Les Parisiens veulent boire bio. Tellement que les cavistes et les bars à vin de la Ville lumière se convertissent en offrant de plus en plus de vins issus de l'agriculture biologique.

Dans le bar Le zinc des cavistes, sur les Grands Boulevards, les Parisiens se réunissent à l'heure du 5 à 7. Sur la carte de ce lieu très branché, une vingtaine de bouteilles, dont cinq vins issus de l'agriculture biologique.

«Je n'y avais jamais pensé, mais bizarrement, ces vins se vendent plus que les autres», explique le propriétaire de l'établissement Alain Man.

Dans le XVIIIe arrondissement, Marc Sibard préside aux destinées de l'une des plus anciennes caves de Paris. Au milieu des bouteilles des grands châteaux bordelais trônent les vins sans souffre, sans pesticides et sans fongicides. Le propriétaire de la cave Augé raconte qu'au fil des dégustations, le choix du bio est devenu une évidence pour lui.

«Je n'ai pas décidé, j'ai juste bu», dit Marc Sibard.

La cave date de 1850. Elle attire autant les Parisiens que les touristes. Marc Sibard essaie d'initier chaque client à ses vins dits «natures». Et il réussit: son chiffre d'affaires a passé de 250 000 euros au début des années 90 à 5 millions d'euros par année aujourd'hui.

L'homme d'affaires élabore aussi la carte des vins de plusieurs dizaines de restaurants parisiens. Il estime que plus de 100 restaurants de la Ville lumière ont ajouté des vins issus de l'agriculture biologique à leur carte.

«Mon job, c'est de faire passer des messages aux puissants, ajoute-t-il. C'est de dire à Dom Perignon, au lieu de faire un étui biodégradable, cultive tes vignes en bio.»

À deux stations de métro de la cave Augé, Pierre Jancou propose dans son nouveau restaurant, le Vivant (Xe arrondissement), des vins sans sulfites et sans souffre. Le chef cuisinier de formation vient de publier le livre Vin vivant, portraits de vignerons au naturel, dans lequel il raconte l'histoire de vignerons qui ont faire le choix des vins natures.

«Ce sont des vins qu'il faut expliquer», dit l'auteur.

Si les Parisiens parcourent la ville pour boire des vins issus de l'agriculture biologique, les critiques n'en font pas autant. Journalistes et vignerons traditionnels affirment que les vins sans souffre ne sont pas stables et ne sont pas aptes à la garde.

En guise de réponse, Pierre Jancou explique dans son livre que ces vins sont fragiles, vivants et qu'ils doivent être gardés en cave à une température constante de 14 degrés. Pour ce qui est de la garde, il assure que dans de bonnes conditions les vins peuvent vieillir. La preuve: les vins élaborés avant 1914 ne contenaient aucun produit ajouté. Quelques rares cuvées de l'époque sont encore consommées de nos jours.

Si la mode est aux vins bios, Marc Sibard ne se berce pas d'illusions. Il reste beaucoup de travail à faire. En 2009, moins de 5% du vignoble français était cultivé en agriculture biologique.