Si votre enfant a soufflé ses cinq bougies hier, c'est qu'il est déjà en maternelle. Mais si son anniversaire est aujourd'hui, alors il est encore à la garderie. La question se pose: les enfants du mois de septembre, plus jeunes que les autres, sont-ils du coup désavantagés dans leur scolarité?

On le sait, au Québec, les enfants qui ont 5 ans avant le 30 septembre entrent en maternelle. Les autres, nés après, doivent attendre une année. Dans une même classe, on trouve donc des enfants de 6 ans et des plus petits, d'à peine 5 ans. Un écart qui préoccupe visiblement plusieurs parents.

«On s'est demandé si notre fils avait assez de maturité», témoigne Géraldine Martin, dont le fils, Alexandre, qui vient d'avoir 5 ans, est particulièrement grand. «Je me suis dit, à cause de son physique, ça va être pire: on va penser qu'il a 7 ans!»

Au cours de l'été, quand Samantha Cameron, femme du premier ministre britannique David Cameron, a donné naissance à son quatrième enfant, au mois d'août, le Telegraph s'est carrément interrogé: «C'est son quatrième enfant, elle ne pouvait pas mieux planifier ses affaires? a lancé une journaliste. S'il y a une chose qui fait peur à bien des mères de la classe moyenne (...), c'est bien d'avoir un enfant du mois d'août.»

Plusieurs recherches corroborent cette «horreur»: des études (notamment en France) ont démontré que la qualité du parcours scolaire est souvent déterminée par le mois de naissance. «Cette constatation n'est pas une surprise, a souligné il y a quelques années un psychologue dans les pages du Monde. On ne peut pas seulement dire à un enfant: apprends. Les progrès relèvent autant, sinon plus, du développement de l'enfant que de l'apprentissage.»

Pendant l'été, une autre étude, américaine cette fois, a démontré que les enfants nés à quelques mois de la date butoir étaient aussi plus à risque d'être diagnostiqués comme souffrant de troubles de déficit d'attention. «Mais nous croyons que ce sont de faux diagnostiques. En fait, ce sont des enfants qui ont tout simplement moins de maturité», a souligné l'économiste et coauteure de l'étude, Melinda Morrill, de l'Université de la Caroline-du-Nord.

Du coup, de plus en plus de parents songent à retarder l'entrée de leur enfant en maternelle. Le phénomène (dit redshirting) toucherait aux États-Unis pas moins de 17 % des enfants. Au Québec, chaque année, une centaine d'enfants entrent tardivement à l'école (restant soit avec leurs parents, soit un an de plus en garderie, au plein prix). L'an dernier, selon les dernières données provisoires, ils étaient 125, dont 11 à la CSDM.

Chrystel Black remarque encore un décalage entre son fils Leslie, né au mois d'août, et les autres, même trois ans après son entrée en maternelle. «Il rush plus que les autres. Si j'avais pu le faire entrer plus tard, je l'aurais fait.»

L'importance de la stimulation

Marie-France Delorme est enseignante en maternelle depuis 17 ans. Cette année, elle a quatre «bébés du mois de septembre». Peut-être font-ils un peu moins vite leurs bricolages, prennent-ils plus de temps à s'habiller. Mais ont-ils globalement plus de difficulté que les autres? «Il y en a qui ont 5 ans depuis longtemps qui sont beaucoup plus "poqués", dit-elle. Ce qui fait la différence, c'est la stimulation parentale.»

«Quand on parle d'une différence significative sur le plan statistique, cela peut être d'un point ou deux. Un point parmi une multitude d'autres facteurs, notamment la stimulation des parents en matière de lecture, la qualité du CPE», renchérit Denis Côté, psychologue en milieu scolaire.

Vrai, il a été démontré que les joueurs professionnels de hockey ont tendance à être nés au début de l'année (la date butoir étant ici le 31 décembre). Parce qu'à nouveau plus forts, plus développés, plus rapides que les autres, explique le psychologue Simon Grondin, de l'Université Laval, qui a fait une étude sur la question de l'»âge relatif», dont il voit aussi quelques effets se manifester dans le parcours scolaire. «Mais les vrais risques scolaires, dit-il, dépendent vraiment du soutien qu'on a à la maison.»

Alors comme le conclut Marie Pétillot, dont le fils Mathieu vient d'entrer en maternelle deux semaines avant ses 5 ans, si son fils manque certes un peu de maturité, s'il a un petit retard en matière d'acquisitions de connaissances, «à long terme, je pense que ça va se rétablir. Non, je ne fais vraiment pas une psychose sur ces choses».