurs « aient la confiance de faire des erreurs ». En tant qu’entraîneur-chef recrue, Courtois va lui-même en faire, explique-t-il.

« C’est par là qu’on arrive à se développer les uns les autres, à progresser. On s’en fiche de ce que t’as fait avant, on s’en fiche de tes qualités, de ce que tu as bien ou mal fait l’année dernière. Qu’est-ce que tu apportes aujourd’hui ? »

Ce n’est pas pour rien que les questions posées au nouvel entraîneur-chef du CF Montréal ont beaucoup porté sur sa philosophie de développement de joueurs et de style de jeu, mardi matin, au Centre Nutrilait. C’est que ces principes sont au cœur du mandat que lui confie la direction sportive du club.

Ces principes, c’est aussi là où a partiellement échoué son prédécesseur, Hernán Losada.

« Laurent vient avec son propre style, sa propre philosophie qui concorde avec la nôtre, a souligné le président Gabriel Gervais, assis à ses côtés. C’est maintenant à lui de s’habituer et de travailler avec les joueurs qu’on a en place. »

Et ça, ce n’est pas un problème pour Courtois. Quelle évaluation fait-il de l’effectif actuel ?

« Il y a une qualité intrinsèque indéniable, que ce soient les joueurs confirmés ou qui débutent, dit-il. Les gars l’ont déjà fait voir. […] On aime tous le jeu élaboré, mais il y a quelque chose sur lequel je suis intransigeant : c’est le cœur, l’énergie, la combativité, la gagne, tu l’appelles comme tu veux. »

Au CF Montréal, on appelle ça la Grinta. C’est ce qu’a rappelé Gervais quelques minutes plus tard.

« C’est de démontrer le cœur en tout temps, que ce soit dans les entraînements, dans les matchs à domicile, à l’étranger, indique le président. […] Cette envie de toujours vouloir saigner et mouiller le maillot est extrêmement importante pour nous. »

En ce sens, le mariage entre le CFM et Courtois semble s’entamer sur de bonnes bases.

« Ce que je veux, c’est que les fans qui nous observent voient qu’on a un but commun et qu’on essaie de tout arracher. »

Déjà des idées claires

Même s’il sait que cet objectif ne va pas se réaliser « du jour au lendemain », Gabriel Gervais souhaite retrouver « un style de jeu qui est clair et propre » au CF Montréal.

Et Laurent Courtois ne s’est pas fait avare de commentaires à propos de ce qu’il veut implanter. On vous laisse à ses bons soins pour quelques instants.

PHOTO RYAN REMIORZ, LA PRESSE CANADIENNE

Laurent Courtois

« Je veux que les joueurs soient toujours obnubilés par l’intention de jouer vers l’avant, et en prenant le temps. C’est cette balance qu’on va essayer de trouver ensemble. De toujours être obsédés de jouer vers l’avant, être le plus dangereux possible, sans non plus forcer et s’exposer à une perte de balle. La création de chances. Regagner le ballon pour faire mal. Je n’aime pas qu’on défende pour défendre. Je veux que la façon de défendre soit assez dominatrice.

« Il y a un autre élément qui me paraît super important : c’est comment l’effectif en entier, dans sa globalité, se sent responsable. Je veux que tout le monde ait l’impression d’avoir une chance. Pour moi, c’est ce qui fait le succès d’un effectif. […] Ces aspects-là, pour moi, ils sont primordiaux. Mais il faut des codes. Des règles. Une condition physique. Il faut de la générosité. Il faut du caractère, parce que le gardien va devoir faire des choses très ambitieuses. Et il faut être prêt à répondre. C’est pour ça que l’entraînement est vital. C’est pour ça qu’il ne faut pas avoir peur de faire des erreurs. Ça va être bénéfique pour tout le monde. »

Pour Courtois, l’objectif d’instaurer un beau style de jeu et celui de participer aux séries ne vont pas l’un sans l’autre.

« Je ne vois pas comment j’arriverais à faire les séries sans un style de jeu [clair]. Et je ne vois pas comment j’arriverais à faire un style de jeu qui a du succès si je ne fais pas les séries. »

« L’homme » en premier

Le mandat de développer les jeunes joueurs du club a été l’un des critères les plus importants ayant mené à l’embauche du Français. Ses qualités en la matière en ont fait « le premier choix » de la direction du club, au fil du long et rigoureux processus d’entrevues qu’elle a mené.

Selon Courtois, s’il est parvenu à connaître du succès à ce chapitre avec l’équipe de réserve du Crew de Columbus, c’est grâce à son précédent parcours de joueur. Ce Lyonnais né en 1978 a évolué en France, en Espagne et en Angleterre avant de rejoindre la MLS en 2011.

« En toute humilité, j’ai eu la chance d’être talentueux plus jeune, explique-t-il. Je ne me suis jamais senti coaché, mais plutôt utilisé. Quand j’ai pris ce cursus d’entraîneur, je me suis dit que je voulais aider les gamins de mon âge. Avec leurs défaillances ou leurs aptitudes, je n’ai pas trouvé qu’on les aidait suffisamment. C’est comme ça que j’ai appris mon métier d’entraîneur. Après, j’ai été dans des environnements pas toujours couronnés de succès, donc ça m’a appris à relativiser et connaître différents aspects du processus de formation du joueur. »

« En ordre » d’importance, pour lui, « c’est l’homme, le joueur, et après l’équipe ».

« Tu appliques ça à toutes les positions, et on avance. »

Pas de MLS Next Pro, pas de problème ?

Si Laurent Courtois a un poste d’entraîneur-chef aujourd’hui en MLS, c’est en grande partie grâce au succès qu’il a connu en MLS Next Pro, essentiellement la troisième division américaine. En irréductible Gaulois, le CF Montréal est en voie de devenir le seul club du circuit Garber à ne pas avoir d’équipe en Next Pro, faisant plutôt jouer son équipe de réserve en Ligue1 Québec ou en envoyant ses plus beaux espoirs en prêt. Courtois n’y voit pas nécessairement de problème. « La question est de savoir comment tu réduis l’écart entre le soccer junior et l’équipe première, dit-il. À partir du moment où tu me dis que la réserve joue dans une ligue compétitive contre des joueurs plus physiquement matures, tu places tes joueurs dans une situation où ils peuvent se développer différemment. [Ensuite], c’est notre travail d’identifier et développer nos meilleurs espoirs. »