(Québec) Artur Beterbiev et Callum Smith sont des cogneurs capables d’endormir leurs adversaires dans un ring. Ils peuvent avoir le même effet sur leur auditoire en conférence de presse. Oubliez les grands parleurs, oubliez Conor McGregor, oubliez Jean Pascal.

À la conférence de presse de jeudi à Québec, les promoteurs ont fait le gros du travail. Ils ont « promoté », comme aimait le dire le regretté Régis Lévesque.

Et les coups ont plu, gracieuseté du promoteur Eddie Hearn, qui a prédit que Callum Smith pourrait passer le K.-O. à un Beterbiev « vieillissant », tout en accusant le Montréalais d’origine russe d’avoir présenté un résultat atypique lors d’un contrôle antidopage en décembre.

« S’ils échangent et que Callum atteint Beterbiev, ce sera un K.-O. clair, sec en faveur de Callum. Oui, Beterbiev est un gars dangereux. Mais je pense que Callum est meilleur pour éteindre les lumières d’un seul coup », a lâché le promoteur britannique, qui rappelle que le Québécois a déjà visité le tapis par le passé.

Et Beterbiev, qui défendra pour la troisième fois samedi ses trois titres de champion du monde des mi-lourds, est « vieillissant », d’ajouter Hearn. Le boxeur le plus décoré de l’histoire du Québec aura 39 ans dans 10 jours.

Callum Smith, 33 ans, a quant à lui mené une superbe carrière chez les 168 livres, avec plusieurs titres de champion du monde, avant de perdre contre le légendaire Saul Alvarez. Maintenant à 175 livres, il est encore plus dangereux selon Hearn, qui croit à un combat « 50-50 » qui ne dépassera pas le neuvième round.

Un contrôle atypique pour Beterbiev

Puis Hearn d’énumérer : Beterbiev revient d’une blessure à la mâchoire, gracieuseté d’une opération ; il vieillit, puis il y a cette histoire de contrôle antidopage atypique subi en décembre qui « doit lui jouer dans la tête ».

PHOTO JEFF CHIU, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Le promoteur Eddie Hearn était de passage à Québec pour accompagner son boxeur Callum Smith.

Le vieux routier Hearn faisait référence, d’une manière parfaitement calculée, à un article du journaliste américain Kevin Iole paru mercredi. Beterbiev a subi le 6 décembre dernier un contrôle antidopage de l’agence VADA. Les échantillons montraient un résultat atypique pour les hormones de croissance et une prohormone de la testostérone, l’androstène-5.

Il ne s’agissait toutefois pas d’un contrôle positif, mais plutôt d’un résultat anormal. Beterbiev a été soumis à trois autres tests, les 15 et 21 décembre et le 3 janvier. Les trois tests étaient négatifs.

C’est le promoteur de Beterbiev, TopRank, qui a engagé la VADA pour mener des contrôles antidopage en vue du gala de samedi.

« Je pense qu’Eddie Hearn veut faire une tempête dans un verre d’eau. Ce n’était pas un test positif, c’était un résultat atypique. Beterbiev a testé négatif, il n’a rien fait de mal ! », a réagi le promoteur du gala de samedi, Camille Estephan.

PHOTO VINCENT ETHIER, EYE OF THE TIGER MANAGEMENT

Le promoteur et président d’Eye of the Tiger Management, Camille Estephan

L’équipe du Britannique n’a pas l’intention d’en rester là. L’avocat de Smith a contacté la VADA pour comprendre comment ce résultat atypique s’explique, a dit Eddie Hearn.

« Légalement on ne peut rien faire, car c’est un résultat atypique, pas un positif », lâche Hearn, qui a été mis au courant de l’affaire par la VADA dès décembre. « Mais ça m’inquiète en tant que promoteur de l’autre camp. »

« Il n’a pas échoué à un test antidopage et j’entends que ce résultat atypique peut être naturel… », ajoute Hearn. « Je ne dis pas qu’Artur Beterbiev est coupable, mais ça soulève des questions, c’est tout. »

Vers un combat d’unification

C’est ainsi qu’une conférence de presse un peu grise, avec deux boxeurs taciturnes, a changé du tout au tout. À la défense des deux boxeurs, il est vrai que le combat n’a pas besoin d’être vendu à outrance.

Estephan s’attend à 10 000 spectateurs samedi à Québec. Beterbiev (19-0, 19 K.-O.) met en jeu ses trois titres (IBF, WBC, WBO). Il est par ailleurs le seul champion du monde avec des K.-O. à tous ses combats. Callum Smith (29-1, 21 K.-O.) est aussi un cogneur. Bref, la recette a tout pour prendre.

Le gagnant doit par ailleurs obtenir un combat d’unification contre le Russe Dmitri Bivol (22-0, 11 K.-O.) en Arabie saoudite. Bivol est le champion WBA à 175 lb.

« La source de la motivation d’Artur, c’est de s’améliorer, d’aller chercher une autre ceinture, d’être le meilleur. Je n’ai pas besoin de le motiver », lâche l’entraîneur de Beterbiev, Marc Ramsay.

Ramsay n’a pas voulu faire de prédiction. Beterbiev non plus. « Je ne fais jamais de prédiction », a simplement concédé le Montréalais dans un anglais cassé.

Camille Estephan, lui, ne s’est pas fait prier. « Je pense qu’Artur va défoncer Callum en sept rounds », a lancé le promoteur. Régis Lévesque aurait probablement apprécié.