« On dirait qu’on a un peu la pression de faire briller la boxe féminine, mais c’est beau. C’est un combat que j’ai envie de livrer », a lancé Kim Clavel, mardi matin, lors de son entraînement médiatique.

Clavel sera samedi la tête d’affiche du gala La Reconquête, qui la verra tenter de ravir deux ceintures de championne du monde à l’Argentine Evelin Nazarena Bermúdez. Avant qu’elle ne monte sur le ring en fin de soirée, cinq autres duels auront lieu, dont deux féminins. Pour la deuxième fois en 2023, Marie-Pier Houle et Caroline Veyre se retrouveront dans la sous-carte.

De ce gala, un fait se détache : la boxe professionnelle féminine a atteint une autre étape, au Québec comme ailleurs.

« Marie-Eve [Dicaire] est arrivée à peu près toute seule, rappelle le promoteur Yvon Michel à La Presse. C’était quelque chose de spécial, quand elle était à un évènement. Même qu’elle était un peu considérée comme si elle prenait la place de gars. Elle a été obligée de s’imposer.

« Pour les autres, ça n’a pas été difficile, continue-t-il. Elles ont progressé dans leur carrière. On est tout simplement au diapason de ce qui se fait au niveau international. Il y a de plus en plus de grandes vedettes, d’évènements chez les filles. »

Le développement de la boxe féminine à travers le monde permet aux athlètes d’espérer de grands combats.

Les femmes maintenant, ce ne sont pas seulement de bons combats, il y a des vedettes, des stars. […] On pense à des combats qui nous font briller, qui nous font rêver. Avant, ce n’était pas le cas.

Kim Clavel

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Kim Clavel

Houle et Veyre n’en sont pas au même point que Clavel dans leur carrière, malgré leur grosse année. La première a offert une bonne performance en championnat du monde au pays de Galles, dans la défaite. Et Veyre pourrait, plus tôt que tard, être l’aspirante obligatoire aux titres d’Amanda Serrano, affirme Yvon Michel.

« Ce sont de superbes athlètes qui rêvent de devenir des championnes du monde et qui donnent tout ce qu’elles ont chaque fois », lâche le promoteur au sujet de ses trois boxeuses.

Toutes trois sont au cœur d’un virage, un tournant dans l’univers de la boxe qui s’est amorcé il y a une dizaine d’années.

« Je pense qu’on est vraiment au début de quelque chose de gros, affirme Houle. Savoir qu’on fait partie des premières qui sont là, qui performent, qui attirent des foules même si c’est quand même difficile d’attirer des foules présentement avec l’inflation, qu’il y a vraiment un intérêt pour la boxe féminine de la part des gens, qu’on peut inspirer des gens, autant des filles que des gars, c’est super le fun et ça me touche beaucoup. »

S’encourager

Clavel, Veyre et Houle se connaissent bien. Elles se côtoient au quotidien, surtout les deux premières, entraînées par Danielle Bouchard. Entre les trois boxeuses, il semble régner une belle dynamique.

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Kim Clavel, Caroline Veyre et Marie-Pier Houle

« Caro et moi, on se voit tous les jours, on se côtoie, dit Clavel. […] Marie-Pier, au moins une fois par semaine, on s’encourage. On se demande comment va notre préparation. »

Ce soutien n’est pas réservé qu’aux collègues liées à un même promoteur. « Même Leïla [Beaudoin]… Ce n’est pas parce qu’elles n’ont pas le même promoteur qu’on ne se parle pas, dit Clavel. Je trouve qu’il y a un beau soutien entre les filles. On s’encourage, c’est le fun. »

L’évolution continue

Si l’évolution de la boxe féminine est remarquable, elle n’est pas terminée. Selon Yvon Michel, des réseaux de télévision et des commanditaires devraient bientôt investir « spécifiquement » dans la boxe féminine, « un peu comme ça s’est fait au tennis dans les années après Billie Jean King », dit-il.

« Très bientôt, il va y avoir une progression. C’est en train de se faire. J’entends parler des amis promoteurs, ou des amis qui sont impliqués. Ça ne sera pas très long. »

Il est d’ailleurs de plus en plus dispendieux pour le promoteur de présenter des combats féminins dans les galas. « Les filles connaissent davantage leur valeur maintenant. […] Pour le même nombre de rounds, ça me coûte plus cher maintenant de faire venir des filles que des gars », note-t-il.

En matière de promotion, Michel mentionne la facilité de commercialiser les boxeuses, comparativement aux boxeurs. « Les filles vont chercher des commanditaires, elles en ont toutes. Ce n’est pas juste ici, c’est aussi à l’international. Il n’y a pas beaucoup d’hommes qui en ont. Les gens s’identifient de plus en plus. »

Persévérer

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Caroline Veyre

Caroline Veyre tient à apporter sa contribution dans le développement de la boxe féminine au Québec. Le 30 septembre, elle s’est rendue en Beauce afin d’assister à un gala de boxe 100 % féminin. « C’était important pour moi d’y aller. J’avais participé moi-même à un premier gala de boxe féminine en 2011. C’était le premier au Québec qu’on a fait. Puis j’ai eu mon parcours, je suis allée aux Olympiques. J’ai dû leur dire de continuer de persévérer parce que ce n’est pas évident, la boxe. C’est un monde d’hommes. Il faut qu’on prenne notre place. J’ai vu beaucoup de talent. J’ai voulu les encourager à continuer. Moi aussi, ma route a été difficile. Ça fait partie du parcours, de ne pas lâcher. »