Je l'ai déjà dit et je le répète, il n'y a rien de pire pour le baby blues que se priver d'aller au restaurant. Si, il y a pire encore: fréquenter des restaurant soi-disant familiaux où la qualité de la salle de jeu spécialement aménagée pour les bambins est inversement proportionnelle à la qualité de ce qui se retrouve dans l'assiette.

À quoi bon aller au restaurant si c'est pour manger et faire manger de la junk? Et ne dites pas que c'est pour éviter le trouble, une fois de temps en temps, de préparer le souper. Il est toujours plus simple (et meilleur) de faire des pâtes au pesto que de paqueter les petits pour sortir de la maison en direction d'un établissement où l'on ne sait pas plus préparer une sauce qu'une salade.

Heureusement, nous ne sommes pas condamnés à rester à la maison à manger des pâtes. Il existe en effet à Montréal toute une catégorie de restaurants conviviaux où l'on sait préparer à manger, avec tout juste le degré de décibels nécessaire pour banaliser les cris de la petite dernière. J'ai nommé les Daou, Pazzesco, Sirène de la mer et compagnie. Des restaurants que je classerais tous ensemble sous la bannière ethnique-chic-familial.

Généralement, on y mange une cuisine traditionnelle raffinée qui ne révolutionne rien mais qui ne casse pas la banque non plus. Et on peut y aller en gang. Y aller en gros ou en petit groupe, que ce soit pour une fête entre adultes (la sortie annuelle de votre chorale, mettons, ou l'anniversaire de votre grande-tante préférée) ou un repas du vendredi soir avec les enfants.

À mon répertoire j'ajoute maintenant dans cette catégorie le restaurant Elounda, un grec installé depuis quelque temps à Saint-Laurent, à l'angle des boulevards Côte-Vertu et Marcel-Laurin.

Elounda est le nom d'un lieu de villégiature ultra-chic en Crète. Mais le restaurant n'a rien de clinquant et n'est surtout pas snob. Le décor est simple, confortable, sans chichi.

En entrant, la première chose qu'on aperçoit, dans le fond, est un étalage de poissons bien luisants et un aquarium rempli de homards. Elounda se spécialise dans les produits de la mer. Même s'il y a quelques grillades au menu (côte d'agneaux notamment), c'est vraiment du côté des poissons et fruits de mer que les plats offerts sont les plus intéressants.

Pour calmer les appétits et faire plaisir aux enfants, puisqu'ils étaient là tous les trois, nous avons rapidement commencé le repas par une assiette de calmars frits, qui sont arrivés accompagnés d'une sauce cocktail assez banale. Les céphalopodes, en revanche, coupés en généreuses tranches, étaient surprenants et tout en tendresse grâce, notamment, à la légèreté de l'appareil dans lequel on les avait enrobés pour les faire cuire.

Rapidement, on a aussi apporté les amuse-gueule maison qu'on sert d'emblée à tous les convives, une assiette comprenant entre autres des bouchées de feta crémeux, des beignets à l'orange et des morceaux de feuilleté aux épinards et à la menthe- le fameux spinakopita- moelleux grâce à leur pâte maison. En entrée, nous avons aussi continué avec une salade de pieuvre grillée et un plat de tranches de courgettes et d'aubergines frites à tremper dans le tzatziki. Le poulpe était tendre et tout juste assez imprégné des parfums de sucs carbonisés pour évoquer des souvenirs de Cyclades au mois d'août. Un peu de sel a toutefois été essentiel pour donner au plat toute sa profondeur.

Les légumes, de leur côté, étaient croustillants, parfaitement cuits et en harmonie avec la sauce où il fallait les tremper: un tzatzkiki bien costaud- donc préparé avec du yaourt grec très épais- et très relevé côté ail, comme il se doit.

En plat principal, évidemment, nous nous sommes dirigés vers les poissons. Le serveur, particulièrement sympathique avec tout le monde, nous a suggéré un petit bar à la fois juteux et facile à manger pour les enfants, donc sans trop d'arêtes. On nous l'a préparé au four, avec de l'huile d'olive, du jus de citron et des câpres: un délice cuit à point, encore très fondant.

Comme c'est trop souvent le cas même dans les bons restaurants grecs, le riz et les légumes vapeur- chou fleur, carottes, etc.- qui servaient d'accompagnement ne sont jamais passés proche de voler la vedette au plat dont ils se faisaient le contrepoint.

Au dessert, une assiette de fruits bien mûrs et un baklava sirupeux à souhait ont satisfait amplement les parents et leur progéniture. Je ne dirais pas que c'est le meilleur baklava que j'aie jamais mangé- c'est celui de mon amie Sofia- mais il se classait là haut dans les très bons, car au-delà des noix et du sirop au miel, de petites notes de beurre se laissaient deviner, juste assez coquines pour clore le repas en nous laissant l'impression d'avoir un peu pêché.

1818, boulevard de la Côte-Vertu

Montréal

(514) 331-4040

Prix Un généreux repas pour deux parents et trois enfants avec deux verres de vin nous a coûté 120 $ après taxes mais avant pourboire. Ce n'est quand même pas si mal, surtout qu'on n'a pas besoin de payer la gardienne (ni de la ramener à la maison).

Stationnement Comme on est à Saint-Laurent, il y a de la place! Et donc un bon parking, juste en face du restaurant. On n'est pas dans le Plateau.

Qui va là? Des familles avec enfants, parents, grands-parents. On y parle français, anglais, grec. On y va généralement en gang, pas pour des tête à tête.

Détail Un ami critique de restaurant rouspète tout le temps quand l'huile d'olive n'est pas de bonne qualité ni de la même origine que la cuisine proposée. Chez Elounda, on utilise la Irini première pression, extra-grecque. Ils sont carrément allés chercher la bouteille en cuisine pour nous la montrer.