(Saint-Côme) Entre un ami qui a évité le pire dans un accident spectaculaire et un tableau grand ouvert, Mikaël Kingsbury a su naviguer et frayer son chemin jusqu’à la plus haute marche du podium, samedi, à la Coupe du monde de ski acrobatique de Val Saint-Côme. Néanmoins, rien n’a été simple pour le grand champion.

Juste avant de s’élancer à côté du fringant Filip Gravenfors en finale de l’épreuve en parallèle, Kingsbury a eu toute une frousse.

En petite finale, deux de ses meilleurs amis bataillaient pour la médaille de bronze. Matt Graham et Benjamin Cavet étaient au coude-à-coude à l’entrée du premier saut. Toutefois, quelque peu désaxé, Cavet a chuté et a glissé dans le couloir de son rival. Seul hic, Graham n’avait pas encore atterri. L’Australien a terminé son saut sur le corps flottant de Cavet et ses skis sont arrivés sur sa poitrine, à quelques centimètres de son visage.

Cavet a mis du temps à se relever. Il a tranquillement remonté la piste pour aller chercher l’un de ses skis et redescendre fragilement sous les applaudissements d’une foule muette depuis au moins deux minutes, happée par l’impressionnant incident.

« Je vous ai donné de belles images », a lancé Cavet à un caméraman de Radio-Canada au bas de la piste. Finalement, il s’en est sorti indemne. Mais le réveil aura sans doute été douloureux à l’hôtel ce dimanche matin.

De justesse

Reste que cet accident a secoué Kingsbury avant sa descente. Un stress dont il aurait bien aimé se passer compte tenu de sa déconfiture de la veille. « C’est épeurant. C’est dangereux parce que nos skis sont aiguisés presque comme des patins. C’est la période de la journée où j’ai été le plus stressé, a-t-il avoué plus tard en soirée. Ça fait peur parce que ce sont ces moments-là les plus dangereux. C’est épeurant, mais il faut que tu te concentres vite sur tes affaires. »

Ce qu’il a fait. Après avoir été secoué en demi-finale lorsque son bâton a piqué dans une bosse, le Québécois était déterminé à accrocher un sourire sur le visage des amateurs présents, malgré une autre soirée glaciale pendant laquelle même les plus résistants ont fini par se dandiner sur place.

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

Mikaël Kingsbury lors des tours préliminaires

Sa descente contre le jeune Suédois de 19 ans était digne d’une finale olympique. A priori, la descente de Gravenfors avait l’air plus solide, plus convaincante. En plus, il avait franchi la ligne d’arrivée 0,65 seconde avant le favori local.

Mais si la décision semblait claire, les juges ont mis plus d’une minute et demie à rendre leur verdict. Ils ont finalement accordé le bénéfice du doute à Kingsbury, par trois points, lui offrant ainsi une cinquième victoire cette saison.

Même le gagnant n’avait pas l’air totalement convaincu du résultat lors de sa projection sur le nouvel écran géant dont s’est dotée la station.

« Je n’ai pas vu la vidéo, mais quand je suis arrivé en bas, je l’ai vu faire une erreur », a commenté Kingsbury une demi-heure après le dévoilement des résultats.

Mais ne cherchez pas de controverse ou de parti pris local. Cette victoire était sans équivoque, selon Gravenfors : « J’ai eu une bonne course. J’avais un plus haut degré de difficulté, mais mon atterrissage était très mauvais. Je me croisais les doigts. Mais c’est Mik. Ce gars est très bon ! […] Mikaël mérite cette victoire. »

Un tableau ouvert

Avec l’abandon en début de journée de Walter Wallberg, le gagnant de la veille, et l’éviction d’Ikuma Horishima en seizième de finale, Kingsbury avait devant lui un tableau grand ouvert, comme on dirait au tennis.

« À l’intérieur, tu essayes de ne pas avoir d’émotion, parce que c’est là que tu peux te faire piéger. C’est le fun, se rendre en finale contre Ikuma, parce que pour moi, c’est la finale du ski de bosses. Et Walter aussi. Mais on se bat pour des maillots jaunes. C’est sûr qu’il était content quand je me suis planté [vendredi]. »

Reste que Kingsbury avait fort à faire en finale contre le meilleur bosseur toujours en piste.

Je suis resté calme en haut du parcours. J’avais les infos de mes coachs, on dirait qu’on était plus prêts [que vendredi].

Mikaël Kingsbury

Les Québécois Elliot Vaillancourt, Julien Viel et Louis-David Chalifoux ont tous été éliminés en huitième de finale.

Anthony a encore raison de Schwinghammer

Lors de sa première finale sur le circuit de la Coupe du monde, en Géorgie en décembre, Maïa Schwinghammer avait baissé pavillon devant Jakara Anthony, la meilleure skieuse au monde.

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

L’Australienne Jakara Anthony, au centre, célèbre l’or avec la médaillée d’argent, l’Américaine Jaelin Kauf, à gauche, et la médaillée de bronze Olivia Giaccio, elle aussi américaine.

Les deux athlètes s’étaient encore donné rendez-vous, cette fois en quart de finale. Schwinghammer exerçait énormément de pression sur sa rivale. « Je savais ce que j’avais à faire et j’ai poussé à fond. À un moment, je me suis dit que ça allait très vite. »

Jusqu’à ce que son bâton droit s’enfonce dans une bosse. « J’ai été un peu trop par l’arrière et mes bâtons se sont accrochés. J’ai vraiment poussé. Je suis fière de mon ski et je pense que ça ouvre la porte sur une tonne de possibilités », a-t-elle évoqué au terme de sa fin de semaine.

L’athlète de Saskatoon a tout de même réussi à se remettre dans le parcours pour ultimement terminer au huitième rang, le meilleur résultat chez les Canadiennes.

Anthony, quant à elle, a profité de son abonnement au podium pour monter sur la plus haute marche deux vagues plus tard. Il s’agit de sa huitième victoire en neuf courses.