Les créations d'Anastasia Radevich, Montréalaise d'adoption, sont des pièces uniques et spectaculaires aux incroyables détails façon couture. Rencontre avec une créatrice de chaussures qui, parions-le, n'a pas fini de faire parler d'elle.

Silhouette gracile, visage aux traits incroyablement jeunes, tout laisse croire qu'Anastasia Radevich vient à peine de terminer ses études. Et pourtant... Née à Minsk, en Biélorussie, d'une famille de designers de chaussures depuis deux générations, la créatrice a déjà un sacré bagage, produit de ses premières années passées à aider papa et maman, puis de ses multiples collaborations pour différentes marques dans le monde.

À commencer par un séjour de 10 ans à Montréal, qui lui a permis de travailler comme designer chez Aldo. «Ce n'était pas de la création pure comme je l'entends, bien sûr, mais cela m'a appris entre autres la logistique», explique Anastasia, en s'enthousiasmant pour cette ville qui les a accueillis, son petit ami, ingénieur et aujourd'hui partie prenante dans leur affaire de mode, et elle.

«À Montréal, il y a une telle qualité de vie qu'on a le temps de réfléchir et de créer, ce qui n'est pas le cas à Londres», ajoute-t-elle. Elle a émigré dans la capitale britannique en 2009 pour un an de scolarité au sein de la très sélect London Fashion School. Un démarrage prolifique qui lui a permis de se faire remarquer par Alexander McQueen, vénéré créateur de mode disparu depuis, qui l'a engagée pour participer à la création des chaussures du défilé printemps-été 2010, la saison des fameuses «compensées», encensées par la presse du monde entier.

Modestement, Anastasia dit qu'à l'époque elle n'était qu'un petit maillon de la vaste chaîne créatrice. Mais elle fait sien l'adage du designer anglais: «Rien n'est impossible, ne t'arrête jamais et poursuis tes rêves.»

Sans oublier l'essentiel, les influences artistiques de la griffe anglaise qui l'ont indéniablement marquée. Son épopée londonienne se poursuit ensuite chez Nicolas Kirkwood, jeune prodige anglais connu pour ses escarpins avant-gardistes au glamour sculptural. Elle y restera quatre petits mois, puis ne résistera pas à l'envie d'un retour à Montréal, sa ville de coeur, pour se lancer seule aux commandes de sa petite entreprise, épaulée par son fidèle compagnon de vie. «Moi, je crée, et Nicolas, qui est ingénieur, rend possibles mes créations en les testant en trois dimensions.»

Parce que s'il y a un domaine en mode qui nécessite de multiples étapes à caractère purement technique, c'est bel et bien celui des chaussures. «Exactement comme en architecture: il faut que les fondations soient solides. Le talon, aussi magistral soit-il, doit pouvoir résister et être adapté à la marche.»

Parlons-en justement, de ces créations. Pour le printemps-été 2011, la collection intitulée «Dream Fall» offre des bottillons à hauts talons sculptés; le dessus est en soie incrustée de perles, ou recouvert de languettes de soie, dans des tonalités de gris perle ou de sable - évoquant de drôles de créatures marines.

En amont de ce travail, on devine une riche réflexion, suivie d'un long processus technique. «Le prototype d'un talon représente deux mois de recherche et de tests, avant de partir en Italie. Tout cela sans compter l'assemblage, les incrustations, les ornementations et autres jeux de couture, parce que chez moi, tout est réalisé à la main», explique la designer. Un travail fou pour des créations démentes.

Pour preuve encore, l'hiver prochain s'annonce «Biofuture», le printemps 2012 s'intitulera «Lost Civilizations», avec des modèles tout droit sortis d'un imaginaire fantastique que la designer cultive à coups de jeux vidéo et, à l'opposé, d'une fascination sans limites pour la nature.

La créatrice de mode américaine Katie Gallagher ne jure d'ailleurs plus que par les modèles d'Anastasia. Quant aux clientes, elles viennent du monde entier pour cliquer sur son site afin de réserver ses créations uniques. Gageons qu'Anastasia n'en est qu'aux balbutiements d'une longue carrière, qui s'annonce d'ores et déjà éblouissante.

Une pointure de la chaussure est née!

Photo: fourne par Anastasia Radevich