Les enfants adoptés au Québec pourront bientôt avoir plusieurs parents, en toute légalité.

Ainsi, dans certains cas, la mère biologique pourra donc demeurer légalement le parent de l'enfant qu'elle a confié en adoption à des personnes qui deviendront, elles aussi, ses parents, du point de vue de la loi.

Considérés issus de deux familles, ces enfants porteront donc à la fois le nom de famille de la mère biologique et celui des parents adoptifs.

«L'enfant aura ainsi une double appartenance familiale: il sera pleinement intégré dans sa famille adoptive, tout en continuant d'appartenir à sa famille d'origine», peut-on lire dans le chapitre de l'avant-projet de loi déposé mardi à l'Assemblée nationale par la ministre de la Justice, Kathleen Weil, qui porte sur l'adoption sans rupture de lien.

Cependant, sur le plan légal, la responsabilité parentale comme telle reviendra aux parents adoptifs, à moins que ces derniers ne remplissent pas leurs devoirs.

S'il est adopté tel quel, ce document remet en question toute la notion de filiation et de responsabilité parentale, en multipliant les cas de figure.

Par exemple, le projet, qui modifiera le Code civil, institue de nouvelles notions comme l'adoption ouverte, l'adoption sans rupture avec le parent biologique, inspirée de la France, de même que la délégation judiciaire à des tiers - grands-parents, oncles, tantes, ex-conjoint, par exemple - de l'autorité parentale.

L'adoption sans rupture avec le parent naturel est destinée particulièrement aux jeunes placés dans les Centres jeunesse, a dit la ministre.

La mère qui ne veut plus assumer son rôle, mais hésite à couper tout lien avec son enfant, pourra plutôt privilégier «l'adoption ouverte» et conclure une «entente de communication» avec les parents adoptifs.

Devant un tribunal, elle pourrait ainsi négocier un droit de visite et diverses formes d'échanges avec son enfant.

Les nouvelles règles prévoient également qu'un adulte ayant joué un rôle parental dans la vie de l'enfant de son ex-conjoint pourra l'adopter.

De plus, l'enfant adopté pourra obtenir d'un tribunal le droit d'avoir accès au dossier médical de ses parents biologiques.

Toutes les règles ayant trait à la confidentialité des dossiers d'adoption ne s'appliqueront, cependant, qu'après leur entrée en vigueur.

Dans le cas où un enfant adopté recherche ses origines, le père et la mère biologiques pourront s'opposer à ce que leur identité soit révélée.

Ils pourraient par ailleurs accepter que leur identité soit connue, mais refuser que leur enfant les contacte.

L'enfant qui tentera malgré tout de rencontrer ses vrais parents s'exposera à de fortes amendes.

La même règle prévaut pour le parent qui rechercherait son enfant confié à l'adoption.

En procédant à ces modifications, Québec dit vouloir s'adapter aux nouvelles réalités sociales et familiales.

«Le modèle familial unique n'existe plus. Une proportion importante des familles québécoises sont recomposées, monoparentales ou homoparentales, d'où émanent une diversité de situations avec leur problématique particulière», a expliqué la ministre en conférence de presse.

Le document fera l'objet d'une consultation en commission parlementaire et sur Internet au cours des prochains mois.