Une fois par mois, pendant 24 heures, la Chine dresse la liste des enfants sur la touche qu'elle met en disponibilité de façon accélérée. C'est souvent ce à quoi s'en remettent les parents d'ici qui attendent depuis deux ou trois ans et qui veulent accélérer les choses. Les enfants peuvent être «réservés» pendant 24 heures. «Les parents ont 24 heures pour voir s'ils adopteront un enfant qui n'a qu'un rein ou qui n'a pas de jambe», explique le Dr Jean-François Chicoine.

Inutile de dire que les lundis matin sont occupés à la clinique du Dr Chicoine, spécialisée en adoption et en santé internationale. S'il est opposé à la pratique, le Dr Chicoine offre néanmoins son expertise.

En quelques heures, il aide les parents à voir ce que signifiera l'adoption de l'enfant qui pourrait leur être confié. Combien de chirurgies? Combien d'hospitalisations? L'enfant sera-t-il en mesure d'aller à l'école? «Parfois, les parents doivent déménager, parce qu'en région, ils n'auront pas les soins spécialisés dont leur enfant aura besoin. Il n'est pas rare que je leur dise de prévoir deux, trois ou quatre chirurgies dans l'année de l'arrivée.»

Le problème, c'est que même dans les grands centres, les ressources sont limitées. D'ailleurs, précise le Dr Chicoine, sa clinique, tout à fait débordée, n'accepte plus que les cas les plus lourds.

«La réalité n'a plus rien à voir avec celle des années 90. À cette époque, il y avait essentiellement deux groupes d'enfants: les petites Chinoises «du surnombre», qui arrivaient ici très jeunes et en bonne santé. À côté de cela, il y avait ces enfants d'Europe de l'Est qui avaient été mal nourris, qui présentaient souvent un syndrome d'alcoolisation foetale ou des troubles de l'attachement, du comportement ou un retard mental.»

«À l'époque, les problèmes de malnutrition ou de maladies infectieuses se réglaient assez bien. Aujourd'hui, avec les enfants plus vieux et plus lourdement handicapés qui nous arrivent, c'est autrement plus compliqué, autant sur le plan physique que psycho-affectif», s'inquiète le Dr Chicoine.

«La majorité des enfants s'en tirent bien, mais je dirais qu'un tiers des enfants adoptés, ces années-ci, requièrent beaucoup de services de santé.»