(Madrid) Blessé et hors circuit depuis bientôt quatre mois, Rafael Nadal risque, pour la première fois de sa carrière d’exception, d’aborder Roland-Garros (28 mai-11 juin), son terrain de jeu chéri, sans avoir joué le moindre match sur terre battue.

Et s’il finissait même par être contraint de renoncer à monter sur la scène de ses quatorze sacres parisiens record ? Impossible de ne pas se poser la question.

Monte-Carlo, Barcelone, Madrid et maintenant Rome : semaine après semaine, la liste des capitulations forcées de « Rafa » sur ocre s’allonge. La dernière en date, vendredi, concerne le tournoi italien, le dernier des trois Masters 1000 sur terre battue, qui débute la semaine prochaine, à trois semaines de Roland-Garros.

« Je suis désolé d’annoncer que je ne vais pas pouvoir être à Rome », écrit sur les réseaux sociaux le Majorquin, 37 ans début juin.

« Malgré une amélioration constatée ces derniers jours » qu’il ne détaille pas, « je n’ai pas pu m’entraîner à haut niveau pendant de longs mois, le processus de récupération demande du temps et je n’ai pas d’autre choix que de l’accepter et de continuer à travailler », se résigne-t-il.

Jamais sans match de préparation

Concrètement, Nadal est privé de compétition par une blessure musculaire à la hanche gauche (muscle ilio-psoas) depuis bientôt quatre mois. Son dernier match, une défaite au deuxième tour des Internationaux d’Australie face à l’Américain Mackenzie McDonald, au cours duquel il s’est blessé, remonte précisément au 18 janvier.

Son absence avait alors été évaluée à six à huit semaines, mais la blessure s’est avérée plus tenace que prévu.

Si tenace qu’il n’est pas en mesure jusque-là de se mêler à la tournée printanière sur ocre, pourtant sa période préférée de l’année.

Techniquement, il pourrait encore s’aligner à Lyon ou Genève la semaine précédant le Grand Chelem parisien, mais c’est hautement improbable.

Ce qui le met au pied d’un Everest : jamais l’Espagnol ne s’est présenté à Roland-Garros sans le moindre match sur terre battue dans les jambes.  

Il y a un an, la faute d’abord à une côte fissurée en mars, puis au réveil du mal chronique au pied gauche dont il souffre depuis l’âge de 18 ans (syndrome de Müller-Weiss) à Rome, il n’en avait disputé que cinq. Et son triomphe Porte d’Auteuil, pied anesthésié pour contenir la douleur, avait tenu du miracle.

Même en 2020, l’année de l’édition exceptionnellement automnale de Roland-Garros, dans un contexte de reprise post-COVID-19, il avait joué trois matchs sur ocre avant d’arriver à Paris.

Une seule victoire en 2023

Sinon, depuis 2005, « Rafa » a toujours accumulé au moins une quinzaine, et jusqu’à plus d’une trentaine, de matchs sur terre battue avant Roland-Garros.

Parce que c’est Nadal et parce que c’est Roland-Garros, rien ne semble plus impossible. Et le Majorquin, au crépuscule de sa carrière, y rêve forcément d’un quinzième sacre qui lui permettrait de porter à 23 le record de titres en Grand Chelem, qu’il partage actuellement avec Novak Djokovic.

Mais le défi s’annonce colossal.

Aussi parce que cette blessure musculaire vient s’ajouter à d’autres, deux déchirures abdominales en particulier, qui ont largement éloigné Nadal du circuit depuis l’été dernier. Depuis août et sa reprise après son forfait avant sa demi-finale à Wimbledon, il n’a joué que treize matchs et en a perdu huit.

Pire, en 2023, il n’a gagné qu’un seul match en quatre disputés.

Obstacle supplémentaire : sa chute au classement ATP, où l’ex-N. 1 mondial a, pour l’instant, glissé au 14e rang, après quasiment 18 ans passés dans le top 10.

« Même s’il arrive (à Roland-Garros) sans avoir joué depuis les Internationaux d’Australie, un joueur qui a gagné quatorze fois un tournoi sera toujours difficile à battre dans ce tournoi », estime le nouveau visage gagnant du tennis ibérique, Carlos Alcaraz.  

« Mais évidemment, ça va être compliqué pour lui, parce que le tennis demande de jouer des matchs, de passer des heures sur le court, du rythme, poursuit-il. Mais “ Rafa ” est “ Rafa ”… »