Dans le film Our Idiot Brother, ma comédie légère préférée de 2011, l'acteur Paul Rudd joue une scène franchement très drôle où son personnage d'antihéros est prisonnier d'un rituel chamanique dans une «sweat lodge» surchauffée où les gens sont soumis à une séance de sudation extrême supervisée par un gourou.

Entouré de hipsters de Brooklyn qui l'encouragent à partager ses émotions intimes, le frère idiot en question supplie ses voisins de le laisser sortir, de l'asperger d'eau fraîche, bref de mettre fin à sa suffocation. Le pauvre gars finit par s'évanouir et quitte les lieux en ambulance.

Chantal Lavigne, dont le décès par «cuisson» a été reconstitué dans l'émission Enquête du 26 janvier dernier, n'a pas eu la chance d'être sauvée par des hurluberlus dotés d'un minimum de raison. Et elle a surtout eu la malchance d'être la victime d'une époque de croyances à la carte où le sens commun et l'esprit critique sont noyés dans une mare de mythes, de jugements fallacieux et, à l'autre extrême, de mépris pour tout ce qui est du domaine du spirituel.

Parce que vraiment, qui croire, entre le médecin vite sur la prescription, le coach de vie qui nous encourage à courir un demi-marathon pour surmonter nos peurs et la propriétaire de spa qui nous invite à subir un enveloppement pour nous libérer des «toxines» dans son tipi chauffé d'inspiration amérindienne?

Sectes et yoga

Cette semaine, je confiais à une amie mon intention de prendre des vacances de yoga au Costa Rica. «Ah non! Tu vas finir comme la dame qui s'est fait cuire!», s'est exclamée mon amie, à moitié sérieuse. «Mais non, t'inquiètes pas: c'est pas du yoga chaud...»

N'empêche qu'on ne saurait la blâmer. Jetez un coup d'oeil à la revue de presse d'Info-Secte: chaque jour, on y récence des articles sur des cas de fraude dans le monde de la scientologie, des histoires de mormons polygames, des représentants de l'Église catholique qui rapportent que le yoga est «l'oeuvre du diable», des maîtres de yoga new-yorkais qui décrètent que cette pratique est dangereuse pour les Occidentaux, des groupes de méditation en Arizona qui ont «cuit» dans des chambres de sudation...

Assez pour croire que le monde est peuplé de dangereux fanatiques aux poches profondes et à l'insatiable soif de pouvoir.

«It's all fun and game» jusqu'à ce qu'une jeune femme de Durham-Sud succombe. Mais bon: après tout, elle avait 35 ans, une tête sur les épaules, un sens critique.

Mais que penser, quand des profs parlent aux préados de la menace de la fin du monde en 2012? Ou des garderies, comme me racontait une amie, qui invitent des «thérapeutes en cohérence cardiaque» à donner des ateliers aux tout-petits?

Poser la question, c'est un peu y répondre.