À l’instar de son coéquipier Laurent Dubreuil, Valérie Maltais, qui vient de connaître sa compétition la plus fructueuse à vie, souhaite simplement faire de son mieux à la Coupe du monde de patinage de vitesse de Québec, de vendredi à dimanche

(Québec) À bon droit, Laurent Dubreuil capte la majorité de l’attention médiatique en amont de la Coupe du monde de patinage de vitesse qui sera présentée cette semaine au Centre de glaces Intact Assurance, à Québec.

En action dès vendredi au 1000 m, épreuve dont il est médaillé d’argent olympique, le héros local pourra briller non pas une, mais deux fois sur 500 m, sa véritable spécialité, à l’horaire samedi et dimanche.

Plutôt que de promettre un podium, l’athlète de Lévis a simplement assuré qu’il ferait de son mieux à cette première Coupe du monde organisée à Québec depuis 1992… quelques mois avant sa naissance. Son père, Robert Dubreuil, y avait disputé sa toute dernière course en longue piste, un 1500 m aux grands vents où il s’était classé 32e, lui qui excellait surtout en sprint, comme son fils.

PHOTO RICK BOWMER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Laurent Dubreuil

Robert Dubreuil avait seulement 24 ans à l’époque. « [Ma femme] Ariane avait pris sa retraite deux ans avant, le bébé s’en venait, mon dos devenait fragile, j’avais fait huit ans avec l’équipe nationale », a énuméré celui qui est aujourd’hui directeur général de la Fédération de patinage de vitesse du Québec et du comité organisateur de la Coupe du monde.

« En 1988, Gaétan [Boucher] avait 29 ans et il avait l’air d’un grand-père comparativement aux autres. Dans ce temps-là, il n’y en avait pas de patineurs de 30 ans. Aujourd’hui, au Canada, à l’exception de Connor Howe, qui a 23 ans, nos meilleurs sont dans la trentaine. Le sport a changé et ils sont mieux soutenus qu’on l’était. Tu peux vivre de ta passion comme un athlète professionnel, même si on est évidemment loin de ces salaires. Les meilleurs au monde s’en tirent quand même bien. »

« Un peu surprise »

À 31 ans, Laurent Dubreuil, père de deux jeunes enfants, peut donc projeter de disputer ses troisièmes Jeux olympiques en 2026, à Milan-Cortina, tout comme sa coéquipière Valérie Maltais, qui en serait à ses cinquièmes – les trois premiers étaient en courte piste.

Après plus d’un quart de siècle à s’entraîner sur deux lames, la patineuse de 33 ans vient de connaître, « de loin », sa meilleure Coupe du monde, la semaine dernière à Salt Lake City, avec l’or en poursuite par équipe, le bronze au 3000 m et au départ de groupe et un meilleur chrono personnel au 1500 m (10e). Elle a réussi ce tir presque parfait sans avoir relâché la pédale à l’entraînement dans la semaine précédente, avec l’objectif d’atteindre son sommet aux Championnats du monde par distance de Calgary, du 15 au 18 février.

« C’est dur de demander mieux sur le plan des résultats, mais aussi de la façon dont je me suis sentie physiquement », a précisé Maltais, qui profitait d’un congé à la maison mercredi. « Ça m’a un peu surprise. »

En l’absence de poursuite à Québec, l’athlète originaire du Saguenay pourra se concentrer sur trois courses à cette sixième et dernière étape du circuit : le 3000 m vendredi, ainsi que le 1500 m et le départ de groupe, dimanche. Nul besoin de lui rappeler qu’elle pointe au troisième rang du cumulatif des épreuves de distance (3000/5000 m) et à la toute première place du départ de groupe, trois petits points devant sa coéquipière Ivanie Blondin, une autre trentenaire, qui a gagné l’or en Utah.

C’est la première fois que je me trouve aussi haute au classement. Mais je dois simplement me ramener au fait que si je continue d’exécuter mon plan comme je l’ai fait tout au long de la saison, je serai de plus en plus rapide. Quand je repense à ça, ça me calme instantanément.

Valérie Maltais

Au 3000 m, si la première place semble destinée à la jeune Norvégienne Ragne Wiklund, la Québécoise peut espérer chauffer l’increvable Tchèque Martina Sablikova, 36 ans, qui la devance de 19 points au deuxième rang. Elle se réjouit du retour en force de son amie Isabelle Weidemann, triple médaillée olympique, et de l’Italienne Francesca Lollobrigida, médaillée d’argent à Pékin, ce qui va densifier le plateau.

Complicité

Au départ de groupe, où elle renouera avec le bonnet de meneuse, la Canadienne calcule qu’une victoire sera pratiquement nécessaire pour conserver la tête, tant la lutte est chaude avec sa coéquipière Blondin.

« Je suis quand même très consciente que je n’ai pas gagné une course cette année en mass start et que c’est la constance qui me place dans cette position », a souligné Maltais, qui est montée sur le podium quatre fois sur cinq. Elle a également rappelé que la disqualification de plus de la moitié du peloton en Norvège l’a beaucoup favorisée, au détriment de Blondin, entre autres.

Après une période de tension la saison dernière, les deux compatriotes ont développé une belle complicité cette saison, avant laquelle une stratégie collective a été clairement établie.

« Maintenant, on travaille ensemble. Le plus souvent, on couvre les Hollandaises, dans le but d’avoir plus de rouge que d’orange sur le podium. »

PHOTO CHRISTOPHER CREVELING, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Ivanie Blondin

Si Maltais a « eu plus de fun que jamais » au départ de groupe, elle priorise le 3000 m et la poursuite par équipe, dont elle est championne olympique, en prévision des Mondiaux de Calgary. En Alberta, elle veut également prendre part au 1500 m, une distance pour laquelle elle doit encore se qualifier et qu’elle apprivoise cet hiver.

À moins de 48 heures du début de la compétition, la pression ne l’énervait pas. « On sent la fébrilité dans la ville, dans ma famille, parmi les gens qui viendront me voir. C’est juste de l’énergie positive. Avec mon expérience, je sais que je peux faire confiance à mon plan quand je vais retourner dans ma bulle. D’ailleurs, j’ai bien aimé la façon dont Laurent a dit : ‟Je ne peux pas garantir une médaille, mais je vais faire la meilleure performance possible.” J’aime bien simplifier mon patinage comme ça ! »

Avec ces deux têtes d’affiche, la première Coupe du monde à Québec pouvait difficilement rêver mieux.

La famille Dubreuil s’agrandit…

Sachant les tâches qui lui incombaient à deux jours du début des courses, je n’ai osé poser que deux ou trois questions à Robert Dubreuil quand je l’ai joint mercredi soir pour une précision. Douze minutes plus tard, ses collègues du comité organisateur faisaient les gros yeux à ce formidable raconteur, qui a été le grand architecte de la construction d’un anneau couvert de patinage de vitesse à Québec… Sa femme, la patineuse olympique Ariane Loignon, est responsable au comité des services clients et du programme scolaire qui permettra la visite de 850 élèves, vendredi, au Centre de glaces. Par ailleurs, Laurent a dû faire un retour à sa maison d’enfance de Saint-Étienne-de-Lauzon pour éviter une épidémie de gastro qui a frappé chez lui. Pour pimenter cette semaine unique pour les Dubreuil, la famille s’est agrandie : Béatrice, fille d’Anna-Belle Dubreuil, la petite sœur de Laurent, et d’Antoine Roy, un ex-patineur de vitesse sur courte piste, est venue au monde avec quelques jours d’avance, mercredi…