(Riyad) L’un a connu l’exil et la rue, l’autre a affronté ses démons et frôlé le suicide… Le géant du MMA Francis Ngannou et le géant de la boxe Tyson Fury, qui s’affrontent samedi à Riyad, ont tous deux connu des chemins sinueux vers la gloire.

Les deux poids lourds, qui règnent en maîtres dans leurs domaines respectifs, se retrouvent sur le ring pour un lucratif combat de boxe anglaise, présenté comme un choc de titans.

Tyson Fury, grandeur et décadence d’une bête de scène

À 35 ans, Fury, grande gueule au nom évocateur, est devenu l’un des plus grands boxeurs de son époque en dépit d’une carrière décousue, entre suspensions, épisodes dépressifs et vraies-fausses retraites.

Force de la nature de 2,06 mètres, le poids lourd britannique à l’âme torturée est issu d’une famille de gitans irlandais. Fury, alias le « Gipsy King », raconte souvent avoir dû se battre dès ses premiers jours : né grand prématuré, les médecins étaient pessimistes sur ses chances de survie.

Mais le jeune Tyson, baptisé ainsi en hommage à Mike Tyson, descendant d’un long lignage de boxeurs, a le combat dans les gènes. Il démarre la boxe à 10 ans, devient professionnel en 2008, avant que sa carrière ne décolle lorsqu’il détrône en 2015, à la surprise générale, le monument ukrainien Wladimir Klitschko pour s’emparer des titres WBA-WBO-IBF des lourds. Une vedette est née.

Mais c’est au moment où il atteint les sommets que le nouveau roi des lourds connaît une descente aux enfers. Contrôlé positif à la cocaïne, destitué de ses titres et diagnostiqué bipolaire, il sombre dans une profonde dépression.

« Je ne sais pas si je vais passer l’année. J’espère juste que quelqu’un me tue, avant que je me tue moi-même », confesse-t-il en 2016, les rings paraissent alors comme un lointain souvenir.

Passé par tous les états, le mastodonte finira par se relever et reprendre le fil de sa carrière en 2018. Au cours d’une trilogie épique contre l’Américain Deontay Wilder restée dans les annales, il s’empare de la ceinture WBC des lourds : une renaissance.

Pour parfaire entièrement sa renommée, il lui reste une dernière marche à gravir face à l’Ukrainien Oleksandr Usyk, détenteur des titres WBA, IBF et WBO, probablement en décembre.

Francis Ngannou, l’exil et la rue avant la gloire

PHOTO IAN MAULE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

À 37 ans, Francis Ngannou s’est forgé une réputation de dangereux puncheur pour se hisser en quelques années jusqu’aux sommets de l’UFC, la plus prestigieuse des ligues de MMA.

S’il veut battre Fury, Ngannou devra s’appuyer sur sa redoutable capacité à cogner. À 37 ans, Ngannou s’est forgé une réputation de dangereux puncheur pour se hisser en quelques années jusqu’aux sommets de l’UFC, la plus prestigieuse des ligues de MMA. Une ascension fulgurante pour le « Predator », parti de rien.

Né au Cameroun dans un milieu très modeste, il passe ses étés à travailler dans des mines de sable. Poussé par l’absence de perspectives dans son pays d’origine, il décide de prendre les chemins de l’exil, traversant le désert puis la Méditerranée pour atterrir à Paris en 2013.

« Du Cameroun à la France, c’est l’histoire d’un jeune qui n’a pas eu beaucoup de chance dans la vie, mais qui ne s’est pas résigné, qui s’est permis de rêver », résumait-il en 2018. « Je combats contre un sort qui m’était destiné, une situation à laquelle j’étais condamné. »

Arrivé dans la capitale française les poches vides, un temps sans-abri avant d’être aidé par une association, il écume les salles de boxe afin de réaliser son rêve de devenir champion du monde. Mais c’est en MMA qu’il parviendra à faire carrière, fort d’un physique hors-norme qui lui permet d’allier puissance, vitesse, endurance et coordination.

Il signe à l’UFC fin 2015 et s’offre une première chance de décrocher la ceinture des lourds dès janvier 2018. Battu lors de cette première tentative, il ne manque pas sa deuxième chance et s’empare du trône trois ans plus tard en battant l’Américain Stipe Miocic.

Il conserve ensuite sa couronne début 2022 face au Français Ciryl Gane avant d’annoncer son départ de l’UFC en janvier dernier en raison de sa relation acrimonieuse avec le président de l’organisation, Dana White, jugé pas assez généreux.

En faisant cette incursion sur le terrain de Tyson Fury pour son premier combat de boxe professionnel, Ngannou sait qu’un challenge démesuré l’attend. « Je sais que c’est mon premier combat, mais je suis un homme de défis et j’ai relevé de nombreux défis (dans ma vie). »