À l’image d’un gala ponctué de six knock-out en sept combats, Erik Bazinyan s’est montré expéditif dans sa finale face à Billi Facundo Godoy, s’en débarrassant avant la fin du troisième round, jeudi soir, au Casino de Montréal.

Pour tout dire, le vétéran argentin de 37 ans, qui s’avouait en fin de carrière à la pesée de la veille, ne semblait plus en vouloir quand il s’est relevé à la fin du compte de 10, convainquant l’arbitre de mettre un terme à ce duel inégal.

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Erik Bazinyan et Billi Facundo Godoy

Deux jabs de la droite, avec une trentaine de secondes à faire, ont fait plier Godoy (41-7, 20 K.-O.) dans un coin du petit ring.

« Il n’avait plus de jambes », a relaté Bazinyan après avoir porté sa fiche immaculée à 32 victoires, la 23e par K.-O. « J’ai vu dans ses yeux qu’il avait mal. »

Le Lavallois de 28 ans, qui a conservé sa ceinture NABF des super-moyens, croit qu’il aurait dû être crédité d’une autre chute au plancher durant l’assaut initial. L’arbitre a cependant jugé que c’est lui qui avait projeté Godoy avec ses bras.

J’ai vu comment il était ébranlé avec ses jambes [qui pliaient] et il a voulu m’accrocher pour récupérer. Je l’ai juste poussé et il est tombé. S’il avait eu des jambes, il serait resté debout.

Erik Bazinyan

Se disant blessé, Godoy a cherché à rejoindre son coin, mais l’arbitre lui a refusé cette grâce. « Il faisait semblant », a tranché Bazinyan, qui a néanmoins salué le côté « gentleman » de son rival, dont il a reçu les chaleureuses félicitations au contrôle médical.

Encouragé par des « Erik, Erik » nourris, le favori local s’est imposé tant techniquement que physiquement face à un opposant plus habitué d’évoluer chez les poids moyens. L’entraîneur de Godoy a d’ailleurs écarté les bras devant le Québécois d’origine arménienne pour illustrer à quel point il paraissait plus costaud.

« J’ai maintenant 28 ans, je suis plus mature, je suis dans mon pic physique », a acquiescé Bazinyan, qui s’est lui-même surpris en ajoutant deux disques supplémentaires sur la barre d’haltérophilie dans le gymnase.

Battre un type comme Godoy, c’est bien beau, mais celui qui est classé parmi les cinq premiers aspirants de toutes les associations vise évidemment plus haut. À ce sujet, il a répété qu’il faisait confiance à Camille Estephan, président d’Eye of the Tiger Management (EOTTM), organisateur de la soirée, et à son entraîneur Marc Ramsay.

[Erik] a fait ce qu’il fallait ce soir. Il l’a arrêté au troisième round, il l’a déclassé complètement. On voyait qu’il lui faisait mal à chaque coup de poing. […] Erik, c’est une question de temps : il va y avoir un très grand combat qui va se pointer.

Camille Estephan, président d’Eye of the Tiger Management (EOTTM)

À défaut du Mexicain Canelo Alvarez, maître absolu de la catégorie dont il dicte la marche à suivre, le promoteur dit avoir tout tenté pour convaincre des aspirants comme Diego Pacheco, Edgar Berlanga, John Ryder ou Jaime Munguia.

« Vous n’avez aucune idée à combien de reprises j’ai essayé de les booker, mais ils ne veulent pas. Ils veulent tous se battre contre Canelo. Mais ça va débloquer, c’est sûr. C’est une question de quelques mois. »

Ramirez : dominant sans convaincre

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Albert Ramirez

Les 600 fervents réunis au Cabaret du Casino ne demandent pas mieux, eux qui n’ont pas été gâtés par la vigueur des opposants aux athlètes locaux.

Comme prévu, l’affrontement le plus chaudement disputé s’est avéré celui de la demi-finale entre le nouveau venu Albert Ramirez et Artur Ziyatdinov.

Dominant sans être totalement convaincant, Ramirez n’a jamais laissé de doute sur l’issue de la bagarre, s’imposant par décision unanime.

À sa première présence au Canada, le Vénézuélien a été favorisé 100-90, 99-91 et 98-92 par les juges, ce qui lui a permis de mettre la main sur la ceinture WBA internationale des mi-lourds (175 lb).

Classé parmi les 10 premiers aspirants de trois des quatre principaux organismes de sanction, Ramirez (18-0, 15 K.-O.) n’a pas été en mesure de placer ses coups de puissance aussi souvent qu’il le souhaitait.

L’Ukrainien Ziyatdinov (15-2, 12 K.-O.), un ancien d’EOTTM, n’était pas non plus le dernier venu, lui qui avait accepté de remplacer Charles Foster, l’adversaire prévu qui s’est blessé il y a quelques semaines.

Avec sa garde basse et ses mains vives, Ramirez a été incisif surtout durant les quatre premiers rounds, après quoi Ziyatdinov, le plus chaudement encouragé par le public, s’est ajusté pour ennuyer son vis-à-vis avec une défense plus étanche. En dépit des commandements bruyants de son coach Jesse Ross Thompson, celui qui s’entraîne à Montréal n’est toutefois pas parvenu à renverser la vapeur.

