Les femmes qui se lancent dans des traitements de fertilité vivent souvent un stress intense, en plus de se sentir seules, souvent déprimées, parfois découragées. Histoire de les accompagner dans ce cheminement qui peut être long et pénible, le Centre de reproduction McGill songe à leur offrir des ateliers de yoga, a appris La Presse. L'objectif? Respirer, se reposer et, ultimement, optimiser leur fertilité.

Assise en indien sur son tapis, une tasse de thé à la main, Tasha Lackman, tout sourire, est la «zénitude» même. Pourtant, la jeune femme de 36 ans revient de loin. Les émotions en montagnes russes, elle connaît. Après avoir appris qu'une malformation interne l'empêcherait très certainement de tomber enceinte naturellement, elle a été inséminée artificiellement trois fois. Trois fois elle a espéré, trois fois elle a été déçue. Il a fallu qu'elle vive une fausse couche, déception ultime, pour ensuite, enfin, tomber enceinte et mener une grossesse à terme. Grâce à quoi? Grâce au yoga, dit-elle.

Aujourd'hui mère d'une fillette de 2 ans, avocate dans un grand cabinet montréalais, elle donne aussi des cours de yoga sur le boulevard Saint-Laurent. Mais pas n'importe lesquels: des cours de "yoga pour la fertilité" pour les femmes, ainsi que pour les couples.

C'est avec son école, Fertilité, posture de l'enfant, et elle que le Centre de reproduction McGill envisage de s'associer, en vue d'offrir un service de plus à tous les couples qui attendent, parfois jusqu'à six mois, un traitement de fertilité. Et qui vivent, ce faisant, un stress néfaste, tant psychologique que physique.

«Cela ne fait aucun doute, les traitements de fertilité sont très stressants pour les femmes. Or, on sait que les hormones de stress sont néfastes pour la fertilité. Si on peut réduire le stress, on optimise la fertilité. D'où la question: comment réduire ce stress?», dit en entrevue Janet Takefman, directrice des services psychologiques du Centre de reproduction McGill. Mais l'avantage du yoga sur l'acuponcture, l'exercice ou même la marche, poursuit-elle, c'est que «c'est un bon exercice à la fois pour le corps et pour l'esprit. De plus, les techniques sont faciles à apprendre, et les patientes peuvent les refaire chez elles. C'est très convivial».

En prime, les cours offrent une occasion en or pour les femmes et leur conjoint de rencontrer d'autres couples traversant sensiblement la même épreuve, et du coup «sortir de leur isolement».

Moins convaincu, François Bissonnette, directeur médical chez Ovo, souligne que «tout ce qui peut aider à la détente est bien. Maintenant, que ce soit le massage aux pieds ou le yoga... On ne peut pas dire qu'il y ait des preuves scientifiques en faveur du yoga».

Selon Tasha Lackman, il ne fait pourtant pas de doute que le yoga, sans être une «solution miracle», peut grandement favoriser la fertilité. Différentes postures permettent en effet une détente profonde, ouvrent le plancher pelvien et les hanches, et favorisent la circulation sanguine vers les organes reproducteurs. Mais le yoga fait plus encore, poursuit-elle. «Avec la nouvelle loi (sur la gratuité des traitements de fertilité), la demande a explosé! Il y a parfois plusieurs mois d'attente avant d'avoir un rendez-vous. D'où la sensation de perte de contrôle totale qu'ont beaucoup de couples. Moi, avec le yoga, j'offre un outil concret aux gens, pour qu'ils aient le sentiment de faire quelque chose. Et même si ça ne marche pas, ils auront au moins développé des outils pour gérer leur stress, décompresser, et s'ouvrir.»

Idem pour les cours en couple, lesquels visent à «normaliser» une situation souvent vécue dans le silence et l'isolement. «Les hommes et les femmes ont des manières différentes de gérer leurs émotions, dit-elle. Moi, j'offre des outils pour les gérer. Parce que le yoga, ce n'est pas juste des postures, c'est aussi un style de vie!» La respiration et la détente, en harmonie, peuvent ainsi favoriser une communication nouvelle au sein du couple, dit-elle, à la rescousse d'une intimité parfois mise à mal par la «pression de faire l'amour», une pression que sentent bien des couples aux prises avec des problèmes de fertilité.

Et, en fin de compte, Tasha Lackman ne se le cache pas, ce qui peut le plus aider les couples, «sans minimiser le yoga», c'est surtout le côté «social» de l'activité. «On devient un genre de groupe de soutien. Les discussions, après le cours, sont presque aussi importantes. C'est comme une libération!»

Dans le cadre de la semaine de la sensibilisation à l'infertilité, plusieurs conférences sur le stress et l'infertilité sont offertes à McGill. Info: www.mcgillivf.com