Un débat est en cours parmi les membres de la presse vinicole québécoise sur la pertinence de la notation des vins.

Selon certains, il vaut mieux s'en tenir à des descriptions, alors que d'autres jugent nécessaire et utile de leur accorder une note selon un système ou un autre (étoiles, ou encore sur 20 ou sur 100).

Débat inutile? Non pas, car, comme le veut le dicton, «la lumière naît du choc des idées»...

Très peu enclin à noter les vins, l'Anglais Hugh Johnson utilise tout de même un système à étoiles (une à quatre), pour donner «une indication de qualité», indique-t-il dans son Guide des vins du monde entier 2009 (Flammarion).

 

Mais déguste-t-il plusieurs vins côte à côte, il se contente... de cocher ceux qui lui semblent les meilleurs, ainsi qu'il s'en est déjà expliqué (dans une interview, si j'ai bonne mémoire).

Robert Parker, de toute évidence le plus connu et le plus influent des dégustateurs de la planète, penche, lui, pour une notation très précise - son système sur 100 points ayant été adopté par tous les autres dégustateurs états-uniens.

«Je ne connais personne qui, devant trois ou quatre verres de vins différents, bons ou mauvais, ne peut dire: «Je préfère celui-ci à celui-là.» Une note n'est rien d'autre qu'une opinion professionnelle à laquelle on applique un système numérique (...) Par ailleurs, la notation permet de communiquer rapidement des informations, que ce soit à des experts ou des novices», écrit-il à ce propos dans son Guide Parker des vins de France (Solar).

Il utilise... le maître mot: OPINION.

Car, peu importe le système utilisé, ce n'est toujours, et rien d'autre, qu'une opinion qu'exprime le dégustateur public, c'est-à-dire dont les jugements sont portés à l'attention de lecteurs ou d'auditeurs.

Et, à mon avis (encore une opinion!), il se doit de noter les vins, il se doit donc... de se mouiller, quitte à se tromper! Il revient alors au lecteur ou à l'auditeur de juger de la pertinence de ses commentaires et des notes attribuées.

«Fais-toi une provision de demi-étoiles, et vas-y!» me lançait à ce sujet, récemment, mi-figue mi-raisin, un amateur de la Rive-Sud.

Façon de dire que je devrais, selon lui, noter les vins plus généreusement, plutôt que de noter bas, comme je l'écris souvent à propos de dégustations de nombreux vins goûtés côte à côte.

Pourquoi noter bas?

Essentiellement pour deux raisons. D'abord, parce que les grands vins sont rares et mêmes rarissimes. Les notes de 90 et plus, sur 100, dont sont prodigues les dégustateurs des États-Unis, ont donc quelque chose à tout le moins d'incompréhensible.

En second lieu, parce que les risques d'erreurs, en matière de dégustation, sont toujours présents.

Et donc (aussi bien tout dire!) parce qu'il vaut mieux surprendre agréablement le lecteur ou l'auditeur par un vin noté trois étoiles et demie, ou 17,8 sur 20, et qui mérite peut-être quatre étoiles, ou 18 sur 20, que l'inverse.

Armé... d'une demi-étoile supplémentaire (mais bien méritée, à mon avis), j'ai ainsi attribué quatre étoiles à l'Aloxe-Corton 2005 Domaine Nudant, bien coloré pour un bourgogne, au beau bouquet de bonne ampleur, de fruits rouges bien mûrs, charnu et ne manquant pas de corps, bien qu'il y ait des 2005 nettement plus concentrés, et aux saveurs tout aussi franches que l'annonce le bouquet. Grand bourgogne, donc, sans qu'on soit, à mon sens, au sommet (80 caisses).

S, 730 457, 43,75$, ****, ou 18/20,$$$$, 2009-2016.

Goûté côte à côte avec le précédent, le Rully 2005 Faiveley, tout en finesse et riche en nuances lors du premier arrivage, s'est fermé depuis (ce qui est aussi le cas pour d'autres bourgognes rouges de ce grand millésime qu'est 2005), comme le montre cette bouteille d'un deuxième arrivage.

Rouge clair, il se présente avec un bouquet discret, net, mais retenu, aux arômes de framboises. Moyennement corsé, ses tannins sont maintenant plus fermes qu'ils n'étaient, et il a perdu de son charme immédiat, me semble-t-il, tout en restant très bon. Bref, à tort ou à raison, je lui ai soustrait une demi-étoile (141 caisses)...

S, 10 377 215, 25,45$, ***, 16,8/20,$$$ 1/2, 2009-2014?

 

La recommandation de la semaine

Une fois n'est pas coutume... parlons champagne! Goûté à quelques reprises en décembre, le Pol Roger Extra Cuvée de Réserve, non-millésimé, est toujours aussi impeccable. Marqué par une note rappelant certains biscuits fins, son bouquet a en effet beaucoup de charme, auquel succède une bouche de bonne ampleur, distinguée, le tout d'un équilibre exemplaire. Bref, on comprend feu Winston Churchill qui adorait les vins de cette maison! Noté 17/20 à une occasion, et 17,5/20 à une autre, mais peut-être aurais-je dû puiser dans mon stock de demi-étoiles (759 caisses)...

C, 51953, 60 $, *** 1/2, $$$$$, 2009-2012?