«Où est, selon toi, le meilleur restaurant "apportez votre vin" à Montréal ?» On me pose la question souvent et, chaque fois, je suis un peu embêtée, car j'ai cessé, trop souvent déçue peut-être, de chercher ces établissements.

Il faut dire que depuis un bon moment, comme bien des Montréalais, j'ai changé mes habitudes de consommation de vin lorsque je sors. Au lieu des classiques bouteilles, je commande au verre. Un blanc pour l'entrée, un rouge pour le plat. C'est tout. Honnêtement, je ne me rappelle pas la dernière fois où j'ai commandé une bouteille. Et donc, je ne me rappelle pas la dernière fois que les prix parfois honteusement gonflés que demandent nos restaurateurs m'ont révoltée.

Je sais, toutefois, qu'il y a tout un marché pour ces restaurants «AVV», car il existe à Montréal tout un monde d'amateurs de vins qui ont envie de boire de très bons crus au restaurant. Des gens qui ont envie de mettre le 50 $ qu'ils dépenseraient sur une bouteille de vin ordinaire au resto, pour acheter à la place une bouteille à la SAQ.

Ces amateurs seront très heureux de savoir qu'il y a maintenant une nouvelle adresse AVV de qualité sur le Plateau où leurs bons bordeaux, riesling et compagnie trouveront des plats pour leur faire honneur.

Le restaurant en question s'appelle le Quartier général et est installé rue Gilford, à l'angle de la rue Brébeuf, dans une zone plutôt résidentielle. On y mange une cuisine assez classique, d'inspiration française, mais bien faite et à la hauteur de ce qu'elle annonce.

D'entrée de jeu, les lieux donnent le ton. Tout est en noir et gris, élégant, du plafond de métal embossé typique des commerces montréalais du début du siècle dernier au tableau noir classique où est inscrit le menu.

Les prix ? À deux, avec dessert, on s'en tire pour moins de 100 $, tout compris, si on prend une entrée en plus de la soupe ou salade servie automatiquement avec le plat principal. Pour un repas à quatre services de cette qualité, c'est fort acceptable. Surtout que c'est réellement bon.

En entrée, par exemple, les escargots font un retour élégant sur jambon de Bayonne et concassé de tomates. On est loin du gros beurre à l'ail des années 70. Mais le clin d'oeil vintage à ce produit oublié est sympathique. En fait, on redécouvre la tendresse douce et rebondissante de la chair du gastropode.

Dans un tout autre esprit, le porcelet braisé et effiloché servi en petit chausson de brick, sur une salade de quinoa noir au basilic thaï, surprend par son équilibre tout à fait au point. L'herbe apporte en effet la fraîcheur nécessaire au plat, tandis que le porc, fondant, se laisse porter par le craquant de la pâte.

La pieuvre sur haricots, cuite exactement comme il le faut pour être vraiment tendre, mais pas molle, est de son côté plus classique, tandis que le beignet de crabe, avec sa poivronnade piquante, montre comment on peut réussir une friture pour qu'elle soit craquante sous la dent, tout en restant légère et discrète.

En plat, le lapin farci au chorizo de lapin plaira aux amateurs de cette viande, mais peut-être aussi aux autres. En effet, la chair étant roulée, farcie, travaillée, on n'en reconnaît plus que sa finesse, rehaussée par les notes d'artichaut et de châtaigne de quelques morceaux de topinambours.

L'assiette la plus spectaculaire, toutefois, est celle présentant une côte de veau juste assez cuite pour être agréablement rosée mais pas trop. Surtout que, à côté de la viande et des notes vanillées de la purée de panais, les noisettes du beurre fondant déposées sur la viande donnent subtilement toute une personnalité au plat, croquantes, surprenantes...

La partie la moins forte du repas est la dernière. Car si le gâteau au fromage et à la Tia Maria se laisse manger, il ne brille pas par son originalité. Même chose pour la marquise au chocolat avec coulis de mûre, qui manquait d'une certaine légèreté, mais pas assez pour faire oublier le professionnalisme d'un repas, sinon, pratiquement sans faille.

Le Quartier général

1251, rue Gilford, angle de Brébeuf

Réservations recommandées: 514 658-1839