«Après le vaccin RRO, Matthieu a hurlé pendant un an. C'était intolérable», raconte sa mère, Jill, dans Silence, on vaccine. On voit le garçon, l'air absent, à la piscine. À deux ans et demi, le diagnostic d'autisme est tombé. «Ça ne fait aucun doute dans mon esprit. Mon enfant était différent avant la vaccination. Il était normal. C'est le vaccin. Je n'aurais jamais dû le faire vacciner.» La science a pourtant prouvé qu'il n'y a aucun lien entre la vaccination et l'autisme.

«De nombreux virologues américains ont subi des menaces au cours des dernières années», peut-on lire dans le magazine New Scientist. Par téléphone, mais surtout par courriel. Des groupes de parents, surtout actifs aux États-Unis et en Grande-Bretagne, croient dur comme fer que l'infime dose de mercure que contiennent les vaccins a rendu leurs enfants autistes. La cinéaste Lina B. Moreco en est elle aussi convaincue.

 

Pas moins d'une vingtaine d'études d'envergure - menées au Royaume-Uni, au Canada, aux États-Unis, au Danemark et en Suède - ont démontré qu'il n'y a pas de lien de causalité entre l'autisme et le vaccin. Les dernières ont été publiées l'automne dernier. «Si on trouve plus de cas d'autisme aujourd'hui, c'est parce qu'ils sont mieux diagnostiqués, indique Gaston De Serres, médecin-conseil à l'Institut national de santé publique du Québec. On trouve d'ailleurs la même proportion d'autistes chez les vaccinés et les non vaccinés.»

Principal expert interviewé dans Silence, on vaccine, le Dr Andrew Wakefield est à l'origine de la controverse liée à l'autisme. Dans un article publié dans The Lancet en 1998, le gastro-entérologue britannique, après avoir étudié le cas de huit enfants autistes, a émis l'hypothèse que le vaccin pouvait déclencher un autisme régressif. Vent de panique. En Irlande, la couverture vaccinale contre la rougeole a subitement chuté à 76%. Le nombre de personnes touchées par la maladie y est passé de 148 en 1999 à 1603 en 2000. Trois enfants en sont morts.

Soupçonné d'avoir trafiqué des données de recherche et d'avoir omis d'indiquer ses sources de revenus (un groupe de parents d'autistes décidés à poursuivre des fabricants de vaccins), ce gastro-entérologue est l'objet d'une enquête du General Medical Council, à Londres. Plusieurs de ses cochercheurs se sont rétractés. The Lancet a admis avoir commis une faute en publiant l'article. «Ce procès dure depuis juillet 2007 et on n'en voit toujours pas la fin», peut-on lire dans les pages du quotidien The Guardian du 12 janvier 2009.

Quelques études - aucune parmi les plus récentes et les plus significatives - tendent néanmoins à confirmer l'hypothèse du Dr Wakefield. Les parents s'y accrochent. «C'est frustrant. Quelques études, qui n'ont pas beaucoup de poids scientifique, peuvent ruiner des années d'efforts de sensibilisation. L'effet est disproportionné», déplore Maryse Guay, médecin-conseil à l'INSPQ et professeure à l'Université de Sherbrooke.

«L'autisme est une maladiecatastrophique dont on ne connaît pas les causes. Les parents cherchent à comprendre. Ils font à tort des associations temporelles avec la vaccination. C'est la même chose pour les victimes de sclérose en plaques, note Gaston De Serres. Si une maladie se déclenche quelques heures après la prestation de serment de Barack Obama, va-t-on accuser le nouveau président américain d'avoir causé cette maladie?» illustre-t-il.

 

UN MILLION DE DOLLARS

Des parents d'un enfant américain souffrant d'une maladie neurologique similaire à l'autisme ont reçu l'an dernier une compensation d'un million de dollars dans le cadre d'un programme d'indemnisation gouvernemental. L'enfant, vacciné en 2000, souffrait d'un trouble génétique rare le rendant plus susceptible aux effets secondaires des vaccins. Depuis, plusieurs parents d'enfants autistes cherchent à savoir si c'est le cas pour leur enfant. À suivre.

INDEMNITÉS AUQUÉBEC

En 1985, le Québec s'est doté d'un programme d'indemnisation des victimes d'une vaccination sans égard à la faute. Depuis ce temps, 98 demandes d'indemnisation ont été évaluées et 27 victimes ont été dédommagées.

Source : Ministère de la santé du Québec