Sous l’œil amusé de son conseiller Stéphan Larouche, qui tenait le chrono, Kim Clavel signait des dizaines de casquettes floquées de son nom, une promotion d’un nouveau commanditaire, Jean Bleu.

En vue de son combat d’unification de deux ceintures de championne mondiale, jeudi soir à la Place Bell de Laval, le détaillant québécois de jeans s’est associé à la boxeuse de 32 ans. Mains enrubannées, haut blanc et pantalon de denim bleu foncé, elle pose sur de grands panneaux publicitaires déployés en bordure des grands axes routiers de la région de Montréal (45) et de Québec (15).

En marge du duel de Marie-Ève Dicaire en Angleterre, il y a deux semaines, Yvon Michel affirmait que Clavel fait maintenant figure d’athlète de la boxe la plus populaire au Québec, tous sexes confondus.

Son style explosif, sa personnalité avenante et son nouveau statut de monarque mondial depuis sa victoire contre la Mexicaine Yesenia Gómez, l’été dernier au Casino de Montréal, ont accentué son attrait auprès des amateurs du noble art.

Kim a fait des combats parmi les plus beaux qu’on a vus au Québec, peu importe le genre.

Yvon Michel

En 2020, au début de la pandémie, elle a rangé ses gants pour remettre sa blouse d’infirmière auxiliaire et aider dans les hôpitaux. Ce geste, tout naturel pour elle, a accru sa renommée jusqu’aux États-Unis, où elle a reçu le prestigieux prix Pat Tillman Award for Service, dans le cadre du gala des ESPY diffusé sur ABC.

Passée professionnelle en 2017, elle a également gagné un autre public après sa participation remarquée à l’émission de téléréalité Big Brother Célébrités, où elle s’est faufilée parmi les trois finalistes à l’hiver 2021.

Le vainqueur, l’humoriste Jean-Thomas Jobin, avec qui elle s’est liée d’amitié, l’a qualifiée de « personne la plus drôle » qu’il connaisse. Elle est maintenant une invitée populaire dans les balados, défile comme mannequin pour les bonnes causes (Le Chaînon) et son nombre d’abonnés sur sa page Instagram a bondi à plus de 50 000.

À l’image de Lucian Bute

Au moment de notre visite au complexe sportif Claude-Robillard, son lieu d’entraînement, elle venait justement de recevoir un message privé d’un nouveau partisan. Celui-ci écrivait que depuis quelques mois, la boxeuse lui faisait revivre des émotions que Lucian Bute lui procurait à l’époque où il était champion mondial.

« Je me fais reconnaître de plus en plus et je vis bien avec ça, a raconté Clavel en entrevue jeudi. Les gens sont fins et bienveillants. Je trouve ça beau. Parce qu’en 2022, dans les réseaux sociaux et derrière leurs écrans, les gens sont parfois rough avec les athlètes en général. Même entre eux. Je lis des affaires et je me dis : “Mon Dieu, ils sont bien méchants les uns envers les autres !” »

Heureusement, elle n’a pas droit à un tel traitement. Cet appui du public est important tant pour son bien-être personnel que pour la suite de sa carrière.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Kim Clavel à l'entraînement

J’ai besoin d’eux pour me propulser vers le haut. Plus je me fais reconnaître, plus les gens viennent vers moi, plus c’est positif. Je me dis que je dois dégager quelque chose de bien. Ça me fait plaisir. J’aime prendre des photos avec le monde. J’aime jaser avec le monde. J’aime le monde.

Kim Clavel

Elle devait être servie samedi midi dans le cadre d’un entraînement public prévu au Carrefour Laval. L’évènement a cependant été déplacé vendredi en raison des nombreux virus qui courent. Les boxeuses se retrouveront donc au gym de BoxeMontréal.com à Claude-Robillard pour un exercice réservé aux médias.

La protégée de l’entraîneuse Danielle Bouchard devrait croiser pour la première fois sa future adversaire, la Mexicaine Yesica Nery Plata, détentrice de la ceinture WBA chez les 108 lb.

Après son face-à-face avec Gómez, qui avait tenté de la provoquer lors de la pesée, à quoi Clavel s’attend-elle de Nery Plata ?

« J’ai l’impression qu’elle va être plus discrète. C’est une vraie fille de boxe, entraînée par son père. Elle est là pour le sport, elle vient faire sa job. J’ai déjà vu de ses pesées et c’est une fille sûre d’elle, la tête haute, mais pas dans le but d’intimider. »

La Mexicaine de 28 ans s’est forgé une fiche de 28-2 (3 K.-O.) au cours d’une carrière professionnelle de plus de 10 ans qui s’est presque entièrement déroulée au Mexique.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM YESS_NERY_PLATA

Yesica Nery Plata

Sur le plan sportif, Clavel anticipe une rivale moins hargneuse que Gómez, qui fonçait et multipliait les coups. « Je pense qu’elle sera plus intelligente dans le ring, plus stratégique. Elle va lancer moins de grosses combinaisons de partout, mais elle sera plus précise. Ce sera une game très différente. »

Direction Place Bell

Maintenant, Kim Clavel réussira-t-elle à attirer un large public pour sa première finale disputée dans un vaste amphithéâtre comme la Place Bell, où elle a fait ses débuts pros en 2017 ?

Dans une configuration pouvant accueillir un peu plus de 5000 personnes, Yvon Michel espère en recevoir 4000 pour ce gala présenté exceptionnellement un jeudi soir, une expérience pour le Groupe GYM. De l’aveu même du promoteur, la vente de billets est un défi en cette période austère où la boxe se cherche un peu.

La vedette de la soirée, invaincue en 16 combats (3 K.-O.), sent-elle une pression additionnelle ?

« Non, a tranché Clavel. Mon travail, c’est de m’entraîner, boxer, livrer la marchandise. Je m’implique quand même beaucoup dans la promotion, mais je ne peux pas faire de miracles ou obliger le monde à acheter des billets. […] Je sais que le dollar/loisir est plus dur à aller chercher. C’est la même chose pour les spectacles. La vie coûte tellement cher. Le monde va-t-il mettre 100 piastres pour aller voir un gala de boxe ? Peut-être que oui, peut-être que non. Rendue là, ma job reste la même, qu’il y ait 2000 ou 5000 personnes dans la place. »

Après presque 12 semaines d’entraînement, dont deux en République dominicaine le mois dernier, Clavel trépigne à l’idée d’entendre la cloche sonner.

« Je suis au sommet de ma forme. J’ai juste hâte d’être dans le ring, de montrer tout le travail que j’ai fait et d’aller chercher cette ceinture-là. »

Auquel cas elle aura beaucoup d’autres casquettes sur lesquelles apposer sa signature.

Deux autres combats féminins

La carte de jeudi soir à la Place Bell comprend également des combats de Marie-Pier Houle (7-0-1, 1 K.-O.), une élève de Sébastien Gauthier, et de la recrue Caroline Veyre, une autre protégée de Danielle Bouchard qui en sera à son deuxième affrontement professionnel après avoir représenté le Canada aux Jeux olympiques de Tokyo (5e). Le jeune gaucher Derek Pomerleau (3-0, 2 K.-O.), de qui Stéphan Larouche dit beaucoup de bien, s’alignera dans un premier duel prévu pour six rounds.