Il fut un temps, dans les années 90 et 2000, où il y avait des restaurants italiens partout. La salade mozzarella-tomate-basilic, la fameuse caprese, était sur toutes les tables. Tout comme les pâtes au pesto et les bruschetta.

Et puis, tous ces restaurants italiens se sont volatilisés, tranquillement remplacés par des bistrots pour amateurs de tartares et de braisés.

Aujourd'hui, même Il Mulino, espace central de la vague italienne du tournant du siècle, est fermé pour rénovations majeures, jusqu'à la fin de l'été.

Les italophiles en quête de bonnes pâtes et de bons risottos se sont donc, petit à petit, retrouvés avec de moins en moins de choix. Et surtout, de moins en moins d'options à prix moyens, le haut de gamme demeurant, lui, au poste, façon Graziella ou Da Emma.

Dans ce contexte, l'ouverture d'une nouvelle osteria dans le Vieux-Montréal est une bonne nouvelle. Surtout qu'elle est pilotée par un chef sérieux, Michele Forgione, qui a passé ses étés d'enfance en Campanie, avant d'étudier son métier et de travailler à Casa Napoli, chez Mediterraneo au temps de Claude Pelletier et encore, tout récemment, au Koko de l'hôtel Opus.

La cuisine du Venti n'est pas ultracréative ni ésotérique. On n'est pas chez Massimo Bottura, vedette actuelle de la créativité à l'émilienne, à Modène. Ni chez Gualtiero Marchesi, figure mythique lombarde des années 90.

Par contre, si votre idée de la bonne cuisine italienne se forge autour d'une caponata italienne bien coupée et bien cuite, de gnocchi fondants ou d'une panna cotta fine et légère, comme il se doit, rendez-vous chez Venti.

Installé dans les lieux occupés encore tout récemment par le BBQ, le Venti en a gardé le décor où le ton est donné surtout par les murs de vieilles briques. D'un côté, la pièce par laquelle on arrive accueille la cuisine ouverte et un comptoir. De l'autre, la salle à manger propose des tables sans nappe de tous formats, avec tableaux noirs aux murs pour y inscrire les plats du jour.

Forgione prépare lui-même toutes ses charcuteries qui sont servies en plateaux de deux formats. Et voilà un des points forts de la maison. Mousse de foie, porchetta di testa, mortadelle à la pistache... Tout est savoureux, surtout quand on accompagne les bouchées de marinades maison en tous genres, dont d'excellents artichauts conservés dans la saumure plutôt que dans l'huile et qui craquent ainsi sous la dent, frais et remplis de souvenirs de campagne romaine.

Pour une entrée plus légère, très fraîche, on peut choisir la salade de roquette, presque vaporeuse, préparée avec des minifeuilles, une bonne huile d'olive et juste assez de citron. En revanche, pour une salade presque repas, on opte pour l'assiette de thon en conserve maison, aux olives et aux haricots, un peu lourde en entrée, mais savoureuse et copieuse.

Pour le primo piatto, la palme revient sans hésitation aux gnocchis à la ricotta, qui fondent littéralement sous la dent, beaucoup plus légers et aériens que ceux qu'on nous sert habituellement. On les propose très simplement avec une sauce tomate qui pourrait être un peu plus complexe. On rêve de citron, de menthe...

Côté viande, le porcelet de Saint-Canut, servi en porchetta, donc farci et roulé, est lui aussi exceptionnellement tendre. On le sert accompagné d'une poire, dont le sucre rend le plat encore plus riche. En à côté, on a choisi les pommes de terre au romarin, toutes simples, qui complètent bien ce plat costaud.

Plusieurs des assiettes du Venti sont servies en deux formats et peuvent être prises en plat principal ou en entrée. Le poulpe, par exemple, grillé et croquant, presque caramélisé, et servi avec câpres et fenouil en fines tranches, peut très bien servir d'assiette principale si on a l'appétit léger. Et faites attention aux boulettes en entrée, non seulement elles manquent de subtilité côté saveur, mais elles sont énormes.

Et après tout, il faut garder de la place pour le dessert, notamment le tiramisu, particulièrement délicat et léger, pas trop sucré, juste assez humecté par les saveurs du café et lié par une fine mascarpone, sans oublier la panna cotta à la framboise fraîche qui disparaît en bouche, diaphane, et laissant dans son sillage un sourire crémeux et plein de soleil.