Claggett en aurait voulu plus

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Steve Claggett

Petite déception pour Steve Claggett (38-7-2, 26 K.-O.) : le natif de Calgary a signé sa neuvième victoire consécutive depuis son association avec l’entraîneur montréalais Mike Moffa, mais il aurait souhaité en offrir davantage aux amateurs. Au début de la troisième reprise, le Mexicain Marcos Gonzalez Barraza (23-4), qui s’était pourtant bien défendu jusque-là, est resté assis dans son coin, à la surprise générale, une fin en queue de poisson comme pour le duel précédent de Mary Spencer.

« Je l’ai pincé avec un uppercut alors que sa tête baissait, a expliqué Claggett. C’était un coup sec et ça fait mal. Je ne le blâme donc pas. Ça fait partie du jeu, c’est une business de la douleur. »

Classé huitième aspirant chez les légers par le WBC, Claggett veut maintenant se mesurer à un homologue parmi les 10 premiers. « J’adorerais montrer ce que je peux faire devant un opposant de premier niveau, à Montréal, la capitale de la bagarre. »

Spencer chasse la nervosité et renoue avec la victoire

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Mary Spencer.

En dépit d’un abandon rapide de sa vis-à-vis, Mary Spencer (8-2, 6 K.-O.) a poussé un énorme soupir de soulagement : après deux défaites en combat de championnat mondial face à la Belge Femke Hermans, la Montréalaise d’adoption a arrêté l’Américaine Sonya Dreiling (6-4), restée assise à la cloche annonçant le début du deuxième round.

« [Sonya] m’a simplement dit : “Girl, tu frappes fort, tu as une belle carrière devant toi”, a relaté Spencer, 39 ans. Elle a ajouté : “Tu as les mains lourdes.” C’est une dure, elle fait aussi des combats à mains nues, elle s’est battue jusqu’à 170 livres. Venant d’une fille comme elle, c’est apprécié. »

Camille Estephan, lui, n’était pas impressionné par le comportement de son invitée américaine. « Ce n’est pas du ballet », a-t-il sifflé.

Triple championne mondiale amateur, Spencer a admis avoir ressenti de la nervosité à l’approche de cette bagarre chez les super-mi-moyennes (154 lb). « Ma dernière victoire remontait à un an et demi, tu vois ce que je veux dire ? Tu ne réalises pas à quel point ça affecte ta confiance jusqu’à ce que tu te rendes au [combat] suivant. »

La protégée de l’entraîneur Samuel Décarie-Drolet trépigne maintenant à l’idée de retourner entre les câbles, possiblement dès le 7 mars, date du prochain gala d’EOTTM au Casino, que Camille Estephan promet spectaculaire au possible. « J’adorerais en faire partie, sinon, je vais crier dans les gradins, parce que ce sera tout un show », a conclu Spencer.

Orobio poursuit la démolition

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Jhon Orobio a battu Juan Carlos Garcia par K.-O.

Jhon Orobio (6-0) a poursuivi son exercice de démolition amorcé il y a moins d’un an, inscrivant un sixième K.-O. consécutif, cette fois aux dépens du Mexicain Juan Carlos Garcia (5-5). Le Colombien d’origine âgé de 20 ans, un protégé de Marc Ramsay, s’est appliqué sur l’abdomen de son vis-à-vis pour le faire plier deux fois, la seconde à la toute fin du deuxième assaut. Sauvé par la cloche, il ne s’est cependant pas relevé à la reprise, confirmant le sixième succès du Québécois d’adoption.

4K.-O. pour Wilkens Mathieu

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Oscar Soto Quintana et Wilkens Mathieu

Douze jours après son premier affrontement professionnel dans sa ville d’origine, Québec, Wilkens Mathieu (7-0, 4 K.-O.) a servi une autre belle démonstration face à un remplaçant de dernière minute, le Mexicain Oscar Soto Quintana (6-4), un rival plus lourd (173 lb) et potentiellement plus dangereux. « C’est mon plus beau combat, je pense », a évalué le jeune homme de 19 ans, qui a multiplié les combinaisons précises avant d’éteindre Quintana, qui refusait de tomber, à l’aide d’un direct de la droite au visage au début du quatrième round. Le Mexicain s’est accroché à son cou, mais son entraîneur a jugé que c’en était assez. « Je m’étais dit que ce serait mon combat le plus dur en carrière, mais quand le défi est plus haut, je m’élève d’un cran », a estimé Mathieu, qui a déjà hâte de remettre les gants le 7 mars.

Fendero continue d’édifier sa cathédrale

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Moreno Fendero

Lui aussi actif à Québec, Moreno Fendero (4-0, 3 K.-O.) ne s’est pas éternisé en ouverture du gala. Le Chartrois d’origine, désormais domicilié à Montréal, a poursuivi l’échafaudage de sa cathédrale en faisant s’agenouiller le Mexicain Ricardo Lara (22-12) à trois reprises avant que l’arbitre ne mette fin aux hostilités à 1 min 46 s du deuxième round. Du bien bel ouvrage de la part du gaucher de 24 ans, un poids moyen également pressenti pour remettre les gants le 7 mars.

Avec les retombées de la copromotion du gala d’Artur Beterbiev à Québec, le 13 janvier, Camille Estephan dit se préparer « pour la grosse guerre ». À ce compte, l’épisode de jeudi soir ressemblait plutôt à une escarmouche.