(Wimbledon) Encore classé au-delà de la 150e place mondiale il y a un an, l’Américain Christopher Eubanks, tombeur de Stefanos Tsitsipas (5e) en huitième de finale, est la sensation de ce tournoi de Wimbledon, avant d’affronter mercredi Daniil Medvedev (3e) en quart.

« Je ne suis pas de ceux qui adorent l’histoire ou les traditions […], mais pouvoir dire, même à des gens qui ne connaissant pas le tennis, “j’ai fait un quart à Wimbledon”, ça attire une forme toute particulière de respect », avait estimé Eubanks dans un podcast vidéo avec ses compatriotes Frances Tiafoe et Ben Shelton, juste avant le début du tournoi.

Il était loin de mesurer la portée quasi prophétique de sa déclaration, mais, mercredi, il va devenir, à 27 ans, le plus vieux joueur à disputer son premier quart de finale à Wimbledon depuis 1968.

L’aboutissement d’un formidable coup d’accélérateur pris par sa carrière depuis que son premier quart de finale dans un tournoi ATP 1000, en avril à Miami, perdu justement contre Medvedev 6-3, 7-5, lui a permis d’intégrer le top 100.

Après la victoire, deux tours plus tôt, contre le Français Grégoire Barrère, qui scellait son entrée dans ce club fermé, l’émotion avait étreint ce fils d’un pasteur baptiste d’Atlanta, en Géorgie, qui l’avait initié au tennis dès qu’il avait été en âge de tenir une raquette.

À deux doigts d’arrêter en 2021

PHOTO ALASTAIR GRANT, ASSOCIATED PRESS

« Pendant longtemps, je me suis demandé si j’avais la régularité suffisante pour jouer à ce niveau durablement. Je pouvais être bon sur n’importe quel match, m’enflammer et poser des problèmes à n’importe quel gars. Mais je ne sais pas si je croyais en être capable match après match contre des adversaires de qualité ».

Tout en rêvant d’une carrière pro, Eubanks a toujours été circonspect sur son propre potentiel, ce qui explique sans doute son éclosion tardive.

« En grandissant, je n’ai jamais été le meilleur junior, je n’ai jamais été le meilleur de mon État ou de ma section, je n’ai jamais été le meilleur au niveau national, ni rien », avait-il révélé, en larmes, à Miami.

« Pendant longtemps, je me suis demandé si j’avais la régularité suffisante pour jouer à ce niveau durablement. Je pouvais être bon sur n’importe quel match, m’enflammer et poser des problèmes à n’importe quel gars. Mais je ne sais pas si je croyais en être capable match après match contre des adversaires de qualité », a-t-il encore raconté après sa victoire en cinq manches contre Tsitsipas, sa première contre un membre du top 10.

En 2021, à 25 ans, alors que la pandémie de COVID-19 rendait l’avenir très incertain et qu’il végétait au-delà de la 200e place à l’ATP, il avait même lancé à son agent : « Écoute, si je suis encore dans les 200 l’an prochain sans que ce soit dû à des blessures, je ferai autre chose de mon temps ».

Après le déclic de Miami, il y a aussi eu celui de Majorque, où il a remporté son premier tournoi pro, grimpant au 43e rang mondial et se découvrant une affinité insoupçonnée avec le gazon où il est invaincu depuis neuf matchs.

Clijsters à la rescousse

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Qualifiant son parcours des dernières semaines de « tourbillon » et de « rêve qui devient réalité », Eubanks avait reconnu en plaisantant que la seule leçon qu’il avait tirée de tout cela pour le moment était : « En fait j’aime bien le gazon ».

Son gabarit (2,01 m), son gros service, son jeu porté vers l’avant, son coup droit aussi puissant que délié semblent pourtant faits pour cette surface.

Mais début juin, après son élimination au deuxième tour du Challenger de Surbiton, il avait appelé au secours l’ancienne numéro un mondial Kim Clijsters.

« Salut Kim, le gazon est la surface la plus stupide pour jouer au tennis ! » avait-il pesté dans un échange où la Belge lui prodiguait quelques conseils et dont il avait publié les captures d’écran après son sacre à Majorque, trois semaines plus tard, pour la remercier.

Eubanks a aussi souligné le soutien de ses compatriotes Tiafoe, Coco Gauff et Naomi Osaka.

« Hey, tu peux jouer à ce niveau, il faut juste y croire ! », lui ont inlassablement répété les trois joueurs.

« Quand je suis avec eux et que je les entends parler de leur confiance en moi, c’est un peu contagieux. Cela finit par déteindre » sur lui, a-t-il reconnu.

Qualifiant son parcours des dernières semaines de « tourbillon » et de « rêve qui devient réalité », Eubanks avait reconnu en plaisantant que la seule leçon qu’il avait tirée de tout cela pour le moment était : « En fait j’aime bien le gazon ».

Quant à sa vie de tous les jours, la seule chose qui a changé était « la date de fin de (sa) réservation à l’hôtel », a-t-il aussi assuré.