La nostalgie a son importance. Quand les choses ne tournent pas rond, on se tourne vers le passé. Qu'on idéalise parfois. Mais ça fait du bien de se souvenir des beaux moments et des bonnes choses.

C'est souvent le cas au resto, quand on propose une carte inspirée d'une certaine cuisine rétro. Souvent, et c'est le cas au Plaza, il s'agit d'évoquer de la cuisine de travailleur dans une ambiance qui rappelle les brasseries parisiennes ou les tavernes montréalaises, ou un mélange des deux. Ici, ça marche. La décoration joue le jeu de la mémoire sélective du bois patiné, de la tuile noire, des banquettes d'église, de larges fenêtres ouvertes sur la rue, et cela même s'il y avait autrefois ici un commerce de vêtements pour homme. Du reste, la rue Saint-Hubert, sur la Plaza justement, était davantage connue pour ses robes et ses costards que pour la finesse de sa cuisine.

On sent que la carte a été longuement réfléchie  peut-être même juste un peu trop  mais comme dans plusieurs lieux du genre, ça ne décolle pas vraiment. On hésite entre le fast-food, bien fait tout de même, et les spécialités bistro un peu éculées. Des fish'n'chips, des tartares, des moules, du surf'n'turf, des croque-monsieur, du risotto, de la bavette et des os à moelle. C'est un menu qui touche à tout, et à la fin, on n'en comprend pas vraiment le sens. Rajoutez à cela du foie gras, une carte inscrite à la craie sur un tableau noir dans laquelle l'orientation est toute aussi hétérogène.

Le jour de notre visite, on servait une vichyssoise d'asperges, très crémée, mais un peu fade et à laquelle il manquait un peu de sel. On lui aurait rajouté un trait d'huile d'olive pour en faire jaillir les parfums, mais nous n'avons eu droit qu'à du beurre surgelé.

Puis le tartare, coupé au couteau bien entendu, fait de viande de bonne qualité, est déjà mélangé à une première garniture aromatique que l'on est encouragé à enrichir d'un jaune d'oeuf, de cornichons et de câpres. Il est servi avec des frites croustillantes  très bonnes au demeurant. Pourtant, on dirait que l'assiette ne prend pas son envol, elle est comme figée la viande est servie trop froide, ça manque encore de sel, il faut réclamer du poivre au service. À la fin, on est comme un peu las de tous ces ajustements. Mais on sent la sincérité et l'enthousiasme, il ne faut pas en douter. Pour que les préparations kitsch soient réellement affriolantes, il faudrait dépasser la simple imitation académique. Il faut leur redonner du souffle, les faire trembler, transmettre une émotion. Ce jour-là, la seule qui nous ait touchés a été comme une douce monotonie. Rien ne se distingue de ce qui se fait ailleurs en ville dans le même registre. Les sandwichs ne sont servis qu'à midi et celui au «pulled pork», comme il est coutume de les servir dans le Sud-Est américain, est fait correctement, la marinade au BBQ assez sucrée, la viande bien effilochée et tendre, mais l'assiette est présentée à la hâte, un peu brouillon. Il y a comme une petite paresse en cuisine, là. Les desserts sont, puisqu'il n'y a pas d'autres mots, parfaitement cochons crémeux, richissimes et un peu décadents à la fin. Une «whoopie pie», une sorte de macaron à l'américaine plein de crème, et une crème imparfaitement brûlée.

Le Plaza

6230, rue Saint-Hubert, Montréal 514-270-7155

On y retourne? Hmmmmm, j'hésite un peu.

Prix : Dans le registre branché, copieux et... aigu, qualité prix discutable. Sandwich à 15$, tartare à 19$, grillades autour de 25$, desserts à 7$. Comptez environ 85$ à deux, avec taxes et service, et deux bières en pinte.

Faune : Locale, sympa, jeune

Service : Gentil, mais l'accueil est un brin indifférent.

Vin : Carte courte, intéressante

Plus : L'ambiance.

Moins : Les banquettes en bois sont suprêmement inconfortables, avis aux sensibles du postérieur.