Elles sont toutes deux créées et produites au Québec. Martin Lim et Duy, deux marques de vêtements de luxe pour femme, ont fait le pari de l'indépendance et de la liberté. Voici le parcours de designers bien de chez nous, puristes et libres comme l'air.

Sur le plan patronymique, Martin Lim est la contraction de Danielle Martin et de Pao Lim, couple à la ville et derrière les machines à coudre. Une toute jeune marque lancée en juin 2010 avec au compteur deux collections, celle du printemps-été, suivie de l'hiver 2012, présentée à la semaine de mode alternative de Toronto.

Mais les deux designers n'en sont pas à leur coup d'essai. Après avoir fait leurs classes au très réputé Saint Martins College de Londres, celui-là même qui a accueilli et formé certains des plus grands créateurs du monde (de John Galliano à Alexander McQueen ou encore Gareth Pugh...), Danielle et Pao se sont succédé chez Roland Mouret, célèbre couturier français installé à Londres.

«À l'époque, notre fille était toute jeune et les études extrêmement exigeantes. L'un de nous devait être plus disponible. Lorsque Pao a fini sa dernière année, j'étais designer chez Roland Mouret. Puis, l'année d'après, il a repris mon poste chez le fameux créateur, et j'ai terminé mon année au collège Saint Martins», se remémore avec émotion Danielle Martin.

Deux diplômes en or et une formation béton en main plus tard, sans oublier un stage dans les ateliers parisiens de Christian Lacroix, notre couple rentre au bercail.

Les marques Martin Lim et Duy ont ceci en commun qu'elles se singularisent dans le paysage mode ambiant, au lieu de s'adosser à de grands groupes. Un mot d'ordre: l'indépendance et la créativité libre des concepteurs modernes.

Photo: fournie par Duy

Les intemporels de Duy



Quant à la marque Duy, du créateur du même nom, elle existe depuis plus de six saisons. Le designer a suivi une formation au collège LaSalle, dont il est sorti, diplôme en main, en 2000. Après un détour d'un an à Londres et à Paris, histoire de voir du pays, Duy est revenu vivre à Montréal.

«J'ai même ouvert une boutique multimarques dans le Vieux-Montréal, du nom d'EBP pour Everyday Beautiful People, qui, hélas!, n'a pas fonctionné, dit-il. Il faut dire qu'au départ, mon dada, c'était des jupes à volume en crinoline de coton, dont le coût de fabrication était exorbitant et, par conséquent, absolument pas rentable.»

La création n'est pas un long fleuve tranquille... Commencent alors les époques de collaboration avec de grandes marques commerciales connues pour chacun de nos designers, Pink Tartan pour Duy. «C'est si différent de travailler pour une grosse structure, et franchement, ce n'était pas de la création comme je l'entendais. C'est à partir de là que je me suis lancé pour de vrai, seul aux commandes.»

«Qui ne tente rien n'a rien!», pourraient s'écrier en choeur les designers qui partagent le même amour de la création, un goût identique pour les matières luxe et les coupes parfaites, sans omettre le parti pris commun de tout faire produire localement.

«L'amour de l'art est une chose, mais il faut vendre pour vivre, affirme Danielle Martin. J'aime les vêtements chic et portables à toute heure du jour et de la nuit, «effortless», comme diraient les Américains.»

Le printemps de la marque Martin Lim est fait de robes élégantes et ultraféminines, évoquant de près ou de loin les années 20, avec de minutieux détails de couture. Quant à l'hiver 2012, il s'inspire du film mythique et futuriste Metropolis de Fritz Lang, avec des effets de drapés, de superpositions, d'asymétrie, le tout parfaitement maîtrisé et glamour.

Duy adopte, de son côté, un style classique, mais avant-gardiste. «J'adore réinventer les intemporels en jouant avec des trompe-l'oeil, avec ce souci permanent d'une couture bien faite, dit-il. Je suis un obsédé des manches et des épaulettes parfaitement réalisées.»

La collection, dévoilée à la Semaine de la mode de Toronto, est un hommage au film The English Patient, avec des caftans réinterprétés, des pantalons d'homme revisités, de jolies robes aux teintes sable, terre, roses, sans oublier les incontournables noir et blanc.

Qui a dit qu'il ne se passait pas grand-chose de nouveau en mode à Montréal? Dans un monde fantasmé, les créateurs libres et audacieux devraient pouvoir se faire une place au soleil, mais devant la concurrence féroce des multinationales, la réalité se révèle souvent cruelle. Pour conjurer le sort, allez voir le formidable travail de ces marques qui ont de quoi ensoleiller votre été et les nombreuses saisons à venir.

Photo: Brian Ypperciel et Maxyme G.Delisle

Une création de Martin Lim