La première période, à moins que j'en oublie une quelque part dans ma mémoire, est la meilleure période de hockey jouée par Équipe Canada contre une équipe nationale russe ou soviétique.

Les Russes ont été dominés. En vitesse, en cohésion, en combativité et en jeu d'équipe. Même que ce sont les Russes qui ont tenté de trop nombreux efforts individuels.

Disons pour tenter d'expliquer cette raclée que les millionnaires russes ont trop profité de l'air doux de Vancouver. Ça se pourrait, il n'y a plus de Victor Tikhonov et ses lieutenants du KGB pour surveiller les joueurs.

On pourrait dire aussi que l'équipe avait une mauvaise journée dans le système. Ça arrive aussi. Les passes dans les patins, les rondelles échappées nerveusement, les ratés à la ligne bleue. Tout ça se peut.

Sauf que les passes molles, elles sont plus fréquentes quand l'adversaire fonce avec une détermination farouche sur le porteur du disque, que les rondelles sautillantes, elles sont plus nombreuses quand les bras sont tendus parce que la pression est trop forte. Autrement dit, on joue mal souvent parce que l'autre joue bien.

Et mercredi, les gars du Canada ont disputé un match colossal.

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Mais il se pourrait également que le match ait été perdu il y a plusieurs semaines déjà dans les bureaux de la douma à Moscou. La composition de l'équipe russe était une affirmation politique. Ce ne sont pas sept joueurs de la Ligue continentale qui avaient été choisis au sein de l'équipe, c'est dix. Contre neuf de la Ligue nationale.

L'affirmation politique était claire et nette. La KHL, financée par Gazprom, le grand consortium russe du gaz naturel, était au moins aussi bonne que la Ligue nationale. Et il était impensable que l'équipe nationale russe ne compte pas au moins une moitié de ses joueurs issus de sa propre ligue nationale.

Le pari était énorme. Hier, le vieillissant Sergei Fedorov, Alex Radulov, Sergei Zinovyev et les défenseurs Tyutin et Kobneyev ont peiné toute la soirée. Le jeu était trop rapide, trop intense et soit ils avaient moins de talent soit ils étaient moins en forme que les joueurs du Canada.

Ce sont les grands de la Ligue nationale qui ont combattu avec le plus de panache et de hargne. Malkin, Kovalchuk, Semin, Gonchar ont travaillé et ont été menaçants. Alexander Ovechkin a essayé mais il n'a jamais été dans le coup. Dans son cas, on va parler des nuits douces de Vancouver.

Et pensez-vous que les gars de la Ligue nationale qui ont appris à se défoncer à Pittsburgh, Washington ou Detroit étaient heureux de voir que la direction «politique» de l'équipe russe avait nommé un joueur de la KHL capitaine de l'équipe nationale: Alexei Morozov?

Cela dit, il ne faut pas oublier que ce tournoi olympique est incroyablement relevé. Le club qui a été dominant et impérial contre les Russes mercredi est le même qui s'est fait battre 5-3 par les États-Unis. Et que le Canada a arraché une victoire contre la Suisse en tirs de barrage. Et que cette même Suisse en a donné plein leurs baskets aux Américains tout juste avant la victoire du Canada.

En attendant, le Canada passe en demi-finale de brillante façon et tout reste très possible, y compris une médaille d'or. Bravo.

Mais vous savez quoi? En 1981, quand les Soviétiques avaient planté le Canada 8-1 en plein Forum de Montréal, j'avais écrit que la différence entre les deux équipes était beaucoup plus modeste que le pointage ne l'indiquait.

J'écris la même chose ce soir.