Les restaurants offrent de plus en plus de vin nature dans leur carte des vins. Certains s'en font même une spécialité. Mais qu'est-ce qu'en est-il, exactement?

Le vin dit «nature» attire de plus en plus de buveurs à la recherche d'une expérience gustative différente.

En septembre dernier, 600 personnes ont participé aux «Apéros nature» du Foodlab, à la Société des arts technologiques. Pourtant, le vin nature pur et dur se retrouve rarement sur les tablettes de la SAQ parce que «trop instable». Petit survol d'un sujet qui déchaîne souvent les passions dans les dégustations!

«À la Société des arts technologiques, nous avons une clientèle assez jeune, curieuse, ouverte à la nouveauté. C'était le contexte idéal pour proposer des vins différents, excitants. On pourrait comparer ça à la musique alternative», lance Frédéric Gauthier, directeur du Foodlab.

Le chroniqueur, auteur et «chercheur» François Chartier, pour sa part, fait un lien avec l'art. «La première fois que j'ai vu une exposition de Picasso, j'étais surpris. Je n'ai pas tout compris. Après, j'ai lu sur le sujet. Ma deuxième expérience était une révélation. C'est la même chose avec le vin nature, qui cherche à transmettre le plus fidèlement possible l'identité du terroir. On l'apprécie beaucoup mieux lorsqu'on comprend la démarche.»

Et c'est pourquoi, dans les restaurants, par exemple, il faut un sommelier pour expliquer et vendre les vins aux clients. «Des bouteilles, j'en retourne peut-être une aux trois mois», raconte Jack Jacob. Le sommelier du Comptoir vins et charcuteries, nouvellement partenaire de l'agence de vins nature Glou (anciennement Labelle Bouteille), est «tombé dans le nature» en 2005, parce qu'il souffrait de réactions allergiques aux sulfites. Il a goûté à son lot de vins nature pleins de défauts, mais ne s'est pas laissé décourager pour autant. «J'ai tout simplement arrêté de travailler avec certains vignerons.»

En effet, les apôtres du vin nature, qui ne jurent que par ça et tolèrent parfois des défauts insurmontables pour d'autres (arômes fermiers, restes de CO2, légère turbidité due à la non-filtration), sont de plus en plus rares.

«Si je pouvais n'avoir qu'un porte-folio de vins bio-nature, ce serait idéal, lance Jean-Philippe Lefebvre, propriétaire de Rézin, une des premières agences à avoir importé du vin bio-nature. Mais tout n'est pas bon en nature et les vins sont souvent déviants. J'ai beaucoup d'affection pour le vigneron et j'ai la fibre verte, mais ma priorité va au bon vin!»

Patrick Saint-Vincent, sommelier et copropriétaire du restaurant Le filet, en a bu, du vin nature, mais après avoir goûté à son lot de dérives bactériologiques et de refermentations, il a pris un peu de recul. Cela dit, aujourd'hui, il ne cherche pas pour autant les vins techniquement parfaits, mais les vins bien faits, qui procurent un plaisir pur et une émotion. «Nous sommes tellement habitués de boire des vins durs, pleins de sulfites, que les premiers vins sans soufre peuvent faire un choc. Mais on prend goût à ces vins moins durs, plus ouverts, remplis de fraîcheur.»

Il n'est pas seul de cet avis. «Aujourd'hui, j'ai du mal à boire autre chose que du vin nature, raconte Stéphane Hamel, de l'agence d'importation Primavin. Pour moi, la différence entre un vin nature et un vin chimique, c'est l'équivalent de celle entre une fraise bio du Québec et une grosse fraise importée pleine de pesticides.»

Le vin  en chiffres

-La viticulture bio représente 1,6% du vignoble mondial (Pascal Patron)

-Entre 2008 et 2010, le bio a connu une hausse de 50% (Pascal Patron)

-La réglementation européenne (CEE) limite la teneur en SO2 (souffre) dans une fourchette allant de 160 mg par litre pour les vins rouges à 400 mg par litre pour les liquoreux.

-Selon l'Organisation mondiale de la santé, la dose quotidienne acceptable de sulfites est de 0,7 mg par kg de poids corporel (faites le calcul!). Certaines personnes développent une réaction inflammatoire lorsqu'elles consomment des sulfites.

-Il existe plus de 350 sortes de levures aromatiques pour donner au vin un parfum de cassis ou de banane, par exemple (Nicolas Joly, dans le film L'esprit du vin)

Où boire du  «vin naturel»?

-Foodlab de la Société  des arts technologiques

1201, boul. Saint-Laurent, 514-844-2033

sat.qc.ca

-Le Petit Alep

191, av. Jean-Talon E.,  514-270-9361

-Le Comptoir vins  et charcuteries

4807, boul. Saint-Laurent,  514-844-8467

comptoircharcuteriesetvins.ca

-Pullman

3424, av. du Parc

514-288-7779

pullman-mtl.com

-Les Trois Petits Bouchons

4669, rue Saint-Denis

514-285-4444

lestroispetitsbouchons.com

-Ellefsen

414, rue Saint-Zotique E.

cafeellefsen.com

-La QV votre caviste

29, rue Beaubien E.

(événements autour du vin nature)

www.laqv.ca

-Le Moine échanson

(Québec)

585, rue Saint-Jean

418-524-7832

lemoineechanson.com

Pas seulement  en France

Le mouvement du vin naturel compte un grand nombre de vignerons en France, mais on en trouve également quelques-uns en Italie (Ariana Occhipinti, Elisabetta Foradori, Angiolino Maule), en Espagne, en Autriche, en Californie (Coturri, Clos Saron, La Clarine Farms).  Au Québec, le vignoble Les Pervenches travaille en biodynamie  et fait une cuvée sans souffre.