Les classes où se côtoient des élèves de deux niveaux différents ne sont plus réservées aux petites écoles de campagne. En deux ans seulement, dans la région de Québec, le nombre de classes multiâges est passé de 119 à 158.

La baisse du nombre d'élèves dans les écoles est la première responsable de cette réorganisation scolaire, indique-t-on du côté des commissions scolaires (CS). «C'est un moindre mal, reconnaît Marc Julien, directeur adjoint de la CS des Découvreurs, qui couvre l'ouest de Québec. Quand ça n'arrive pas mathématiquement, au lieu de transférer des élèves dans une autre école, on privilégie plutôt la création de classes multiâges», explique-t-il, ce qui permet de former des groupes plus complets.

Lorsque le nombre le permet, les enseignants sélectionnent habituellement les élèves les plus autonomes pour faire partie de ces classes, explique M. Julien. Les parents sont habituellement plus ouverts à l'idée que leur enfant fréquente une de ces classes s'il est dans le niveau inférieur (en troisième année dans une classe de troisième et quatrième par exemple) plutôt que supérieur. «On organise des rencontres avec les parents et on essaie de faire ressortir les points positifs», ajoute-t-il.

Du côté de la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE), l'augmentation des classes multiâges inquiète. «En général, c'est une mauvaise nouvelle», affirme Johanne Fortier, qui était jusqu'à récemment présidente de la FSE. Mme Fortier estime qu'en milieu urbain, la création de classes multiâges repose surtout sur des choix économiques et administratifs, puisqu'il est plus facile d'atteindre le nombre d'élèves maximum par classe en jumelant deux niveaux d'enseignement. Mais elle souligne que la réalité est évidemment bien différente en milieu rural, où la création de classes à multiples niveaux permet de maintenir en vie des petites écoles, au grand soulagement des parents.

La FSE s'inquiète par ailleurs du manque de préparation et d'encadrement des professeurs. «Les enseignants nous disent qu'ils sont mal outillés. Ils n'ont pas de formation et peu de support. Les élèves peuvent en subir les contrecoups», ajoute Mme Fortier.

Dans un monde idéal, le nombre d'élèves serait davantage réduit dans les classes multiâges et les enseignants seraient mieux épaulés par la direction et les commissions scolaires, affirme la FSE.

Au ministère de l'Éducation, la porte-parole Stéphanie Tremblay indique que la dernière convention collective des enseignants prévoie 3,75 millions $ sur trois ans pour soutenir les profs responsables de classes multiâges. Un comité paritaire a d'ailleurs été créé afin de faire un portrait de la situation et trouver des pistes de solution.