Petite révolution dans le monde des CPE. Basta, les activités minutées, place à un rythme plus lent, celui de l'enfant. C'est du moins ce vers quoi tend le Regroupement des CPE de la Montérégie, qui a invité nul autre que le réalisateur et auteur français Bernard Martino (L'enfant est une personne, Loczy, Voyage en Mongolie intérieure), pour partager sa philosophie. Après la performance, retour à l'essence?

Voilà plusieurs mois déjà que le Regroupement des CPE de la Montérégie s'interroge: est-ce bien nécessaire de minuter ainsi les dîners, d'organiser et d'animer toutes les activités, bref, d'imposer aux enfants un régime hyper structuré? La performance, ça sert à quoi à 12 mois?

 

«De bonne foi, on dirait qu'on s'est laissé prendre dans une sorte de roulement. Et peut-être qu'on est allé un peu trop loin», admet Claudette Pitre-Robin, présidente du Regroupement, à l'origine de cette réflexion. Alors, après avoir invité l'auteur Carl Honoré l'an dernier (La lenteur, Manifeste pour une enfance heureuse), c'est au tour du réalisateur Bernard Martino de prendre la parole devant le Regroupement.

Objectif? Non pas renier le travail que font déjà les CPE, au contraire, mais peut-être retrouver un certain équilibre entre la (sur) stimulation et les besoins réels des enfants. «Est-ce que, finalement, il n'est pas possible de laisser les enfants suivre leur propre rythme?»

Et pourquoi Bernard Martino? L'auteur et réalisateur s'intéresse depuis toujours aux enfants, aux traitements qu'on leur réserve. Et c'est à Budapest, dans un petit orphelinat fondé en 1947, qu'il a trouvé le travail le plus remarquable: «J'avais le sentiment qu'on tendait là-bas vers une civilisation supérieure», dit-il en entrevue.

La philosophie? «L'idée, c'est que l'enfant n'est pas un tube digestif, mais qu'il a des compétences. Et que pour grandir, il a son travail d'enfant à faire. Quelque part, il n'a pas vraiment besoin de vous pour le faire. Mais il a besoin que vous créiez les conditions pour le faire.» En gros, il ne s'agit pas de «sauter sur l'enfant pour le stimuler», mais au contraire de l'«observer» davantage. «Et vous allez être éblouis, parce qu'il sait déjà plein de choses. Et cette observation va induire quelque chose de fondamental: le respect du bébé.»

Dans son documentaire Loczy, du nom de l'orphelinat cité plut tôt, on voit ainsi des enfants, calmes, passer du temps à jouer avec un bol là, un jouet ici. Jamais les éducatrices ne les stimulent. Mais elles sont toujours là, pas loin, à les observer. «Parce que les enfants n'ont pas besoin d'être stimulés. Non. Ils ont besoin d'être observés, contenus, accompagnés. Ils ont besoin de sentir l'intérêt de l'adulte, la confiance.» Bref, toujours, ce «respect».

Fait à noter, dans cet orphelinat, si les éducatrices ne «stimulent» pas les enfants, elles prennent par contre une attention toute particulière à leurs soins. Chaque enfant, à son tour, a droit à un moment privilégié, exclusif et absolu, de caresses et de mots doux pendant le change, le bain, le biberon. Des gestes codifiés, réguliers, constants, et surtout vrais, offrant une sécurité telle à l'enfant qu'ensuite il est capable de développer son autonomie. «Parce que oui, c'est important l'attachement, mais il y a aussi le détachement...»

Bernard Martino donnera une conférence grand public mercredi prochain, le 27 janvier, à 19h, au centre Marcel-Dulude, à Saint-Bruno. Informations et réservations: 450 672-8826, poste 221. Prix: 15$ pour les membres, 20$ pour les non-membres.